Handicap, jeunes, réfugiés : les combats de Brando Benifei
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Ce n’est pas sa barbe qui nous trompera, le député européen Brando Benifei est bien un « jeune ». Il est d’ailleurs l’un de ces jeunes loups qui débarquent sans prévenir et risquent de rester dans le paysage politique pendant de longues années. Mais ne le résumons pas trop vite à son âge (31 ans), car l’Italien est un bourreau de travail, présent sur tous les fronts. Portrait.
Courant entre deux rendez-vous, Brando accepte de s’assoir avec nous pour une petite demi-heure, dans son bureau bruxellois. Car le jeune député est infatigable. Une course effrénée que le socialiste italien mène depuis presque cinq ans, défendant ce que la plupart de ses homologues n’ont ni la force ni le courage de porter : les oubliés des politiques, à l’instar des jeunes, des personnes handicapées ou des plus démunis.
Dynamique, Brando l’est sans aucun doute. Cela ne se voit rien qu’à l’état de son bureau. C’est à peine si l’on trouve un endroit libre de liasses et de dossiers. Un chaos, nous assure assistante, parfaitement limpide pour le député : « ce n’est que comme ça qu’il s’y retrouve ».
Pressé, il ne perd pas une minute. Jamais il ne quittera des yeux le point que nous lui indiquons sur la caméra. L’Italien s’emporte, fait de grands gestes, on se croirait sur une scène de meeting.
Interview : Louis Gustin, Images et réalisation : Anaëlle Girard
Le jeune prodige de la politique italienne
Rien d’étonnant à l’élection de Brando Benifei il y a cinq ans. Et s’il admet qu’une part de son élection est due à « la chance », il omet une carrière politique qui a démarré lorsqu’il était encore au lycée. « J'étais mobilisé contre la politique de Berlusconi en matière d'éducation. Je suis alors devenu un membre actif des Jeunes démocrates - à ce moment-là, ils se faisaient encore appeler Leftist Youth, la Jeunesse Gauchiste-, puis je suis rentré au conseil national. Quand le Parti Démocratique a été créé, j'étais l'un des jeunes membres actifs de ma province. Cependant, ce n'est qu'en 2009 que ma carrière politique a fait un bond en avant, lorsque j'ai été élu à la tête des affaires européennes pour les jeunes démocrates au niveau national et vice-président d'ECOSY, les Jeunes Socialistes Européens pour quatre ans », nous confiait-il il y a quatre ans, alors qu’il venait d’être élu.
Fédéraliste européen convaincu et vice-président du mouvement de jeunesse paneuropéen pendant quatre ans, un siège de député européen semblait être la suite logique de son parcours.
Député européen de cœur
Depuis son élection, Brando Benifei n’a pas fait de figuration. Il s’intéresse à de nombreux sujets et de nombreux dossiers lui sont confiés. Au sein de la commission des affaires économiques et sociales dont le député est membre, il travaille tout particulièrement sur le chômage des jeunes. La situation migratoire et les questions méditerranéennes le touchent également, lui dont le pays est sur la première ligne. Il devient ainsi le rapporteur en 2016 un texte sur l’insertion des migrants sur le marché du travail : « Investir pour les jeunes réfugiés est le meilleur choix que nous puissions faire pour la société », affirme-t-il.
La réglementation sur le numérique est une autre de ses priorités. Mais une fois de plus, ce n’est pas l’aspect économique qui l’intéresse. « Au-delà de l’importance du numérique pour le marché unique, c’est une question de citoyenneté et de protection des citoyens », estime-t-il.
Pour notre interview, nous choisissons, parmi tous ses chevaux de batails, de nous concentrer sur celui du handicap. Un thème de politique peu commun pour un jeune député. « Tout le monde est en faveur des droits des personnes handicapées, mais personne ne les met dans ses priorités », déplore-t-il. La Charte des droits fondamentaux de l’Union indique pourtant qu’elle « reconnait et respecte » le droit des personnes handicapées à leur « autonomie, leur intégration sociale et professionnelle ». La visibilité des personnes handicapées au sein de l’Union européenne est cruciale, et cela, Brando Benifei en a bien conscience. D’autant plus que le député s’occupe localement de l’inclusion des personnes handicapées depuis le début de sa carrière politique. Naturellement, arrivé au Parlement européen, il choisit de s’installer dans les rangs de l’intergroupe Handicap.
A propos de la directive sur l’accessibilité votée cette année au Parlement européen, Brando admet : « Ce n’est pas assez, et ça ne le sera jamais. Pour être honnête des parties du texte sont un peu faibles.» Il en profite pour dénoncer l’hypocrisie qui peut exister chez certains députés et estime que « lorsqu’il s’agit de défendre les personnes lors de meetings, de conférences, alors tout le monde est pour. Mais lorsqu’il s’agit de voter concrètement, c’est une autre histoire. Ils choisiront toujours les intérêts financiers des uns contre le droit des autres». A notre question sur la perspective d’un prochain mandat, Brando n’hésite pas une seconde : « Bien sûr que je me représenterai. Le Parlement européen doit agir pour l’Europe sans attendre qu’Emmanuel Macron ou Angela Merkel le fasse. Nous sommes les représentants des citoyens, c’est quelque chose de fort. C’est pour cela que j’aimerais poursuivre le travail entamé ici, crucial pour l’Union européenne. » Ce n’est donc pas la dernière fois que nous entendons la voix de Brando Benifei.