La course à l'emploi : des diplomés aux NEET
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Grégory Molle1 jeune sur 5 en UE - soit environ 5,5 millions de citoyens - ne trouve pas de travail. Ceux qui tiennent des postes pour lesquels ils sont trop qualifiés sont encore plus nombreux. Le chômage des jeunes fait régulièrement les gros titres en Europe - mais quelles histoires se cachent derrière les statistiques ? Voici le deuxième article d'un reportage au long cours écrit entre Bucarest et Londres.
En Grande-Bretagne, les jeunes entrants sur le marché du travail ne se sentent pas particulièrement chanceux. Comparé au salaire minimum roumain de 157,50 €, en 2015, l'équivalent britannique est de 1524,98 €, mais malgré les salaires plus élevés, la compétition pour obtenir un poste est intense, spécialement à Londres.
« Comme se cogner la tête contre un mur »
Tianyan Xu, 24 ans, est née en Chine de parents chinois. L'année dernière, elle a obtenu un poste au sein d'un programme compétitif pour jeunes diplômés avec British Telecom (BT). Elle dit aussi que sa génération, celle qui a obtenu son diplôme dans les cinq dernières années, au moment où a frappé la crise financière, se sent paralysée par la compétition. Beaucoup de ses amis, explique-t-elle, abandonnent après quelques essais infructueux, face au difficile processus de candidature.
« Cette course de haies est particulièrement pénible - elle n'est pas juste basée sur vos talents et vos capacités, elle est basée sur la perception que l'on a de vous. Quoique vous ayez, vous n'avez qu'une chance de le montrer », dit-elle.
Son amie Adeola Adeyemo, 24 ans, a un master et plusieurs internats derrière elle. Adeola a hâte de travailler dans l'édition. Mais, dit-elle, « mon rêve semble apparamment impossible... Cela me contrarie, mais je ne sais pas ce que je peux y faire. C'est comme se cogner la tête contre un mur de briques. Sur le papier, j'ai assez d'expérience. J'imagine qu'il y a une surabondance de gens qualifiés, et pas assez de postes. » Elle prend son mal en patience en travaillant dans la vente et ajoute : « J'aimerais être sûre de retourner dans l'édition, mais, d'où je suis, je ne sais pas si je pourrais ».
Tianyan et Adeola, bien sûr, sont parmi les plus chanceuses, car dans toute l'Europe, plus de 20% des jeunes sont sans emploi, deux fois plus que tous les âges confondus et trois fois plus que les plus de 25 ans. 7,5 millions des 15-24 ans sont sans emploi, sans diplôme ou sans formation (aussi appelés NEET, pour not in employment, education or training, ndlr), tandis qu'environ 2 millions de postes à travers l'Europe restent vacants. L'UE a promis 6 milliards d'euros pour soutenir les régions les plus marquées par le chômage - la somme peut sembler énorme, jusqu'à ce qu'on évalue la contrepartie : on évalue à 153 milliards d'euros le coût annuel des NEETs, réparti en allocations et en manque à gagner (revenus et taxes).
Chercher de l'aide - mais où ?
Comment pouvons-nous changer cela ? En aidant les jeunes à acquérir les bonnes compétences, pense Cristian Ionescu du BPI Group Romania, une firme mettant en oeuvre un projet pilote financé par l'UE visant à amener 2500 jeunes NEETs dans le marché du travail :
Cristian Ionescu du BPI Group Romania : aider les jeunes à acquérir les bonnes compétences.
« Il y a une inadéquation entre le système éducatif et ce dont les employeurs ont réellement besoin, dit-il. Il II y a aussi une inadéquation entre les attentes : les employeurs se plaignent que les jeunes demandeurs d'emplois manquent de compétences pratiques - mais, explique-t-il, « les attentes des jeunes en ce qui concerne les salaires ne sont pas réalistes ».
En proposant des apprentissages, des formations professionnelles ou des compétences entrepreneuriales, dans des secteurs où la demande locale est forte (comme des électriciens dans les régions industrielles, ou des serveurs dans les zones touristiques), le projet vise à combler certains de ces écarts. Toutefois, même Cristian se demande s'il est réaliste de tenter de satisfaire la Garantie pour la Jeunesse de l'UE, une initiative qui essaie de donner à chaque jeune européen de moins de 25 ans une offre concrète et de qualité moins de quatre mois après la perte du dernier emploi. « Je ne crois pas que cela soit faisable dans des pays comme la Roumanie, la Grèce, le Portugal ou l'Espagne... La Roumanie a l'un des plus longs délais entre le moment du diplôme et celui du premier emploi. »
Pour ceux qui se trouvent encore dans le système scolaire, les écoles et les universités en Roumanie ne semblent pas offrir une grande aide pour trouver du travail. Alexandru Nistor, un étudiant en cybernétique de 21 ans à l'Académie des études économiques de Bucarest, a trouvé un internat en tant que développeur web à la Deutsche Telekom Romania de sa propre initiative. Il reconnaît que son université ne fait pas assez pour aider les étudiants à acquérir l'expérience pratique dont ils ont besoin.
« Il y a une formation obligatoire pendant le cursus universitaire, mais seulement avec certaines compagnies qui n'ont pas grand-chose à voir avec le profil de l'université où l'on étudie. Par exemple, j'étudie l'informatique, j'aurais dû être formé par une compagnie en ingénierie informatique, mais l'université a [seulement] des partenariats avec des banques et des compagnies orientées sur l'économie. »
Mais il n'y a pas qu'en Roumanie où l'éducation et la formation semblent peu adaptées aux jeunes qui cherchent un emploi. Londres, aussi, connaît ce problème.
Restez à l'affût pour la prochaine partie de ce reportage au long cours sur les discussions d'Anna Patton et Lorelei Mihala, avec de jeunes européens en quête d'un travail à Londres.
Translated from The race for jobs: from graduates and interns to NEETs