Federica Mogherini : au plus près de l'inconnue
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Cécile VergnatBizarrement, pas mal de monde a parlé de la jeune italienne qui prendra en décembre, la tête de la diplomatie européenne dans un climat international particulièrement tendu. Mais qui est vraiment Federica Mogherini ? Tentative de réponses en grand écart, entre Yasser Arafat et une trousse de maquillage.
Ça n’a pas été chose facile. Mais, suite à un long bras de fer, l'Italie et Matteo Renzi ont finalement réussi à imposer Federica Mogherini au poste de Haut Représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. La jeune politicienne remplacera donc Lady Ashton pour 5 ans, à un moment particulièrement délicat pour la diplomatie européenne.
On trouve toutes sorte d’écrits venant des partisans et des opposants de l’ancienne ministre italienne des Affaires étrangères mais tout le monde s'accorde sur le fait que la jeune femme de 41 ans est arrivée sur la pointe des pieds dans l'arène politique et médiatique. D’après ses partisans, c'est une jeune femme compétente, dans une Commission qui peine pour l'instant à se féminiser. Aux dires de ses détracteurs, elle serait inexpérimentée, peu charismatique et trop « souple » vis-à-vis de Vladimir Poutine. Sa nomination aurait seulement été acceptée en échange de l'affectation du Polonais Donald Tusk à la présidence du Conseil européen. Pour Renzi, sa nomination est un succès pour l’Italie. Selon ses adversaires politiques (mais pas que) il s'agit d’une victoire à la Pyrrhus, ou de l’énième preuve de propagande d’un gouvernement champion des retentissements médiatiques.
Difficile de distinguer le vrai du faux. Cependant, on est en mesure d'affirmer une chose : Federica Mogherini a brûlé des étapes. En quelques mois seulement, elle est est devenue l'une des plus jeunes ministres des Affaires étrangères de l'histore politique italienne – après Galeazzo et Ciano – et a obtenu le plus haut siège de la diplomatie à Bruxelles. Et comme pour toutes les « personnalités du moment », la vie de Federica Mogherini laisse également place à d'autres curiosités...
La politique, c’est l’art machiavélique du compromis
Comment a-t-elle fait pour devenir ministre des Affaires étrangères à seulement 40 ans ? Selon le Premier ministre, Matteo Renzi, elle est performante et jeune soit des qualités fondamentales pour en faire un symbole et « pour nous aider à vaincre le stéréotype ». Pourtant, sa relation avec l'ancien maire de Florence, n'a pas toujours senti la rose. Ces jours derniers, les gens se lâchent et soulignent le caractère machiavélique de la nouvelle élue.
Traduction du premier tweet : « Renzi a utilisé le même slogan que Franceschini (le secrétaire du Parti Démocrate (PD) cet année là, ndlr) pour la primaire de 2009. Donc, comme début de « mise à la casse » (concept inventé par Renzi pour révolutionner le monde politique italien jadis accaparé par les vieux, ndlr), c'est un peu une déception...»
Traduction du deuxième tweet : « Ok Renzi a besoin d'étudier un peu plus la politique italienne. Je crains qu'il n'ait pas le niveau... (le hastag veut dire #troisièmeannéedécoleprimaire, ndlr) »
À l’époque, Federica Mogherini n'était pas encore passée dans le giron du médiatique chef de gouvernment italien. La jeune femme militait avec l’austère et expérimenté Bersani qui fin 2012 bataillait contre Renzi pour devenir secrétaire général du PD.
Arafat, le Trivial Pursuit et les félicitations du jury
Tout comme ils l’avaient fait pour Lady Ashton les éditorialistes du Financial Times, de The Economist et du Monde ont vivement critiqué la nomination de Federica Mogherini en invoquant son inexpérience et son manque de charisme. Cette dernière s'est défendue en revendiquant plus de 20 années d'expérience politique et institutionnelle. Ses détracteurs ont-ils raison ? Si son expérience institutionnelle est limitée, on trouve des éléments intéressants dans sa carrière ponctuée d'anecdotes.
