La Commission Barroso s'asseoit sur ses cadeaux
Published on
Sur le site de la Commission Européenne, les citoyens – vous, moi – peuvent consulter le CV des 27 commissaires, mais aussi le boulot de leur conjoint. S’il y a une vertu dont peuvent se targuer les représentants européens, contrairement à nombre de leurs homologues nationaux, c’est bien la transparence. Dans les sous-sols de la Commission européenne, on trouve même une salle dédiée à tous les cadeaux d’une valeur supérieure à 150 euros que les 27 commissaires ont dû refuser. Oubliez les cadeaux sous la table pour faire plier un commissaire, celui-ci sera inévitablement indexé dans cette « caverne d’Ali Baba », entre un buste de Gandhi et un tableau du sculpteur belge Panamarenko. Ezequiel Scagnetti, photographe argentin basé à Bruxelles, s’est immiscé dans la salle aux présents intouchables. Alors que les commissaires européens préparent leur rentrée, conseil d'ami : Pour charmer ou faire plier un commissaire en votre faveur, choisissez des cadeaux moins chers...Et moins kitsch !
Nous sommes dans l’antre interdite de la Commission européenne. Il ne s’agit pas d’un secret mais d’une disposition légale : les commissaires sont dans l'obligation de refuser les cadeaux dont la valeur dépasse les 150 euros. Et si jamais il y a un doute sur la valeur de la marchandise, on envoie illico dans la « caverne d’Ali Baba ». Laquelle s'avère être une véritable mine d’or et de renseignements.
Photo : Ezequiel Scagnetti
Entre novembre 2004 et octobre 2009, 268 présents envoyés aux commissaires européens ont été indexés ici. Enfin, aux 27 commissaires… 116 d’entre-eux étaient adressés au président de la Commission José Manuel Durão Barroso. Boutons de manchette, montres de marque, stylo hors de prix, tableaux ou sculpture en bronze, le tout, évidemment, avec une bonne dose d’amour désintéressé.
Photo : Ezequiel Scagnetti
Commissaire à la concurrence lors de la première commission Barroso, Neelie Kroes avait elle aussi été gâtée. 34 des 268 objets dont la valeur dépasse les 150 euros lui revenaient. Pas pour rien que le magazine Forbes l’ait placé au 38ème rang des femmes les plus puissantes du monde en 2006. Ici, une magnifique statue de la part du président russe Dmitri Medvedev.
Photo : Ezequiel Scagnetti
Certains objets sont légués à des ONG, comme Femmes d’Europe, dont la présidente d'honneur n'est autre que Margarida Barroso. Ils sont revendus sur un marché à Bruxelles, et les bénéfices servent à financer des programmes de lutte contre la pauvreté.
Photo : Ezequiel Scagnetti
Mais parfois, les objets sont invendables. Kitsch, mauvais goût, tout y passe. Les commissaires ont-ils vraiment mérité ça ?! Non non, ce n’est pas la fille de Barroso qui l’a fait…
Photo : Ezequiel Scagnetti
Et un magnifique siège avec pieds et accoudoirs en forme de lion. Idéal pour siroter une bière belge et penser aux travers du régime colonial belge de Léopold II au Congo.
Photo : Ezequiel Scagnetti
Malheureusement, la liste des cadeaux publiée sur le site de la Commission ne va pas très loin dans la description des donateurs : gouvernement national, gouvernement local, personne privée, diplomates/mission à Bruxelles, industrie et commerce (firmes), chef d’Etat, organisation internationale, université… Impossible donc de savoir qui a eu l’idée de cette lampe de chevet si recherchée.
Photo : Ezequiel Scagnetti
On ne saura pas non plus qui a osé le buste de Gandhi. Dommage. « Beaucoup des cadeaux viennent de gouvernements locaux et régionaux qui pourraient se sentir offensés s’ils savaient qu’ils ont fini ici », explique au quotidien espagnol La Voz de Galicia le directeur du protocole chargé de l’inventaire des objets.
Photo : Ezequiel Scagnetti
Toujours rapporté par La Voz de Galicia, le directeur du protocole chargé du recueil et de l'inventaire des cadeaux refuse que les photographes n'immortalisent les cartons empilés dans un coin... Ceux-là vont directement à la poubelle.
Photo : Ezequiel Scagnetti