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La PAC sème la zizanie

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Si les Perspectives financières 2007/2013 focalisent l’attention, on ne peut passer à côté de la Politique Agricole Commune qui engouffre presque la moitié du budget communautaire et qui exacerbe les désaccords entre Etats membres.

Après les rejets consécutifs français et néerlandais par la voie référendaire sur le Traité constitutionnel en mai, un accord sur le budget européen pour la période 2007-2013 « permettrait de démontrer que l'Europe reste sur les rails. » C'est en ces termes que le président en exercice de l'Union européenne, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, s'est exprimé, en amont du Conseil européen des 16 et 17 juin prochains. Néanmoins, un accord sur le budget, s'il n'apparaît pas impossible, s'annonce plutôt difficile à atteindre, surtout pour ce qui concerne le domaine du financement de la Politique Agricole Commune (PAC). Notamment, les « non » à la Constitution, la perspective d'élections législatives anticipées en Allemagne qui limite les marges de manœuvre de Gerhard Schröder et l'attitude très ferme du Royaume-Uni pour la défense de sa ristourne budgétaire accordée depuis 1984, risquent fort de crisper à différents niveaux les négociations. Et ce d'autant que tant les dépenses que les recettes font l'objet de controverses entre les 25.

Crispations sur les dépenses

Le maintien probable à 45% de la part des dépenses consacrées à la PAC dans le budget communautaire continue d'alimenter une controverse qui dure maintenant depuis plusieurs décennies. Celle-ci s’est notamment renforcée avec les deux derniers élargissements : l'arrivée de petits pays riches ayant une tradition interventionniste et protectionniste forte dans ce secteur (Autriche, Finlande et Suède) et l'adhésion des dix nouveaux membres, dont beaucoup sont de gros producteurs agricoles, ont conforté le clan des pays appelant au maintien ou au renforcement du budget consacré à la PAC.

La question est d'autant plus tendue que nombreux sont ceux, faiblement bénéficiaires ou largement contributeurs, qui pointent du doigt le fait que la Politique Agricole Commune peine à atteindre certains de ses objectifs. Ils se demandent si les succès constatés ont été obtenus à un niveau de coûts raisonnable. C'est ainsi notamment que des études, telles que celles National Consumer Council britannique, ont fait grand bruit, estimant que la PAC coûtait, en 1996, l'équivalent de 30 euros par famille par semaine.

Mais les nouvelles orientations de cette politique expliquent pourquoi de nombreux Etats membres veulent continuer à lui attribuer une part élevée du budget : la nouvelle PAC entrée en vigueur le 1er janvier 2005, a désormais pour objectif, entre autres, de modifier considérablement les pratiques des exploitants en matière d'environnement. Moyen de sanctionner financièrement les méthodes de l'agriculture intensive, les aides accordées par la Commission européenne sont en effet conditionnées par le respect de la réglementation sur la pollution des sols et de l'eau. Et une telle transition d'un système fondé sur la production vers un système favorisant la protection et le développement de d'une économie rurale durable nécessite des fonds importants pour lui permettre de produire à terme les résultats escomptés.

Tensions sur la ristourne britannique

En qui concerne les recettes, la bataille se concentre en particulier sur le rabais britannique, accordé à Margaret Thatcher en 1984 en raison de la situation peu favorable dans laquelle se trouvait alors le Royaume-Uni et du faible bénéfice que le pays tirait de la PAC. En particulier, Jack Straw, le ministre britannique des Affaires étrangères, menace d'opposer son veto à une éventuelle suppression de cet avantage, qui demeure selon lui justifié. La plupart des Etats membres et la Commission considèrent, au contraire, que ce rabais britannique doit être définitivement démantelé, le pays étant devenu l'une des économies les plus prospères de l'Union élargie. Toutefois, il apparaît que les Britanniques ne seraient pas défavorables à un « aménagement » de cet avantage. La proposition de Jean-Claude Juncker de geler le rabais à son niveau sur la période précédent l'élargissement de 2004, puis de le réduire de manière progressive sur la période 2007-2013 serait en passe de permettre aux différents Etats de se satisfaire d'un tel compromis sur ce point.