Martín Mazza : le gay-luron
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florence calvezA un moment où plusieurs pays européens, comme la France ou le Royaume-Uni, débattent de l’adoption de la loi sur le mariage homosexuel, l’éditeur, entrepreneur et acteur espagnol Martín Mazza revient sur sa vie et ses expériences relatives à sa condition sexuelle : « Vivre sa sexualité, même si ça n’en a pas l’air, est l’une des choses les plus importantes qu’ont les gens dans la vie ».
Mazza, 34 ans, réside actuellement à Madrid et travaille en tant qu’éditeur à la revue Oh my god!. En outre, il possède sa propre maison de production érotique et grâce à son travail comme acteur dans le monde du film X, il a vécu entre Los Angeles, San Francisco, Sidney, New York, Londres et Madrid où il a pu vérifier les différences sociales envers l’homosexualité. « En Espagne tout a changé, nous sommes même le pays avec le plus de droits et dans lequel le monde gay est le plus normalisé d’Europe », affirme-t-il. Fils unique d’une famille appartenant à l’Opus Dei, Mazza a fait ses études dans des collèges et des universités de l’institution catholique, mais ne s’est jamais senti rejeté de par sa condition sexuelle. Au contraire, « on m’a donné une éducation et une discipline que j’estime beaucoup. »
« Je crois que le problème de l’homophobie éprouvée par certains réside dans l’éducation et dans la culture »
Son adolescence, cependant, a été un peu plus difficile, et il avoue qu’il a toujours su qu’il était homosexuel. Il ne s’est tourné vers les garçons qu’à 15 ans et a attendu ses 17 ans pour reconnaitre sa sexualité ouvertement. « Je voulais être moi-même et faire ma vie, pas seulement pour avoir un copain, mais parce que je voulais m’éloigner de ce que ma famille voulait que je sois », ajoute-t-il. Mazza précise que même si sa famille a bien accueilli son homosexualité, lui voulait autre chose dans la vie et a décidé de partir vivre à Londres à 18 ans. Aujourd’hui, l’acteur se souvient qu’embrasser un garçon dans la rue était « quelque chose d’incroyable », et qu’expérimenter de nouvelles choses le rendait très heureux. « Je me sentais plein d’énergie », souligne-t-il.
Bien que le monde dans lequel a grandi Martín fût rempli de personnes membres de l’Opus Dei, il n’a jamais subi de rejet ni de conséquences homophobes à cause de sa condition sexuelle. « Je crois que le problème de l’homophobie éprouvée par certains réside dans l’éducation et dans la culture de ces personnes », affirme-t-il. Martín, qui ne se considère fanatique d’aucune croyance, pense que toutes les religions ont quelque chose en commun et assure que « les gens ont besoin de croire en quelque chose et leur donne un nom, c’est une partie de l’estime de soi et de l’estime sociale, une façon de se réconforter et d’avoir une morale ». Cependant, il y a des années, Mazza a travaillé pour une entreprise de l’institution, où il n’a pas eu de difficultés à rendre publique sa condition sexuelle. En la traitant de manière normale mais sans cesser de reconnaitre son homosexualité, il considère que « le fait d’être gay est significatif, parce que le sexe et tout ce qui l’entoure est une des choses les plus importantes de la vie », mais que n’importe qui doté d’un minimum d’intelligence, sait que ça n’a rien à voir dans « ta capacité de développer, d’entreprendre ou à travailler ». Il n’a pas ressenti de rejet dans son cercle d’amis non plus, bien au contraire. Car pour Mazza, l’Espagne est devenue un pays très ouvert et permissif, grâce à l’ouverture du monde gay qu’a entrainé la transition démocratique.
En ce moment il n’est pas en couple. Malgré cela, il avoue que « trouver un partenaire dans le monde gay est plus difficile que dans le monde hétérosexuel » et que, pour lui « le fait d’être en couple n’est ni un but ni une finalité dans la vie, c’est plutôt une option ». Dans le futur, il souhaite se marier et continuer à avoir les mêmes droits que n’importe qui d’autre : « peut-être que je ne ferai pas usage de mon droit au mariage, mais j’ai cette option comme quelqu’un d’autre ». Martín pense de plus que l’Espagne est l’un des pays qui a la plus grande tolérance sur ce sujet, car le fait d’avoir été réprimé pendant longtemps a fait que les gens en sont davantage conscients. « Les révolutions sont les grandes promotrices des changements tant sociaux que culturels, et le pas qu’on fait en avant après chaque révolution est plus grand que celui d’avant », déclare-t-il.
Pour Martín, que l’Espagne adopte la loi sur le mariage gay a été pour lui une reconnaissance qui a changé la perception de sa famille et de ses amis. « Ce droit est un droit que les gays ne sont pas les seuls à demander, c’est un droit de humain sans distinction », pense l’acteur, pour qui nous appartenons tous à une société avec des goûts et des façons de vivre différents, mais auxquels on doit imposer les mêmes normes. « Je ne comprends pas comment on peut applaudir le massacre de taureaux ou avoir à payer des impôts équivalents à ceux d’autres personnes, et ne pas pouvoir me marier parce que je suis amoureux ou que je veux fonder une famille », assure Martín, qui considère comme rétrograde le fait que le Parti Populaire ait présenté un recours en inconstitutionnalité contre la loi en question. « Mes impôts, je les appelle des impôts et mon prêt immobilier, je l’appelle aussi un prêt immobilier et mon mariage, je veux aussi l’appeler mariage. »
Lire le premier portrait de notre série consacré au LGBT
Photo : Une ©Adrien le Coärer; Texte, © Martín Mazza. Vidéo: knorpel26/YouTube.
Translated from Martín Mazza: “A lo mejor no hago uso del matrimonio, pero tengo la misma opción que los demás”