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Londres paralysée par la neige : un frenchie brise la glace

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Société

Parti pour un bref séjour a Londres, un frenchie babélien s’est retrouvé coincé dans un pays désormais paralysé par la glace. Comme beaucoup d’autres, plus les jours passent et plus Noël sent le sapin. Récit à froid.

« On a depensé 600 euros pour un vol qui n’existait pas et on dort depuis deux jours à l’aéroport ». Bien dans mes baskets sur le trajet de ma porte d’embarquement, je n’ai pas de suite pris la mesure de la détresse de cette adolescente française en colonie, transbahutant sa valise d’un pied fatigué, et sur le point de chialer. Je n’ai pas non plus été alerté par le rictus de l’agent d’escale lorsqu’il a poinçonné mon billet pour la France. Toujours pas impressionné par la file d’attente aux allures de boa constructor devant les portiques de sécurité. J’étais léger, serein, l’esprit imprégné de l’idée qu’une annulation de vol ou ce genre de trucs n’arrive qu’aux autres. Incapable de prédire que derrière la douane, c’est le Bronx qui me tendait les bras.

Terminal-Germinal

Poche Mc do, emballages et papiers-cul jonches sur le sol. Stupeurs et tremblements devant les écrans de contrôle. Fureur et énervement derrière les comptoirs d’information. La température ressentie doit approcher les 40 degrés. Même le voyageur modèle en classe affaire gît, la cravate en épingle, au milieu des passagers à bout de nerfs. Un responsable de compagnie aérienne est à deux doigts d’allumer une clope pendant que je regarde, médusé, le terminal transformé en véritable dépotoir humain. On ressent une tension telle que le moindre contact peut vous donner un coup de jus. Dans la brume électrique, je commence à comprendre que je suis moi aussi bel et bien coincé dans l’un des pires préludes de Noël que le Royaume-Uni ait jamais connu.

- 19, 6 degrés

Depuis le week-end du 18 décembre, la neige est tombée en sac a Londres. Le plus important aéroport d’Europe, Heathrow, a brusquement fermé ses portes deux jours durant... Laissant des milliers de passagers sur le carreau glacé du terminal. British Airways a même conseillé à ses passagers de ne pas se rendre aux départs des vols. Lundi 20 décembre, la file d’attente de l’Eurostar se poursuivait dans la rue sur deux kilomètres ! Bref, c’est le chaos. Et d’aucuns n’estiment pouvoir désengorger le flux de voyageurs en attente avant les fêtes de Noël. Alors, What else ?

En Angleterre, les températures nocturnes sont parfois descendues sous les -20°CFrozen Britain. C’est le titre qui accompagne chaque jour le développement des news des journalistes de la BBC. Bien trouvé lorsque l’on apprend que dans la nuit de dimanche à lundi, il faisait –19, 6 degrés a Chesham, près d’Oxford. Devant mon écran de télévision, je me sens quand même au chaud, chanceux d’avoir trouvé un toit pour le restant de mes fêtes sur une île désormais congelée. Parce que dans les couloirs des (aéro)gares, les journalistes ne comptent plus les personnes déshydratées, les hectolitres de larmes déversés par des enfants sans sapin ou les adultes devenus insomniaques. Quant à moi, dans mon confort relatif, je me prépare à manger une dinde aux oignons, à péter des crackers et à me gaver de la sélection de chocolats Harrod’s que j’avais prévu d’offrir à ma grand-mère.

Ice Tea

Parfois je repense a mon séjour ici, quand, la veille de m’évader de Big Smoke, je traînais mon insouciance dans la National Gallery devant laquelle un parterre de jeunes godelureaux chantaient des comptines de Noël. Ce, à l’abri du sapin enneigé de Trafalgar Square. Big Ben, Westminster Council, Buckingham Palace…tout ça blanchi… C’était beau. Gamin, jamais je ne me suis dit que la neige pourrait gâcher mon Noël. Loin s’en faut. Maintenant, dégrisé, j’observe les marmots de la rue faire des bonhommes de neige. Contraint de manger de la marmelade, du rosbeef et de boire du thé. Forcément glacé.

Photos : Une (cc)noise64/flickr : Big Smoke devient Big Cold : (cc)ollycoffey/flickr; reportage vidéo : BFMTV/youtube

Story by

Matthieu Amaré

Je viens du sud de la France. J'aime les traditions. Mon père a été traumatisé par Séville 82 contre les Allemands au foot. J'ai du mal avec les Anglais au rugby. J'adore le jambon-beurre. Je n'ai jamais fait Erasmus. Autant vous dire que c'était mal barré. Et pourtant, je suis rédacteur en chef du meilleur magazine sur l'Europe du monde.