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« Loukachenko prend les dirigeants européens pour des mollusques »

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SociétéPolitique

L'UE a jugé que les élections locales organisées le 14 janvier en Biélorussie n'étaient pas ‘démocratiques’. L'opposition du pays a d'ores et déjà annoncé son intention de protester.

Olga Karatch, 28 ans, est institutrice. Et l'une des plus actives dissidentes biélorusse dans cet Etat situé aux confins de la Pologne, l’Ukraine et les pays Baltes, considéré comme l’une des dernières dictatures en Europe.

Leader de l'association 'Nasz dom' ['Notre maison'] et editrice d'un magazine d'opposition paraissant sous le manteau, elle lutte sans cesse pour que soient enfin respectés les droits de l'homme dans son pays. De passage a Varsovie, en transit entre Prague et Bruxelles, Karatch tente de sensibiliser les autorites communautaires a la question de la liberte des medias en Bielorussie. Elle vit aujourd'hui à Vitebsk où elle travaille en tant que conseillere municipale.

Le droit a l'information

Emprisonnee a plusieurs reprises, Karatch est jeune, sereine et à la fois pleine d'energie. «Nous agissons dans dix lieux differents en Bielorussie – a l'exception de Minsk, la capitale,» commence t-elle à m'expliquer à propos de son ONG. «Non pas parce que manquons de volontaires ou encore d'opposants au regime mais en raison de la repression

C'est en 1994 que Loukachenko, parfois surnommé le 'Staline biélorusse' prend les rênes du pays. En 2006, il est réélu avec plus de 86% des voix. Selon Karatch, «les ecoliers de l'epoque, qui sont desormais âgés d'une vingtaine d'années, sont tellement endoctrines qu'il est difficile aujourd'hui de leur expliquer qu'ils ont vecu toute leur vie dans le mensonge.» Une analyse que vient appuyer une enquête réalisée par l’ONG 'Notre Maison' : «le public qui soutient Loukachenko a entre 18 et 22 ans ou plus de 65 ans. Ceux qui s'opposent au regime du Maître de Minsk ont eux entre 23 et 45 ans

Comment alors rendre les Bielorusses conscients de ce qu'ils vivent ? Selon Karatch, il importe de procéder par etapes. «En Bielorussie, chacun croit faussement que les medias sont libres. La plupart d'entre nous avons encore a l'esprit l'époque sovietique, lorsque tout, excepté la television d'Etat etait interdit. Une période durant laquelle les gens ecoutaient 'Radio free Europe' rouges de honte. Maintenant nous avons accès à la television, au cable, à des centaines de journaux et à Internet. Mais il n'existe quasiment aucun programme d'information. Seulement du divertissement ou des magazines people ou de mots croisés.»

Ou est passe mon argent ?

En réponse à cette chape de plomb, l'UE a décerné son prix Sakharov 2006 pour la liberte de penser a Alexandre Milinkievitch, l'un des leaders de l'opposition biélorusse. Pour autant, Karatch ne voit dans cet acte que de l'hypocrisie : «le plus grand sponsor de la Russie, c'est finalement l'UE qui lui achete gaz, carburant, textile sans se poser aucune question», dit-elle. «Les responsables europeens veulent apprendre au dictateur la democratie mais ne lui demandent aucun compte sur les disparitions d'opposants ou sa gestion des finances publiques. Et Loukachenko en joue,» poursuit encore la dissidente.

«A ses yeux, le dialogue ne vaut que pour les faibles. Loukachenko prend les dirigeants europeens pour des mollusques : ils lui donnent de l'argent sans avoir d'exigences. En construisant un gazoduc sous la Baltique et en decretant que les problemes energetiques de l'Ukraine et de la Bielorussie ne sont pas les siens, l'UE condamne ces pays a rester a la merci -ou au ban- de la Russie.”

Le pire sera le mieux

C'est quand elle regarde la situation économique que Karatch se prend à espèrer une resolution de la situation. En janvier, Moscou, pour la seconde fois en moins d'un an après la Géorgie, coupe le robinet énergétique de la Biélorussie. «Les gens en ont assez,» dit Karatch. «S'ils paient de plus en plus, sans rien recevoir en retour, ils vont un jour se revolter et demander 'ou est passe notre argent ?' Et Loukachenko ne sera pas en mesure de justifier la moindre de ses dépenses, encore moins de repondre a leur question.»

Mecontentement ou revolution ? Olga sourit mystérieusement. «En Bielorussie, personne n'a prepare la revolution, en dehors de Loukachenko. Dans la tradition sovietique de recherche d'un ennemi, coupable au nom de tous , il a constamment répété que c'est l'opposition qui cherchait la revolution. Au point que les Biélorusses ont fini par croire qu'il existait une opposition viable et qu'un soulèvement était possible. Or, le directeur du KGB a averti que ceux qui protesteraient seraient punis de 25 ans de prison ou bien condamnes a mort. De quoi calmer les ardeurs des Biélorusses.»

De son côté, Karatch ne redoute pas d'aller manifester haut et fort. «Le premier emprisonnement, c'est comme un premier amour, ca ne s'oublie pas. Ensuite, ca devient normal. Le plus important dans cette lutte reste de ne pas se laisser happer et de garder son humanite,» lâche t-elle résignée.

Translated from Olga Karatch, walcząca o człowieczeństwo