Le Pen : les jeunes voient la vie en bleu Marine
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Marine Le Pen, candidate préférée de 26% des 18-24 ans ? Un chiffre qui fait à coup sûr des jaloux parmi les candidats à deux semaines du premier tour des élections présidentielles et des inquiets chez ceux qui se demandent à quelle sauce ils seront mangés en mai prochain.
Le sondage dévoilé par Le Monde d’aujourd’hui semble nous prendre de court et pourtant, en janvier 2002 déjà, une étude Ipsos montrait que Jean-Marie Le Pen arrivait lui aussi en tête chez les plus jeunes des électeurs français au premier tour. Marine répètera-t-elle l’exploit de papa ? Il est en tout cas grand temps d’en finir avec les réactions outrées, d’abord parce que le phénomène n’est pas nouveau et ensuite parce qu’il faut surtout comprendre de quelle jeunesse on parle ici.
Moins diplômée que celle qui donnera sa voix aux gros candidats – Hollande séduit tout de même 25% des jeunes, loin devant Sarkozy et ses 17% - la jeunesse qui pourrait voter Le Pen est aussi moins urbaine et plus touchée par la crise, le chômage et la précarité. Il s’agit aussi de jeunes venus de tous les horizons, dont les parents ne votent pas forcément FN, et qui sont surtout sensibles aux thèmes-phares du parti : laïcité, identité nationale et immigration, perçue comme une menace pour la sécurité et l’emploi.
Taxer ces jeunes de racisme est un peu facile
Cafebabel.com avait rencontré le mois dernier Julien Rochedy, président des « Jeunes avec Marine ». Il présentait volontiers les jeunes électeurs de Marine Le Pen comme des « révolutionnaires », des citoyens en rupture avec « leurs parents et leurs grands-parents, Sarkozy, la mondialisation, l’Union européenne et le multiculturalisme ». Rien que ça. Le site officiel des jeunes lepénistes (même s’il faut distinguer les militants purs et durs des jeunes tentés par un vote FN) a ce côté nostalgique et antisystème qui semble séduire les 18-24 ans chez Marine Le Pen : un jeune et fringant marin en arrière-plan, des références appuyées à une France patriote et résistante – le passé de résistant de Le Pen père ayant beaucoup fait pour la construction et la légitimité de son personnage politique.
Avant les jeunes se moquaient d’un De Gaulle vieillissant en lançant des pavés dans la mare, aujourd’hui, ils se rebellent en prônant le retour en arrière : le franc, la sortie de l’UE, le protectionnisme et le rétablissement des frontières. Taxer ces jeunes de racisme est cela dit un peu facile. Selon les sociologues, le vote Le Pen est avant tout contestataire et identitaire. Une sorte de réflexe face à la perte de sens et de grands partis qui se soucient finalement peu de leur jeunesse, du moins en apparence. Alors, Mélenchon, Le Pen, même combat ? Le candidat du Front de gauche tire lui aussi son épingle du jeu puisque, fin 2011, il n’était crédité que de 5% d’intentions de vote chez les 18-24 ans contre 16% aujourd’hui. L’effet Bastille ? L’effet nouveauté surtout. Marine Le Pen et Mélenchon se présentent comme le renouveau de la classe politique française, même si l’une représente un vieux parti dont les cadres ont les cheveux grisonnants et si l’autre est un ex-éléphant du PS. Mais il est vrai qu’on peut faire du neuf avec du vieux et que Hollande comme Sarkozy ne prennent même plus la peine d’essayer.
Photos : Une (cc) blogcpolitic/flickr; Texte (cc) themanolo/flickr