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L’heure du fédéralisme a sonné

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Adriano Farano

L’Europe va mal. Les fanfares du Capitole, les sourires d’apparat et les grands discours lors de la signature de la Constitution le 29 octobre dernier à Rome n’y ont rien changé.

Si le recul de Barroso devant le Parlement européen au moment du vote d’investiture de son équipe peut être considéré comme une victoire pour le seul organe de l’Union démocratiquement élu, il est aussi important de regarder la réalité en face : ce rejet représente un énième coup d’arrêt pour un projet européen qui peine à avancer depuis douze ans. Toutes les grandes conquêtes européennes des dernières années comme l’euro et l’élargissement avaient été décidées en 1992 à Maastricht dans un trop éphémère élan de clairvoyance politique. Après tout, la fin de la Guerre froide imposait à l’Europe d’avoir une vision, un projet pour un continent dont une partie venait de se libérer du joug totalitaire. La communauté internationale dans son ensemble implorait les Européens d’achever le siècle des génocides par une acte positif.

Après ça, le déluge

En 1997, le Traité d’Amsterdam fut un coup d’épée dans l’eau ; celui de Nice, en 2000, rien de plus qu’un monstre institutionnel, accouché dans la douleur et aussitôt renié par ses propres créateurs… Et il y a maintenant l’expérience prometteuse du Traité constitutionnel, tout juste signé par les chefs d’Etat et de gouvernement. Un Traité qui n’a été approuvé qu’à la suite de négociations – à huis clos, bien entendu – de marchands de tapis entre les Etats membres. Négociations qui ont débouché sur un « plus que » petit dénominateur commun qui risque, en plus, de faire naufrage si un seul Etat – et ce pourrait bien être la France – venait à le rejeter.

Par ailleurs, le Président désigné de la Commission, le portugais José Barroso, a été choisi d’une manière laborieuse et opaque : un choix de compromis, a-t-on dit à l’époque. Son seul mérite : mettre tout le monde d’accord… Tout le monde sauf le Parlement européen qui l’a contraint à un remaniement de son collège de commissaires. Un collège qui lui aussi a été choisi par les chefs d’Etat et de gouvernement, et non pas par Barroso, comme cela aurait été le cas dans tout système démocratique classique.

Le fédéralisme : une chimère ?

L’Europe mérite plus. Les défis de la globalisation, du conflit au Moyen-Orient, d’une économie qui ne redécolle pas, plombée par les délocalisations vers l’Asie et une compétitivité en berne, réclament une Union européenne beaucoup plus agile, efficace et démocratique : en un mot, plus fédérale. C’est pourquoi café babel lance le débat : « Le fédéralisme européen est-il mort ? ». A première vue, mettre l’idée fédérale au centre du débat public peut sembler provocateur : à l’heure du pragmatisme, du retour de la realpolitik et de l’ « intérêt national », le fédéralisme ressemble toujours plus à un rêve, à une chimère.

Pourtant, il y a bientôt cinquante ans que le Traité de Rome a été signé, donnant le coup d’envoi du processus d’intégration économique européen… Cinquante années qui devaient aboutir, pas à pas, à l’intégration politique du Vieux Continent.

La promesse de Rome était celle d’une Europe unie, imprégnée de démocratie à tous les niveaux de gouvernement. Nous en sommes aujourd’hui très loin, malgré le fait que l’intégration économique ait pratiquement été finalisée avec le Marché unique, l’euro, la liberté de mouvement des citoyens et un droit des affaires qui s’impose désormais aux différentes législations nationales.

Qu’attend donc l’Europe pour devenir fédérale ? « Nous sommes sur le point d’approuver une nouvelle Constitution – répondra-t-on – le fédéralisme n’est pas à l’ordre du jour ». Une telle réaction est justifiée mais ne va pas à l’essentiel. Du moins si nous sommes convaincus du pouvoir de la société civile européenne. Une Europe fédérale implique d’abord un espace politique doté de médias, de partis, de syndicats et d’associations transnationales. C’est pour cela que café babelanime le débat en un même lieu, virtuel dans le cadre de ce dossier sur la Constitution et le fédéralisme, et physique à Bruxelles ce mercredi 10 novembre, entre des hommes politiques tel que l’ancien dissident polonais Bronislaw Geremek, des journalistes tel que Michel Theys, des artisans du fédéralisme tel que l’ancien bras droit d’Altiero Spinelli, Virgilio Dastoli, des chercheurs, et des décideurs économiques tels que Bruno Bonduelle. Dans quel but ? Mettre au centre du débat la question épineuse de la construction d’une démocratie transnationale en Europe. Sans tabous et sans parti pris. Parce que l’heure du fédéralisme a sonné. Rendez-vous le 10 novembre à Bruxelles.

Translated from E’ il momento del federalismo