LES PROCHAINES ÉTAPES VERS UNE FÉDÉRATION EUROPÉENNE
Published on
JOINT DECLARATION OF THE UNION OF EUROPEAN FEDERALISTS & THE YOUNG EUROPEAN FEDERALISTS Il y a soixante ans, la déclaration de Robert Schuman a changé le cours de l’histoire européenne. Son mérite fut d’être claire et concise. Elle était tout à la fois audacieuse, visionnaire et réaliste.
«L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble: elle se fera par des réalisations concrètes créant d’abord une solidarité de fait.»
La proposition de mettre en commun la production de charbon et d’acier de la France et de l’Allemagne rendait ces deux États dépendants l’un de l’autre pour leur bien-être mutuel. Leur destinée était liée.
«La mise en commun des productions de charbon et d’acier assurera immédiatement l’établissement de bases communes de développement économique, première étape de la Fédération européenne ….»
D’autres pays suivirent leur exemple. Dès le départ, la nouvelle communauté du charbon et de l’acier était «ouverte à tous les pays qui voudront y participer».
«Ainsi sera réalisée simplement et rapidement la fusion d’intérêts indispensable à l’établissement d’une communauté économique qui introduit le ferment d’une communauté plus large et plus profonde entre des pays longtemps opposés par des divisions sanglantes. Par la mise en commun de productions de base et l’institution d’une Haute Autorité nouvelle, dont les décisions lieront la France, l’Allemagne et les pays qui y adhéreront, cette proposition réalisera les premières assises concrètes d’une Fédération européenne indispensable à la préservation de la paix.»
Au bout de soixante ans, après de nombreux succès et quelques échecs, le but de Robert Schuman et de Jean Monnet, consistant à créer une fédération européenne, est plus proche. Dans une large mesure, la souveraineté est mise en commun dans l’Union européenne, dont l’architecture constitutionnelle possède de nombreuses caractéristiques fédérales. Récemment, l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne a élargi les compétences de l’Union et renforcé le pouvoir de ses institutions. Pourtant, la construction d’une Europe fédérale est encore en cours. Il reste beaucoup à faire.
Le marché unique doit encore être achevé, notamment dans le secteur des services, de la propriété intellectuelle, de la recherche scientifique et de l’énergie. Le système financier doit être rendu plus transparent, souple et progressif, dotant l’UE d’une monnaie qui doit remplir ses objectifs politiques et répondre aux exigences de ses citoyens. L’UE doit être davantage en mesure de lever des recettes, d’emprunter et de prêter afin de stimuler les investissements dans les biens publics européens, comme l’éducation, les technologies vertes et les infrastructures.
La politique budgétaire européenne devrait encourager la reprise économique de l’Europe. Dans le contexte de la prochaine révision à mi-parcours du budget et de la conception du nouveau cadre financier pluriannuel à partir de 2013, les dépenses devraient être transférées du niveau national au fédéral, où des économies d’échelle et des gains d’efficacité peuvent être réalisés, ou afin de corriger les dysfonctionnements du marché. C’est particulièrement le cas dans le secteur militaire, où l’Agence européenne de défense montre la voie. Inversement, les ministères nationaux des finances devraient jouer un rôle plus important là où les dépenses de l’UE ne sont plus appropriées.
Les négociations en cours visant à renforcer le cadre réglementaire du secteur financier devraient s’orienter vers la création d’une autorité européenne unique de surveillance des services financiers transnationaux.
Un retour à la discipline budgétaire et le remaniement du Pacte de stabilité et de croissance ne suffisent pas. Un gouvernement économique est désormais requis d’urgence, surtout au sein de la zone euro; il doit être doté d’un pouvoir exécutif suffisant pour être en mesure d’obliger les gouvernements nationaux à adopter des politiques économiques se renforçant mutuellement, dans le cadre d’une stratégie commune générale visant le double objectif de la stabilité et de la compétitivité.
Nous exhortons le groupe de travail créé sous l’autorité du président Van Rompuy à s’inspirer de la déclaration Schuman en ce qui concerne le courage et la clarté des objectifs visés. Les membres du Conseil européen doivent assumer leur responsabilité individuelle et pouvoir être tenus responsables de leurs décisions collectives.
Le Service européen pour l’action extérieure doit être créé le plus rapidement possible, avec toutes les ressources nécessaires pour remédier à l’éparpillement et au manque de coordination actuels des activités extérieures de l’Union. La Commission et le Conseil devraient mettre leurs jalousies institutionnelles de côté et suivre la logique du traité de Lisbonne afin de créer un service diplomatique commun, capable de faire de l’Union un acteur incontournable sur la scène internationale.
Les États ayant les capacités militaires et la volonté politique devraient créer une structure de défense intégrée sur une base permanente, comme le prévoit le traité de Lisbonne.
Le Parlement européen doit continuer d’améliorer ses performances. Les partis politiques européens devraient se redynamiser en faisant campagne pour faire de la citoyenneté européenne une réalité et défendre le développement d’un espace commun de liberté, de sécurité et de justice. Nous soutenons vivement la proposition de créer une circonscription transnationale pour un certain nombre de députés européens à temps pour les élections de 2014.
Nous, présidents des deux organisations fédéralistes existant de longue date en Europe, appelons les institutions de l’Union européenne et les parlements nationaux, à ranimer la motivation sous-jacente à la déclaration de Robert Schuman et à confirmer la mission de paix, de solidarité et d’élargissement de l’Union. Ce sont les prochaines étapes vers la création d’une fédération européenne.