Le Venezuela, une démocratie extravagante
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céline panteixHugo Chávez, 52 ans, candidat à sa propre succession, part favori pour les élections présidentielles du 3 décembre au Venezuela.
« Cet homme est mon frère et pourvu qu’il soit mon compagnon de lutte », déclarait l’été dernier le président iranien, Mahmoud Ahmadineyad, à propos de son homologue vénézuelien, Hugo Chávez. Après l’échec du coup d’Etat de 1992 et sa victoire aux premières élections libres de 1999, le dirigeant du parti de gauche «Movimiento V Republica» [Mouvement pour une Vème république], Chávez a doté son pays d’une nouvelle Constitution, désormais désigné comme la ‘République bolivarienne du Venezuela’. Son style politique est plutôt flamboyant. Ses amis? Ils ont des trajectoires démocratiques douteuses comme le président biélorusse Alexander Lukashenko ou le ‘Leader Maximo’, Fidel Castro.
Le 3 décembre prochain, Chavez affrontera le candidat de l’opposition, le social-démocrate Manuel Rosales, 53 ans, qui a déclaré qu’en «cas de victoire, tout le monde saura qui était Hugo Chávez ».
15 ans au pouvoir en cas de victoire
Le Parlement vénézuelien est composé de partis proches de la « révolution bolivarienne » comme l’a défini Hugo Chávez, en référence au libérateur de l’Amérique latine, Simón Bolivar. Lors des précédentes élections, l’opposition s’est retirée en essayant de délégitimer le Président vénézuélien. José Joaquín Urías, avocat au tribunal constitutionnel espagnol et conseiller du gouvernement chaviste en 2001, juge que «l’actuel président ne souhaite pas que l’opposition se retire. Notamment pour des raisons d’image internationale. Il désire obtenir le plus grand soutien possible de la part du Parlement ».
En cas de victoire aux élections, Hugo Chávez sera resté 15 ans au pouvoir. Il a d’ailleurs déclaré vouloir se présenter pour un autre mandat. Rester au pouvoir? « Si tel est le cas, lui seul le sait », explique José Joaquín Urías. « Hugo Chávez a précisé que son projet nécessitait beaucoup de temps. Il ne sera pas le seul à gouverner aussi longtemps ». Felipe González et François Mitterrand en France sont restés au pouvoir pendant 14 années et Helmut Kohl durant 16 ans outre-Rhin. « Son régime est très personnalisé et sa figure difficilement substituable ».
Du populisme au progressisme ?
La Constitution vénézuélienne prévoit pour autant la possibilité d’organiser un référendum abrogatoire à mi-mandat. Un outil démocratique déstabilisant invoqué, en vain, par l’opposition en 2004. « Depuis», poursuit José Joaquín Urías, « Hugo Chávez est de moins en moins populiste et de plus en plus progressiste. »
« Son plan d’infrastructures est gigantesque », affirme Sergio Pascual, un ingénieur espagnol de 29 ans présent durant la campagne électorale. « Il a déjà inauguré un pont sur le Orinoco, deux rames de métro à Caracas et un métro à Maracaibo. Les centres de santé sont aussi bien équipés que les dispensaires espagnols. Cependant », nuance-t-il, « il existe beaucoup d’opportunisme et une corruption ambiante ».
A cet égard, les télévisions privées et les grands quotidiens du pays –comme El Universal et El Nacional-, tous détenus par l’opposition, rechignent à retransmettre l’action du gouvernement. Pour compenser, Chávez apparaît chaque semaine sur la chaîne publique, où durant des heures il justifie ses initiatives, dans des discours enflammés et anti-impérialistes.
« Il utilise un langage familier afin que les gens les plus modestes s’identifient à lui », souligne Carlos Armas, 25 ans, étudiant à Caracas. « Alors que c’est le plus populiste de tous ». Pour lui, « ce gouvernement est tout sauf démocratique. Un député chaviste, Luis Tascón, a dressé une liste des personnes ayant signé pour l’organisation d’un référendum abrogatoire contre Hugo Chávez en 2004. Depuis, ces personnes sont interdites dans les entreprises publiques». Armas soutient qu’« en cas de victoire de Hugo Chávez, ils quitteront le pays ».
« Ce qui peut sembler étrange pour un Européen », commente Raúl Bocanegra, «c’est la rhétorique militaire de Chávez ». Celui-ci évoque souvent « un Venezuela en marche », un «complot contre les élections » ou un « front contre la pauvreté ». Dans un pays où 51% de la population vit de l’économie souterraine et où 90% des emprunts se font à court terme en raison du peu de confiance accordée à l’économie, Hugo Chávez n’hésite pas à faire appel aux modèles de son passé militaire pour rassurer ses compatriotes. Au risque de polariser la société.
Une action très européenne
Mais Chávez ne se contente pas de discourir. Pour transformer le pays, il a exproprié des propriétaires terriens et dépossédé certains industriels, mettant les structures entre les mains de paysans et de travailleurs pour qu’ils les exploitent à leur tour. Son leitmotiv: « la propriété privée doit être subordonnée à l’intérêt public ». Ni plus, ni moins que ce qui est inscrit dans certaines constitution européenne: art. 42 du traité constitutionnel italien.
Le chef de l’Etat vénézuélien multiplie les références à Simón Bolivar, leader des guerres d’indépendance en Amérique latine, qui à son époque a tenté d’unifier l’Amérique latine en un seul pays. Le Venezuela a adhéré au Mercosur en 2006. Il s’est ensuite allié à Cuba et à la Bolivie dans le cadre de l’ALBA (Alternative bolivarienne pour les Amériques), une zone de coopération qui a permis au Venezuela –en échange de l’envoi de 92 000 barils de pétrole par jour à Cuba- de faire venir 30 000 spécialistes cubains de la santé, de l’éducation et du sport. Il ne lui reste plus qu’à réclamer des élections libres à Cuba.
Translated from Elecciones en la extravagante democracia de Venezuela