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Le cas Gürtel : l'Europe « gate » et ne lâche pas l'affaire

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Alice DC

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Les tribunaux espagnols ne savent plus où donner de la tête avec l'affaire Gürtel, une histoire de corruption qui fait son entrée au parquet après trois ans d'enquête. Mais pourquoi une affaire qui s'est déroulée en Espagne porte-t-elle un nom allemand ? Cours d'étymologie sur cafebabel.com.

Il existe trois manières de nommer une affaire : l'anglaise, traditionnelle et diplomatique ; la française, la polonaise et l'allemande, barbante ; et l'espagnole, qui prouve que même la corruption peut être drôle.

Les Anglais, du genre « pourquoi changer ce qui fonctionne », ont hérité du suffixe –gate, né avec le « Watergate », qui sert à la fois à nommer les enquêtes et les scandales médiatiques : « boobgate » (quand Justin Timberlake a dévoilé le sein de Janet Jackson), « Camillagate » (découverte de l'idylle entre le Prince Charles et Camilla) ou « cablegate » (révélation de télégrammes de la diplomatie américaine par Wikileaks). Cependant, ils partagent parfois avec les Allemands, les Polonais et les Français la fastidieuse mais efficace méthode de l'« affair » : « Profumo affair », du nom du secrétaire d'État britannique à la guerre impliqué dans ce scandale sexuel. Et c'est tout ? Oui, car ils suivent l'exemple français des formules mathématiques : affaire du/de + nom de la personne ou de l'institution impliquée. Ça a ainsi donné l'affaire ELF, l'affaire Grégory et l'affaire VA-OM (née après après un match de football entre l’Olympique de Marseille et Valenciennes), pour lesquelles ils ont été tout particulièrement inspirés. Les Allemands également s'y connaissent bien en affaires, qu'ils appellent « affäre ». Ainsi, « Spiegel-Affäre » (scandale politico-médiatique survenu au sein du magazine Der Spiegel), « Guillaume-Affäre » (affaire impliquant l'espion Günter Guillaume) ou encore « Amigo-Affäre » (pour laquelle ils ont fait preuve d'exotisme linguistique). En polonais, ça devient « afera », comme dans « afera Riwina », dont l'un des personnages clés est le producteur de cinéma, Lew Rywin.

Mais la palme d'or de l'ingéniosité est attribuée à l'Espagne, où les policiers sont de vrais poètes. L'un d'eux, expert en allemand (car il y en a qui parlent allemand), a traduit le nom de famille du principal accusé, Correa, en un objet, donnant ainsi « Gürtel » (« ceinture »). Parmi les perles, on trouve également « Operación Sudoku » (impliquant des Chinois qui copiaient des DVD), « Operación Gorila » (à cause de la corpulence et de la force de l'un des accusés), qui n'a pas de rapport avec le « code Gorille », affaire de corruption en Slovaquie, et « Operación Pitufo » (Schtroumpf), réseau de voleurs de trésors archéologiques dont le meneur se caractérisait par sa petite taille. Comme quoi tant de corruption n'aiguise pas seulement l'odorat des enquêteurs, mais aussi leur ingéniosité. Tout n'est question (ou devrais-je dire affaire ?) que d'imagination.

Photos: Une, (cc) caliorg/flickr

Translated from “Gürtelgate”: El caso policial ¿nace o se hace?