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L’Europe en voit de toutes les couleurs

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La Parisienne

cohn bendit danielUne large victoire des conservateurs, une déroute du Parti Socialiste Européen (PSE), une percée des écologistes, une présence des extrêmes persistante, et une abstention record pour ce scrutin. Qu’il est bien difficile de tirer des enseignements après cette soirée pleine de rebondissements, du moins en France, où les sondages ont prouvé une nouvelle fois qu’ils ne faisaient pas les élections.

Daniel Cohn-Bendit, Europe Ecologie

Un trio en tempo binaire

martine aubry

Notre région, l’Ile de France, confirme les grandes tendances nationales avec un trio plutôt surprenant, l’UMP (quasiment 30% des suffrages) Europe Ecologie (20, 87%) et le PS d’Harlem Désir qui connaît une véritable désillusion en ne réunissant que 13, 57 % des votes. Comme le disait avec justesse, Jean-Luc Mélenchon, leader du Front de gauche, lors de sa déclaration finale sur une péniche Quai de la gare à Paris, aucun parti, victorieux ou non, ne peut se réjouir de ce scrutin qui a vu une progression inquiétante de l’abstention. A terme, c’est la légitimité du parlement européen qui est remise en cause, et par effet boule de neige, l’ensemble des institutions européennes, qui constituent plus que jamais un « Objet constitutionnel non identifié », comme Jacques Delors aimait à le décrire. L’Île de France a enregistrée elle-même une abstention record à hauteur de 58 % et fait figure de mauvaise élève parmi les huit autres circonscriptions françaises. Les heureux élus qui emportent ou conservent leurs sièges, au nombre de 13 pour la région, sont pour leur part les grands ténors de cette campagne.

Les 5 sièges de l’UMP lui offrent une confortable assise politique

Parmi les plus célèbres nous trouvons pour l’UMP (5 sièges) Michel Barnier, Rachida Dati, et le transfuge Jean-Marie Cavada. Pour la deuxième liste verte (4 sièges), Dany le rouge et sa comparse Eva Joly profiteront de la nouvelle dynamique verte au sein du parlement européen. Malgré une douche froide au niveau national, Harlem Désir et le PS (2 sièges) peuvent continuer leur combat européen au sein du Parti Socialiste Européen. Enfin le Front de gauche, qui remporte son pari, et Le MoDem, qui sauve les meubles, remportent tous les deux, un petit siège, et seront représentés avec leur tête de liste respective par Patrick le Hyarick et Marielle de Sarnez.

Envers et contre tous, l’Europe Ecologie crée la surprise

rachida dati

De manière générale, la carte de l’Ile de France est bleue comme la peur du PS et du Modem, mais la sensation écologique donne le feu vert à une nouvelle recomposition politique, puisque la liste Europe Ecologie talonne l’UMP dans de nombreux départements d’Ile de France. Paris brûle t-il en vert ? Le cas le plus significatif semble la ville de Paris, ou les deux formations sont en haut du tableau, mais où les verts dépassent les bleus dans 13 arrondissements sur vingt. Serait-ce là l’expression du fameux vote bobo urbain ? Dans tous les cas, Daniel Cohn-Bendit apparaît comme le nouveau géant vert de la politique française et européenne. Il est vrai que Paris n’est que peu touché par la crise, et les « bobos » n’ont peut-être pas autant déserté les urnes que les autres CSP (catégories socioprofessionnelles). Ceci peut éventuellement expliquer le score incroyable d’Europe Ecologie, qui atteint par exemple 36,30% des votes dans le 10e arrondissement. Vert de rage, les bleus s’imposent néanmoins facilement dans l’ancienne ceinture rouge, ainsi que dans tous les départements composant l’Île de France.

Les « Rainbow Warriors » de l’Île de France ne sont pas que des bleus

En effet, la Seine Saint-Denis n’échappe pas à la domination bleue, mais on note un bon score du Front de gauche, qui collecte plus 11% des votes. Cela dit, les élections européennes ne respectent pas la division traditionnelle est/ouest de l’Île de France, puisque hormis le « faible » score réalisé par l’UMP en Seine Saint-Denis (21,6%), ce même parti présente des scores élevés, bien qu’inférieurs à la moyenne nationale, dans les bastions traditionnels de la gauche en Île de France. Derrière les deux listes principales, les différents drapeaux se livrent une lutte haute en couleurs, entre royalistes, trotskistes, communistes, nationalistes et souverainistes. Autant de « istes » qui auraient pu unir leurs couleurs pour constituer des listes plus claires, pour ne pas faire pâle figure le soir des résultats. Indéniablement, la rose ne s’est pas encore épanouie, et l’Orange à le goût acide de l’indépendance. Comprendre le véritable arc-en-ciel de la gauche française, voici semble-t-il le principal enseignement de ces élections au niveau de la France et de son île. Entre rose, rouge, et vert, la gauche fait grise mine, et doit plus que jamais reprendre quelques couleurs pour prétendre à un nouveau leadership en France et en Europe.

Crédit photos : Nicolas Patte/FlickR, Parti Socialiste/FlickR, Ammar Abd Rabbo/FlickR

Henri Lacour