« Les subventions effacent les mots qui fâchent »
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Trois questions à Dominique Prusak, journaliste français qui travaille en Pologne.
Quelles sont les relations économiques entre la France et la Pologne ?
La France est le premier investisseur étranger en Pologne : elle détient le monopole de la grande distribution et s’impose dans la construction ou dans l’énergie. Toutes les grandes marques comme Auchan, Carrefour, Leclerc sont notamment implantées en Pologne. Cette présence a des conséquences positives dans la mesure où elle développe l’activité économique du pays et permet d’augmenter le niveau de vie et le PIB. Si la Pologne a tout à gagner dans l’UE, elle représente en contrepartie un marché porteur : les Polonais sont actuellement pris dans une frénésie de consommation. Pour autant, la phrase prononcée par Jacques Chirac à propos du soutien des dix nouveaux Etats membres européens à la guerre en Irak en 2004 [« Ils ont perdu une occasion de se taire ! »] a laissé des traces. Dans le monde diplomatique et des affaires notamment. Toutefois, l’effet positif de l’Union européenne et l’arrivée des subventions contribue à effacer les mots qui fâchent.
Quelle est l’image de la France en Pologne ?
Très bonne. Cette francophilie est à la fois liée à des stéréotypes et à la réalité. Quand je parle de stéréotypes, je pense à Paris, considérée comme ‘la plus belle ville du monde’ ou au romantisme supposé de Saint-Germain-des-Prés. La réalité, c’est la richesse culturelle de l’Hexagone exportée à travers son cinéma, son théâtre ou sa nouvelle scène musicale, plutôt métissée. Les Polonais connaissent bien les films de Luc Besson ou ‘Amélie Poulain’, par exemple, qui offrent une image pleine d’humour de la France. Autre vecteur de cette influence française : les expositions de peintres français, sur l’impressionnisme par exemple, marchent très bien en Pologne.
Les relations avec l’UE peuvent-elles se refroidir en raison des positions souvent unilatérales prises par le gouvernement conservateur mené par les Kaczyski ?
Le gouvernement polonais peut parfois déstabiliser ses partenaires européens par son attitude ambiguë : si ses dirigeants sont contents de recevoir des subventions communautaire, ils ont tendance à faire cavalier seul dans les décisions prises à 25. Et refusent de jouer le jeu de la solidarité européenne. Cette ambivalence est peut-être due au fait que la Pologne, qui a souvent été envahie, témoigne généralement d'une grande méfiance envers ses voisins. Je crois qu’il s’agit plus une réaction épidermique que d’une opposition préméditée. Dans une société, tout s’explique par les comportements. Quand l’Histoire a rendu la Pologne suspicieuse, il est difficile de garder l’esprit systématiquement ouvert sur les autres Européens.