François Hollande bouge encore
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[OPINION] Impossible, impensable, inimaginable, inconcevable, extravagant et déraisonnable. Voilà ce qu’on disait, hier encore, de l’éventuelle reconduction du président de la République à la tête de l’État. Cette ineptie jadis, prend aujourd’hui une crédibilité insolite et insolente. Car oui, François Hollande bouge encore.
Le président de la République, au plus bas dans les sondages depuis son élection de 2012, moqué des médias, défié par ses adversaires et certains de ses ministres, n’entame pas la fin de son quinquennat et le début de la période électorale 2017 de la meilleure des manières. C'est le moins que l'on puisse dire.
Seulement, depuis la primaire des Républicains, la surprise François Fillon et l'adoption par les sympathisants de la droite et du centre de son programme conservateur, il semblerait que François Hollande jouisse de nouvelles cartes à rebattre pour la campagne présidentielle de 2017.
De manière irrationnelle et cynique, il faut bien reconnaitre que tous les sondages des dernières grandes élections se sont prodigieusement fourvoyés : Brexit, Trump, Primaires écologistes, Fillon, etc. À ce titre, un président de la République avec une côte de confiance qui oscille entre 10 et 13% est un excellent candidat à la victoire.
D'une manière plus objective et rationnelle, il apparaît désormais que le candidat de la droite et du centre, François Fillon, risque de remporter d’avantage de voix sur sa droite qu’au centre. En effet, avec son programme conservateur sur les valeurs morales, identitaires et sociales et ultra-libéral sur les questions économiques et financières, François Fillon va certainement capter une partie de l’électorat de Marine Le Pen. En revanche, le centre-droit et les indécis/déçus du « hollandisme » qui se retrouvaient dans les valeurs d'Alain Juppé - candidat malheureux du second tour de la primaire - vont sans doute se tourner vers le jeune Emmanuel Macron et François Bayrou, le président du Mouvement Démocrate, qui n'a toutefois pas encore annoncé officiellement sa candidature à la présidentielle.
Hollande, seul contre tous
En quoi cela re-crédite François Hollande ? La réponse est loin d’être évidente, mais elle mérite réflexion. Si l'on se penche sur l'offre électorale en France, on obtient : d’un côté une droite dure et radicale, de l’autre une extrême droite populiste et anxiogène, empêtrée dans son héritage contestataire et au centre, un jeune candidat « anti-système » mais sans parti et comptable du bilan du quinquennat. Enfin, à l’extrême gauche, un « insoumis » contesté dans son camp par le parti communiste, Jean-Luc Mélenchon. Les écologistes sont en reconstruction et leur candidat, Yannick Jadot, assume de ne pas être un aspirant à l’Elysée. En somme, aucun candidat ne se détache pour l’instant, ce qui donne au président un double bénéfice : celui du temps politique et de l’effet de son annonce de candidature puisqu’il est le seul non déclaré et donc pas encore en campagne.
Aussi, s’il est une règle en matière de sondage, c’est que toute étude stable depuis plusieurs années est une illusion. Nous l’avons constaté avec Alain Juppé, donné gagnant depuis de nombreux mois, mais encore avec Hillary Clinton, tous deux défaits dans les urnes. Ainsi, fort est à parier que le Front national, qui caracole en tête de tous les sondages depuis 2013 avec un score insolent de 24 à 28% des intentions de vote dès le premier tour, risque de chuter violemment. Peut-être suffisamment pour ne pas être au deuxième tour de la présidentielle. Il y a là un électorat indécis, qui peut aussi bien se reporter à droite qu’à gauche en fonction des promesses et propositions qu’il attend.
Cette situation singulière renforce la position du président sortant, qui pourrait se voir re-légitimé par la primaire de la gauche s’il venait à la gagner. Il s’agit là, très probablement, de l’exercice le plus compliqué pour lui : reconquérir le cœur de la gauche, s’adresser aux siens, les convaincre et leur donner espoir. Tel est son destin, reste à savoir si aux candidats déclarés à la primaire, s’ajoutent Manuel Valls et Emmanuel Macron, seuls prétendants aptes à lui faire échec.