François And The Atlas Mountain : l’invitation au voyage
Published on
François Marry écrit des chansons en marchant. Logique donc que leader du groupe français, Frànçois and the Atlas Mountain évoque souvent la promenade dans les six albums que comporte son étonnante discographie. Nous avons fait un bout de chemin avec lui, en imaginant les méandres de ses créations. De sa région natale aux (possibles) vertiges du succès.
cafébabel : Tu quittes Saintes et la Charente-Maritime dont tu es originaire. Que laisses-tu derrière toi ?
François Marry : Je laisse le goût du calme. Beaucoup de calme. Pour moi, c’est une région qui évoque la respiration. Je respire là-bas, ce qui drôle parce que c’est la région où j’étouffais quand j'étais ado. J’avais envie d’ailleurs. J’avais besoin de culture, de création artistique et ça manquait de tout ça. Maintenant qui ma vie est complètement bercée par la création artistique, j’ai besoin d’ouverture, d’horizon. Et la Charente-Maritime, c’est assez plat. J’aime beaucoup aller sur l’île d’Oléron, surfer et regarder l’horizon. Maintenant, j’habite à Bruxelles et ma région me manque beaucoup.
cafébabel : Tu commences ton ascension, le long de la côte atlantique. De l’eau à perte de vue, qu’est-ce qu’elle t’inspire ?
François : Ça m’inspire le mouvement perpétuel. C’est un peu ce que Monet avait en tête quand il dessinait la mer et toutes les surfaces liquides. Autrement dit, il y a une sensation de constance et de mouvement, en même temps. L’impression que tout est et sera comme cela l’a toujours été. Mais qu’en même temps, tout est un mouvement et en perpétuel changement. C’est ce que m’inspire en gros toutes les grandes surfaces liquides. Je pense aussi que l’on peut envisager sa vie, ses amours, ses amitiés de la même manière : savoir que tous les bons moments vécus sont là et le seront toujours mais qu'il ne faut jamais croire que tout est acquis.
François and the Altas Mountain - Piscine.
cafébabel : Tu poursuis ta route et décide de t’arrêter dans un endroit complètement vierge qui laisse l’espace à la plus pure imagination. Tu sors un papier aquarelle, que dessines-tu ?
François : Quand je dessine dans la nature, j’essaie de me plonger dans le lieu. Je dessine tout le temps ce que j’ai en face de moi. Lorsque je laisse place à l’imagination, c’est plutôt quand l’endroit me déplaît : dans le train par exemple. Des endroits d'où je ne peux pas m'échapper. Quand je suis fasciné par ce que je vois, je vais essayer de me plonger encore plus dans l’expérience que je vis, en dessinant ce que j’ai sous les yeux. J'ai toujours cette volonté de se raccrocher au monde dans lequel je suis.
cafébabel : Tu t’enfonces dans une forêt, plutôt sombre, que t’évoque-t-elle ?
François : Le fait de surmonter mes peurs. Être en mouvement dans cette forêt, c’est négocier avec ces craintes et avancer. Littéralement. Ça m’évoque aussi la mortalité, le fait de pouvoir disparaître. Les arbres sont plus vieux que moi. Ils m’ont vu naître et me verront mourir.
cafébabel : Tu es perdu. Tu débroussailles, cherche ton chemin parmi les arbres et les feuilles. Doucement, tu entends le bruit du bois et la forêt qui s’éveille tout à coup dans des mesures d’afro-beat. Que fais-tu ?
François : Je me laisse bercer. Justement j’utilise souvent ces rythmiques là (l'afro-beat, ndlr) pour me débarrasser des craintes. Au lieu d’être en panique quand il s’agit de sortir de la forêt, je profite du moment, j’écoute les rythmes et je me laisse enivrer par les rythmes ainsi que par ce que je ressens. Plutôt que de souffrir des craintes, je préfère profiter de l’environnement dans lequel je suis.
cafébabel : À la sortie de ce bois, tu tombes dans une clairière. L’endroit est rassurant, parfait pour invoquer des souvenirs d’enfances chaleureux. À quoi penses-tu ?
François : Je pense au fait de jouer, quand j’étais enfant, dans les champs avec mes copains. On s’imaginait en chevalier. Je me souviens de l’odeur de la terre, de mon jean qui était sali par les tâches d’herbe.
cafébabel : La marche s’effectue désormais sur un sentier vallonné, de part et d’autres duquel s’étend la plaine. Tu es soudainement gagné par une sorte de fatigue agréable et, tout en marchant, tu te mets à rêver. Quelle forme ce rêve prendrait-il ?
François : Avec un peu de fatigue, un peu enivré par la marche, c’est exactement le moment propice pour écrire un morceau qui n’aurait pas forcément un lien avec ce que je vois mais qui évoquerait une relation que j’ai eue avec une personne. C’est tout le temps comme ça que j’écris en tout cas.
cafébabel : Après la rêverie, le temps est maussade tandis que la randonnée grimpe soudainement et appelle à des souvenirs pénibles. S’il fallait se remémorer une épreuve, laquelle viendrait en premier ?
François : Je penserai à des moments pénibles en allant surfer où les conditions étaient dangereuses et où j’ai eu peur de me noyer. Ce genre de trucs.
cafébabel : À mesure de pas un peu lourds, tu aperçois le sommet qui représente à la fois la fin du voyage mais aussi une certaine forme de vérité. À ce moment-là, est-ce que cette vérité, en vérité, tu ne la connais pas ?
François : (rires). Et bien si. Je pense que dans ces moments-là, la vérité peut se révéler. Le monde nous dépasse complètement. On est au sommet d’une montagne. On est voyageur, promeneur dans le monde. Donc la seule vérité qu’on peut détenir c’est que le monde a raison sur nous, qu’il détient la vérité à notre place.
François And The Altas Mountain - La Vérité
Tu es arrivé. Après avoir jeté un œil sur le chemin parcouru, tu te mesures au vide. Par lequel de ces deux sentiment es-tu habité : le vertige ou l’allégresse ?
François : Plutôt l’allégresse quand même. Le vertige je pense que je l’aurais peut-être connu en début de promenade. Je n’ai pas trop de vertige quant au succès, ça ne m’est jamais encore arrivé. Tout ce qui m’est arrivé a été le fruit d’un long travail. Je n'ai pas eu l’impression d’avoir de réussite facile.