LES VERTS DE GRANDE-BRETAGNE s'ENGAGENT POUR L'UE
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Anaïs DE VITAAu sortir des élections européennes, les partis xénophobes accaparent les gros titres. Pourtant les Verts proposent une alternative raisonnable, réelle et radicale aux politiques européennes sur le déclin. Rencontre avec Rupert Read, philosophe à l'Université de East Anglia et candidat du Green Party.
cafébabel : Dans d'autres pays européens, tels que la France et l'Allemagne, les partis écologistes sont très importants. Ils sont beaucoup plus présents qu'au Royaume-Uni. Les Verts sont le quatrième groupe le plus représenté au Parlement européen. Pensez-vous qu'une prise de conscience de cette présence écolo en Europe amènera les Britanniques à considérer le Green Party comme une vraie force politique ?
Rupert Read : C'est une bonne question et j'y réponds oui. J'ai vu pendant cette campagne que lorsque les électeurs commencent à comprendre que les Verts sont plus imposants au Parlement européen que les Tories (parti conservateur), ils se rendent compte qu'ils jouent un rôle très important dans l'Union Européenne et ses élections. C'est d'autant plus clair si on considère le système de représentation proportionnelle des élections europénnes que nous n'avons pas chez nous. C'est pour cela que les sondages nous annoncent devant les Lib Dems, parce que nous aurons plus de sièges.
CB : Que pensez-vous des meneurs Ska Keller et José Bové ?
RR : Ils ont apportés quelque chose à la campagne. C'est difficile à dire parce que nous n'avons toujours pas de vrai audience européenne. Nous en créons un progressivement. Mais il est important de ne pas dériver vers le fédéralisme. En Grande-Bretagne, les Verts sont attachés au programme sur la localisation, la décentralisation et le principe de subsidiarité.
CB : Dans une interview, Natalie Bennett déclare que les autres partis de Grande-Bretagne essaient d'évincer UKIP des européennes. Quelle influence ce parti a-t-il sur le débat de l'immigration jusque maintenant ?
RR: Ce parti a une très mauvaise influence. Je débattais l'autre jour avec le spécialiste de la communication de Nigel Farage, Patrick O'Flynn. On lui doit les déclarations de Farage sur le fait que les gens ont le droit d'être inquiets quand des Roumains viennent habiter près de chez eux. On va très loin dans notre pays. Imaginez que Farage dise que les gens ont le droit d'être inquiets si des Irlandais emménagent à côté de chez eux, ou des personnes d'origine africaine, ou juive. UKIP est un parti xénophobe. Ils frisent souvent le racisme. Nous devons donc nous confronter directement à eux.
CB: Nous avons lu quelque uns de vos articles sur le fétichisme de la croissance et l'idée de décroissance. Pourriez-vous définir ce terme ?
RR: C'est très simple, il s'agit d'une économie où on ne parle plus de croissance. La décroissance c'est quand les gens remettront en cause la poursuite de la croissance, son utilité, sa nécessité. Ce dont nous avons besoin en réalité, c'est d'une meilleure qualité de vie, de sécurité, de besoins vitaux comblés et d'une société plus juste.
CB: Pensez-vous que mesurer la croissance par le PIB permet aux gouvernements d'ignorer les inégalités et la redistribution des richesses ?
RR: Oui, c'est exactement cela. Et je pense que c'est précisément une très mauvaise idée pour tout parti qui se considère de gauche de poursuivre un programme qui continue à prôner la croissance. C'est aussi le grand défaut du socialisme et de la social-démocratie depuis ces dernières décennies. Nous devrions nous concentrer sur d'autres indices que celui du PIB pour savoir ce dont la société a réellement besoin.
CB: Dans l'un de vos articles, vous faisiez la distinction entre le niveau de vie et la qualité de vie. Pouvez-vous l'expliquer et nous dire pourquoi elle est importante ?
RR: Le niveau de vie se mesure en valeurs matérielles : combien de voitures avez-vous, à combien êtes-vous imposable. La qualité de vie, c'est en réalité un indicateur de bonheur, de santé mentale et physique. Actuellement, nos sociétés se basent sur le niveau de vie. Mais nous suggérons de trouver un moyen de calculer la qualité de vie. Ce qui importe en ce moment, ce n'est pas de savoir la richesse matérielle de chacun, mais de savoir si l'on est en bonne santé, en sécurité, heureux, apaisé dans notre vie. Ces éléments devraient être les objectifs de ceux qui nous gouvernent.
CB: Selon vous, le néolibéralisme est-il une idéologie enracinée dans l'économie mondiale et perpétuée par des institutions telles que le FMI, la Banque Mondiale et la Banque Centrale Européenne ? Il y a-t-il une alternative à cette hégémonie ?
RR: Oui, bien qu'elle soit difficile à établir. Elle passera probablement par un grand boulversement de l'économie. L'hégémonie du néolibéralisme est très vastement ancrée. Elle est installée dans l'Union Européenne. Elle puise sa source dans le Traité de Lisbonne. Notre parti est prêt à se montrer radical et nous sommes prêts à bousculer les institutions fondatrices et l'Union Européenne elle-même. Nous devons défier la croissance et le culte de la croissance. Ce dont les gens ont besoin, ce n'est pas davantage de biens ou d'une économie de ruissellement. L'alternative au néolibéralisme se trouve dans l'écologisme. Il faut combattre le néolibéralisme ouverterment et il faut pouvoir le nommer et le combattre.
CB: Quelles sont les priorités du Green Party ?
RR: Nous avons beaucoup parlé de la révolution par l'énergie verte, par le transport écologique. Nous avons pris au sérieux les énergies renouvelables, la réduction des déchets énergétiques. Nous avons encouragé un vaste programme d'isolation des habitats engagé par les régions et l'Etat, qui s'auto-financerait car on gaspillera moins d'énergie. Nous avons plébiscité une révolution des transports en remettant les trains, les bus, les pistes cyclables aux mains du secteur public et ce malgré les projets internationaux suivis par Westminster et Bruxelles dans les domaines routiers, ferroviaires et aériens. Nous souhaitons avoir un impact au niveau local et de réduire l'empreinte écologique.
CB: Pourquoi les Verts sont-ils opposés à la Zone de Libre Échange Transatlantique ?
RR: Parce que le ZLET est une manière d'égratigner la démocratie et de la remplacer par des régulations internes. Elle tire les normes internationales vers le bas et menace une démocratie pour laquelle nous nous battons depuis tant d'années. C'est ce que les Verts veulent combattre.
CB: Pensez-vous que les partis traditionnels ont déjà assimilé la rhétorique et les idées de UKIP, plutôt que de s'y opposer ?
RR: Oui, UKIP déplace les programmes politiques vers la droite. C'est un parti d'extrême-droite, xénophobe et populiste. Le Front National se sent proche d'eux.
CB: Quel est votre écrivain ou philosophe européen favori ?
RR: Wittgenstein est mon principal maître à penser.
Translated from Green Party: We Need To Fight NeoLiberalism