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Le luxorock sort de sa bulle

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Sergio Marx

Berlin

C'est au Magnet-Club que s'est déroulée le week-end dernier une soirée rock aux accents insolites. La Luxemburger Rocknacht, sponsorisée par le magazine unclesally's, a vu se produire trois groupes du Grand-duché dont Eternal Tango, diffusé régulièrement sur MTV Deutschland et habitué des grandes scènes, et Inborn!

à peine formé et en passe d'enregistrer en Californie avec Ross Robinson (Korn, Limp Bizkit, Slipknot, The Cure). Et dire qu'il y a cinq ans, il aurait été impossible de présenter une quelconque line-up luxembourgeoise au public berlinois, tout simplement parce que la scène locale était dominée par le mauvais punk, les cover bands et le death-metal pour initié. Pas de quoi pavaner à l'étranger. Mais depuis, de nouveaux groupes ont émergé.

Cette explosion est une conjonction de plusieurs facteurs : plus de salles de concert (les Rotondes, d:qliq), plus de médias (station.lu) et de réseaux sociaux (fansnextdoor.com) prenant fait et cause pour les musiciens locaux, et probablement l'effet boule de neige d'Eternal Tango, premier groupe à avoir réellement dépasser les frontières du pays.

Mais un des événements centraux, c'est également la prise de conscience des autorités que les finances saines du pays peuvent être mises au profit de la culture musicale locale. Bien que de nombreux observateurs se plaignirent de l'année de la capitale de la culture 2007, organisée apparemment avec les pieds mais sans artistes, une amélioration s' est faite sentir pour contrer le retard abyssal en matière d'offre musicale : la première salle de la capitale à avoir proposé régulièrement une programmation dite rock-indie, l'Atelier, fête à peine ses 15 ans.

C'est en effet suite à une décision parlementaire de 2003 que fut construite la plus grande salle de concert luxembourgeoise, la Rockhal. Financé par les deniers publics, pour un budget total de 30 millions d'euros, le bâtiment appartient toujours à l'Etat et est géré par une association sans but lucratif. L'Etat et la municipalité de la capitale soutiennent également certaines salles plus modestes. Et qui se cachait derrière la Luxemburger Rocknacht ? Le Ministère de la culture et l'attachée culturelle à l'ambassade entre autres.

Comme quoi les liasses de billets du lucratif modèle économique luxembourgeois peuvent être investies à bon escient. Pourquoi ne pas imaginer le Luxembourg comme un pôle culturel régional voire européen à moyen terme sécurisant financièrement les activités de ses acteurs culturels grâce à de généreuses subventions ? Ce soft power pourrait faire changer l'image du pays à l'étranger. Car qu'est ce qu'associe l'européen lambda au Luxembourg ? Au mieux : rien, au pire : les magouilles fiscales, Clearstream et autres réjouissances. (Quoique les frères Schleck sont depuis quelques temps des ambassadeurs de premiers choix.)

En tout cas, les vieux de la vieille qui se souvienne de l'époque des pionniers, où assister à un concert potable au Luxembourg était une odyssée, ne peuvent que fantasmer sur l'avenir. Mais il ne faut pas crier victoire trop tôt : Berlin, dont les difficultés budgétaires sont proverbiales, consacre 2,2 pour cent de son budget à la culture en 2010, alors que le Luxembourg n'en débourse qu'un petit pour cent. Il y a encore du pain sur la planche.

Photo : Filip Markiewicz au pavillon luxembourgeois de l'Expo 2010 à Shangai, soft power in action.  (c) station.lu

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