France-Allemagne : illusion d’optique
Published on
Il suffit parfois d’un terme lâché par un politicien à l’endroit d’un autre pays pour que l’Europe plonge à nouveau dans la guerre des maux. Et quand il s’agit de l’Allemagne, autant dire que tout le monde s’en donne à cœur joie. « Confrontation » des illusions dans 6 pays différentes entre un ours, un cochon, des lucioles et du jambon.
Souvenez-vous courant décembre 2011 quand un vent de germanophobie soufflait du sud vers le nord de l’Europe. « Bienvenue dans le quatrième Reich », avait lâché le Daily Telegraph. Devant le poids des maux, personne n’avait su qualifier la force des propos. En revanche, aujourd'hui, lorsqu’il a fallu décrypter la charge du gouvernement socialiste français contre la politique d’austérité menée par l’Allemagne en Europe, une expression nous est venue : « prendre des vessies pour des lanternes ».
Un mot - « confrontation » - prononcé par le président de l’Assemblée nationale aurait allumé la mèche. Il va sans dire que, considérant que nous fêtons toujours le 50ème anniversaire de l’amitié franco-allemande, Claude Bartolone s’est lourdement trompé. Du côté allemand, il a plutôt « prétendu que X est un U » (« ein X für ein U vormachen »). Pis, selon certains, il aurait même « fixer un ours sur le dos de quelqu’un » (« jemandem einen Bären aufbinden »).
Angel Merkel et le cochon
En Italie où, nous le savons tous, l'on partage très souvent le lyrisme français dans ce genre d’affaire, les socialistes auraient tout simplement pris des lucioles pour des lanternes (« prendere lucciole per lanterne »). Au Royaume-Uni où, c’est bien connu, l'on se tient généralement éloigné des bisbilles continentales, on préfère se déguiser. On dira donc que les Français ont clairement « mis une perruque devant les yeux» des Allemands (« Pulling the wool over someone's eyes »). De toute façon, d’après les Anglais, cette « confrontation » est impossible car ce serait comme « mettre du rouge à lèvres à un cochon» (« You can't put lipstick on a pig »). Des Anglais qui précisent que toute comparaison avec Angela Merkel serait fortuite.
Cela dit, les références fleurissent en Europe lorsque les illusions dominent. En Pologne, on peut facilement prendre quelqu’un pour un cheval, un œuf, un ballon ou un jambon (« zrobić kogoś w konia/jajo/balona/szynka ») mais on peut tout aussi bien « laisser partir quelqu’un aux fraises » (« wpuścić kogoś w maliny »). En revanche en Espagne, depuis que l’Allemagne contrôle tout, jusqu’à écraser ses équipes de foot, on se veut tout à coup plus prosaïque. Si quelqu’un se fait des illusions, c’est juste qu’il « a perdu la moitié de sa masse» (« No te enteras de la misa la mitad »). La politique étrangère d’Hollande, encore une histoire de régime ?
Photo : Une (cc) sindorella/flickr, illustration ©Henning Studte