Juncker: «Nous ne serons jamais les États-Unis d'Europe»
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Elodie RedQuel regard le Président de la commission européenne, Jean-Claude Juncker, porte-t-il sur l'Europe ? Lors d'un débat organisé récemment à l'Institut Delors, il a évoqué sa conception du gouvernement : des politiques moins nombreuses mais mieux définies. Parce que selon lui, « les problèmes européens ne sont pas tous ceux de l'Union européenne ».
Les cinq premiers mois de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission européenne ont été tout sauf barbants. Pris au coeur du tourbillon médiatique de l'affaire Luxleaks, il a également appelé à la création d'une armée européenne alors que beaucoup contestent l'aspect démocratique de sa nomination à la tête de la commission européenne.
L'Insitut Delors a tenté de réunir Juncker et l'un de ses prédécesseurs, Jacques Delors, mais malheureusement la santé fragile de ce dernier, qui fêtera ses 90 ans le 20 juillet, l'a empêché d'assister à la réunion publique. Devant un public relativement restreint, Juncker a évoqué ses idées sur la « présidence de la commission européenne et le fonctionnement des institutions européennes », après un peu plus de 100 jours en fonction.
L'héritage de Delors
« Delors est une source d'inspiration pour moi », a expliqué l'actuel président. « Il a accompli beaucoup de choses qui n'ont été reconnues qu'une fois son mandat terminé. C'est le destin de tous les grands esprits. J'ai personnellement rencontré Delors quand j'avais 30 ou 31 ans. J'étais alors ministre du Travail, et je me rappelle avoir été impressionné par sa sagesse et sa capacité à rassembler plusieurs points de vue. Sans lui, nous n'aurions ni le marché commun européen ni l'euro. »
Pour Jean-Claude Juncker, Delors est non seulement un illustre prédécesseur mais aussi un véritable mentor. « Delors m'a appris que pour réussir en Europe il faut un principe directeur, un calendrier et de solides institutions », a ajouté le président de la Commission.
« L'année dernière, pendant la campagne électorale, j'ai rencontré de nombreux citoyens et journalistes qui m'ont aidé à réaliser que l'Europe gère trop de choses à la fois. Il faut apprendre à respecter le principe de subsidiarité. Les problèmes européens ne sont pas tous ceux de l'Union européenne, et ce qui n'est pas un problème pour l'Union européenne ne doit, par conséquent, pas venir troubler la Commission. »
Une Commission surchargée ?
Dans un discours improvisé sur la manière dont l'Europe devrait être gouvernée, Juncker n'a pas manqué de critiquer la Commission qu'il dirige, mais il a également adressé ses critiques aux États membres et à leur manque de volonté politique.
« Nous avons 28 commissaires, c'est beaucoup trop, a admis le président. Par conséquent l'administration et ces mêmes membres viennent s'ajouter au superflu et le tout est exagéré. Il faut bien préciser que la Commission ne gère que les gros dossiers, c'est pour quoi mon programme se concentre sur 10 priorités : les grands thèmes qui devraient permettre de contrôler l'avenir proche et futur de l'Union européenne. »
Début mars, Juncker et son équipe ont retiré 80 directives des 450 actuellement dans les tiroirs, ce qui leur a valu de nombreuses critiques. Parmi les propositions de loi qui ont fini à la poubelle se trouvaient celles sur « l'économie circulaire », la qualité de l'air et le congé maternité.
Mais la polémique ne s'arrête pas là. Comme beaucoup d'hommes politiques l'ont relevé ces dernières années, à cause de l'expansion continue de l'Union européenne les directives de la Commission sont de plus en plus vagues.
Les projets de loi les plus détaillés, et qui sont sensés inclure les grands thèmes énoncés dans les directives, sont laissés aux mains de bureaucrates et d'« experts » invités par les États membres. Le Parlement européen n'a presque aucun contrôle sur ces gens-là. En réduisant le nombre de directives, on donne paradoxalement encore plus de pouvoir à la Commission. Est-ce que c'est ça la démocratie ?
L'avenir de l'UE ?
Des priorités réduites mais mieux définies, telle est la philosophie du président Juncker. Ce qui se traduit par un plan d'investissement de 315 milliards d'euros, un marché unique numérique, plus d'énergie ainsi qu'une union économique et monétaire. « Nous devons définir c'est que le but final de l'union monétaire », a affirmé le président, « ceux qui nous observent depuis l'étranger ne comprennent pas où nous allons. Nous devons aussi et surtout nous accorder sur ce que notre union monétaire signifie pour les partenaires internationaux. »
Mais c'est la courte déclaration de Juncker qui a fait bondir Peter Oomsels, le vice-président des Jeunes européens fédéralistes (JEF) :
« L'Europe ne se construit pas en dépit des nations. Nous ne serons jamais les États-unis d'Europe. Je suis contre un concept de ce genre qui tiendrait les Européens à l'écart de l'Union européenne. Les citoyens ne veulent pas que l'Union soit un amalgame au coeur duquel les différences culturelles, artistiques et politiques se perdraient. Il n'y a aucun exemple à suivre ou à donner. Il est nécessaire de bâtir l'Europe ensemble, avec les nations. C'est pourquoi nous avons besoin au sein de la Commission de gens qui sont au fait des réalités nationales. »
Translated from Juncker: «Io, contrario agli Stati Uniti d'Europa»