L’ère du « consensus de Londres »
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Pour une fois, je vais faire dans l’optimisme réjoui et dans la « positive attitude » béate. Oui, je suis plutôt content des résultats du dernier G20. Et surtout du renforcement du FMI. Transformer l’ancien fer de lance du libéralisme échevelé des « Chicago Boys » en une autorité de contrôle des déséquilibres macro-économiques, ce n’est pas simplement symbolique, c’est un changement de paradigme.
Souvenez-vous (ou pas) du début des années 80, et de la crise de la dette mexicaine. A l’époque, les grands dirigeants du monde s’étaient également réunis, et avaient également trouvé dans les grands organisation internationales que sont le FMI et la Banque Mondiale la solution à tous les maux. L’idée était très simple : il fallait pousser les Etats à se réformer en profondeur. Mais une fois qu’on a dit « réformer en profondeur », on n’a pas dit grand-chose. Or, à l’époque, le monde était dominé par les adeptes de Saint Milton (Friedman), c'est-à-dire par les courants économiques les plus ultra-libéraux (néoclassiques dans le jargon). Résultat, au début des années 1980, le mot « réformer » à fini par signifier allègement des budgets, diminution des services publics et privatisations. A l’époque, on a appelé cela le « consensus de Washington ».
Aujourd’hui, ce consensus a du plomb dans l’aile. Parce que les pays auxquels on a imposé des réformes structurelles ne vont pas forcément mieux. Parce que une grande partie des économistes critiquent sa logique. Enfin, parce que les pays industrialisés n’ont jamais appliqué les préceptes qu’ils vantaient au sein des enceintes internationales.
Aujourd’hui, on demande donc au FMI de faire de la « régulation macro-économique », et donc d’agir comme un embryon de gouvernement économique mondial. Moi je trouve ça très bien. Je me demande juste pourquoi on ne transpose pas cela à la zone euro. Finalement, quand on y réfléchi bien, le fonctionnement de la zone euro c’est un peu un « consensus de Washington light »… Une seule véritable institution, la Banque centrale. Aucun gouvernement économique, mais seulement des critères applicables à tous. Et enfin, dans le cadre de la fameuse « MOC », la Méthode Ouverte de Coordination, une incitation à mettre en œuvre des réformes structurelles permettant d’alléger les budgets.
Alors oui, on va dire que ça y’est, j’ai tourné la carte, je me mets à traiter l’Europe d’entité ultra-libérale, je fais comme les communistes etc. Evidemment non, le traité de Maastricht n’est pas la simple transposition des idées économiques néoclassiques à l’Europe. C’est juste une version adoucie, allégée, de compromis en somme. Sauf que le compromis s’est fait dès le départ sur une absence de gouvernement commun…
Or, aujourd’hui, on voit plus que jamais que nous avons besoin de souplesse et de réactivité dans la gestion économique de la zone euro. Nous avons besoin d’une autorité capable de prendre en compte non seulement les évolutions des marchés, mais également les courants sociaux et les préférences des populations. Nous avons besoin d’un organe qui fasse la synthèse entre l’équilibre nécessaire des finances des Etats et le bien-être des entreprises et des consommateurs.
Mais en fait, j’ai confiance. Parce que finalement, si on regarde la chronologie, le consensus de Washington a eu lieu avant l’Acte Unique et le traité de Maastricht. Les négociations institutionnelles européennes se sont finalement intégrées dans un contexte idéologique mondial. Espérons qu’il en sera de même pour l’ère du, quoi au fait… le « consensus de Londres » ?