Harmonica Creams : la crème du blues celtique au Japon
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Entre bodhran et cornemuse, un groupe japonais a décidé de s’attaquer corps et âme à la musique irlandaise. Après 4 albums qui squattent les charts nippons, Harmonica Creams est même devenu une référence en la matière dans le pays du soleil levant. Explications avec le leader du groupe à Paris.
Tout droit venu du Japon, Harmonica Creams s'inspire des traditions anciennes de la musique celtique. Depuis le début du mois, les trois artistes font le tour des scènes françaises et espagnoles. Dandy à l’œil pétillant, chapeau melon vissé sur la tête, Yoshito Kiyono est l'harmoniciste et le leader du groupe. Dans un mélange d'anglais et de français, il se souvient de ses premiers pas : « Étudiant, je jouais pas mal de blues, de soul et de rock. J'adorais aussi explorer toutes sortes de musiques venues d'ailleurs comme le flamenco, la musique arabe ou mongolienne. Mais ce qui me faisait vraiment vibrer, c'était la musique irlandaise. J'étais fasciné. En écoutant cette musique, que j'avais découverte sur une compilation dénichée à la médiathèque, je ressentais une sorte de nostalgie et de tendresse que je ne trouvais pas dans la musique japonaise », se remémore Yoshito. Les références qui marqueront son parcours deviennent alors The Chieftains, Martin Fay, Bothy Band, Flook, Sharon Shannon ou encore Kila.
École du cirque, jam sessions et tournée européenne
En 2001, Yoshito Kiyono rencontre Koji Nagao à l'Université à Tokyo. Ensemble, ils commencent à défricher le terrain, Yoshito à l'harmonica et Koji à la guitare. Puis arrive l'année 2005. Koji passe six mois en Irlande pour s'imprégner du style gaélique tandis que Yoshito part faire l'école du cirque à Paris, pour y apprendre la jonglerie et le mime. « L'idée était de trouver mon propre jeu de scène », explique Yoshito. Pour autant, les deux compères ne se perdent pas de vue. En 2008, ils se retrouvent au Japon pour leur première tournée. C'est à cette occasion que Koji présentera Aiko Obuchi, violoniste professionnelle de musique celtique, à Yoshito. En 7 ans, le trio est formé.
Dès lors, ils ne cessent d'explorer de nouveaux horizons. Toujours basé à Paris, Yoshito participe tous les soirs à des jam sessions. Le reste du temps, après ses cours à l'école du cirque, il compose à l'harmonica ou à la guitare, envoie ses mélodies à ses acolytes et, chaque année, ils se retrouvent au Japon pour peaufiner le tout. Ensemble, ils écument les scènes japonaises, reprenant des titres de blues, funk, jazz, musique celtique, le tout avec leur âme nippone qui les distingue dès la première écoute. « Au Japon, les gens ne connaissent pas vraiment la musique celtique même si, depuis 30 ans, on en entend beaucoup à la télé, dans les films ou les jeux vidéos. En tout cas, ils adorent danser dessus en concert ! », explique Yoshito. Leur premier album paraît en 2011, et leur ouvre déjà de nouvelles portes. En 2012, ils participent au festival d'Ortigueira en Espagne, un incontournable des fans de musique celtique, qui attire plus de 100 000 spectateurs à chacune de ses éditions. Harmonica Creams y remporte le premier prix. L'année suivante, pour leur troisième album, ils s'offrent une tournée européenne.
« Une expérience d'alchimiste »
Leur quatrième opus, Futura Ancient Alchemy, est enregistré en Espagne avec la collaboration de Brian Finnegan (flûtiste de Flook), Calum Steward (cornemuse) et Eamon Rooney (quatre fois vainqueur de concours de bodhran en Irlande). Harmonica Creams y voit là un véritable terrain d'expérience. « En nous imprégnant de leurs sensibilités celtiques profondes et en y juxtaposant notre approche personnelle, nous avons cherché à faire surgir un style nouveau. Comme dans une expérience d'alchimiste, ce qui a émergé de toute cette matière est un alliage inédit », résume Yoshito. Il en résultera un album ainsi que la reconnaissance ultime de leurs idoles. « Des musiciens japonais qui ont complètement assimilé la musique celtique et qui la jouent à un niveau exceptionnel. C'est incroyable... », s'enthousiasme Brian Finnegan, du groupe Flook.
Pour autant, le groupe ne s'inspire pas que du passé. Pour leur dernier disque Harmonica Creams a aussi puisé dans l'electro et le rock. « À vrai dire, je ne considère pas notre musique comme appartenant à un genre précis, ce n'est ni du blues ni de la musique celtique. Et puis on transforme toujours nos morceaux sur scène », détaille Yoshito. Le succès est au rendez-vous : à sa sortie, l'album squatte le sommet des classements de ventes d'albums de world music au Japon et sur la plateforme EthnoCloud. Un succès en voie d'exportation.
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