La Commission européenne et son « nouveau récit » pour l'Europe
Published on
A l'approche des élections européennes, il faut bien essayer de réconcilier les Européens avec les insitutions. Dernière idée de la Commission européenne : remettre à jour le récit de l'histoire du continent. Déjà le roman de l'année ?
C'est un véritable objet conceptuel non identifié que la Commission a mis en chantier, en avril dernier. Nommé « nouveau récit pour l'Europe » (« New narrative for Europe »), ce projet constitue une tentative supplémentaire de combler le fossé entre les citoyens et l'Union européenne. « L'Union européenne a créé un récit sur la guerre et la paix, explique Morten Lokegaard, le député européen à l'origine du projet. Mais, pour beaucoup de gens de moins de 40 ans, cela reste très abstrait. Il faut donc rechercher des valeurs communes et une identité commune. »
Le nouveau récit prendra la forme d'un manifeste, rédigé par un « comité culturel », composé de Morten Lokegaard et de 19 personnalités du monde de la culture. Depuis le mois de juillet, ceux-ci dialoguent avec des intellectuels, des artistes et des scientifiques, lors de colloques organisés en Pologne, en Italie et en Allemagne. Ils établiront ensuite le manifeste, qu'ils remettront au président Barroso au printemps 2014. Selon Morten Lokkegaard, l'une des premières trouvailles de ces colloques est l'importance des différentes histoires nationales : « C'est une spécificité de l'Europe, que d'avoir différents récits. Notre identité commune pourrait se construire autour de la diversité de ces récits. »
« Pour que ça marche, il faut être un minimum critique ! »
Pour les spécialistes, l'initiative est intéressante, mais son succès n'est pas assurée. « Si c'est pour faire une 150ème brochure qui dit que tout va bien, il n'y a pas d'intérêt, explique Marianne Dony, présidente de l'Institut d'Etudes Européennes de Bruxelles. Pour que ça marche bien, il faut être un minimum critique ! »
« Il faut faire attention à ne pas faire une réécriture trop artificielle de l'histoire européenne, qui ne ferait que renforcer l'idée que l'Union européenne est loin des citoyens, renchérit Michael Malherbe, spécialiste de la communication européenne. Il regrette aussi que les citoyens ne soient pas davantage impliqués. « Le travail final sera sûrement d'une grande qualité académique, mais il ne dira pas ce que les Européens pensent de l'histoire de leur continent. »
La Commission dit pourtant vouloir ouvrir le débat : « Dès le départ, le but était d'en parler avec les gens », explique l'un de ses porte-paroles. Chacun peut en effet participer, en envoyant sa contribution au débat. Le manifeste final devrait aussi être soumis au débat pubic. « Il ne s'agit en aucun cas d'une étude savante pour les spécialistes ! », conclut le porte-parole.