Si on l'accuse d’être trop tendre avec la Russie, Frederica Mogherini, membre du Conseil pour les relations entre l’Italie et les États-Unis, est également une amie sincère de l’Amérique, comme le souligne le quotidien démocratique Europa. Elle vante en outre ses compétences dans le désarmement en tant que membre du Conseil de l’European Leadership Network for Multilateral Nuclear Disarmameent and Non-Proliferation (ELN) et du Conseil International du réseau de Parlementaire pour la Non-prolifération et le Désarmement Nucléaire (PNND).
Dans une interview accordée au Corriere, Marco Paciotti, ancien leader étudiant FGCI (Fédération des Jeunes Communistes Italiens, ndlr) avec qui Federica a fait ses premiers pas en politique, évoque son sérieux et sa ténacité. Elle a fait preuve d’activisme, comme avec le centre d’écoute pour immigrés au Pont Milvius et s’est également engagée contre le racisme avec le projet Nero ma non solo (Noir mais pas seulement, ndt). Elle trouvait aussi le temps de boire une bière entre amis à l’Orso Elettrico (bar de Rome, ndlr) où elle enchaînait les parties de Trivial Pursuit avec comme coéquipier...Marco Paciotti. D’ailleurs, paraît-ils qu'ils étaient imbattables.
Et puis, il y a cette photo avec Yasser Arafat qui a donné lieu à une série d’accusations tendancieuses de la part de la droite, mais qui s'aligne cependant sur la position relativement pro-palestinienne des Démocrates de Gauche à cette époque. Du reste, le Moyen Orient n’est pas un sujet tabou pour Mogherini qui a obtenu les félicitations du jury pour sa thèse portant sur l’Islam politique.
Erasmus à Aix-en-Provence
La brillante étudiante, même « intello » pour certains, a écrit sa thèse lors de son séjour Erasums en France, à l’Institut de Recherche et d’Études sur le Monde Arabe et la Méditerranée (REMAM) d’Aix-en-Provence. On ne sait pas si en plus d’apprendre la langue de Molière qu’elle parle aujourd’hui couramment et d’honorer son contrat d’études, elle a participé aux interminables festins des jeunesses européennes parties en Erasmus. Mais ce qui est sûr, c'est que la nouvelle chef de la diplomatie de Bruxelles peut véritablement se définir comme européenne et européiste.
Des hommes influents et un couffin
« Je voudrais que ma famille soit à mes côtés à Bruxelles », probablement pour chanter « Bella Ciao », « la plus belle berceuse du monde », écrit-elle dans son Blog personnel, Blog Mog. La berceuse sera adressée à ses deux filles nées en 2005 et en 2010, à la suite de son mariage avec Matteo Robesani, ancien collaborateur de Walter Veltroni (ancien maire de Rome, ndlr). D’après des bruits de couloirs, la profonde amitié que sa tante scénariste, Isa Mogherini, entretient avec l'ancien maire de Rome et fondateur du PD (parti démocrate), ont donné un bel élan à la carrière de la jeune Federica.
Elle aurait pu chanter sa première berceuse dans les couloirs du Parlement. Peu de monde se souvient d’une jeune députée de 37 ans, alors sur le point d'accoucher de sa fille cadette et désespérée par la crainte de ne pas pouvoir participer à un vote très important sur le sort du gouvernement Berlusconi. En décembre 2010, la future maman confiait au Corriere: « Je m’efforce de monter le plus possible les escaliers, avec l’espoir d’accélérer l’accouchement. Et je passe en revue toutes les variables. Il me suffit de trois jours d’avance ou de trois heures de retard ». Elle réussira finalement à voter et Marta naîtra quelques jours plus tard.
La politique sans fard
Inutile de préciser qu’en politique, l’image est primordiale, surtout au sein du gouvernement Renzi. En observant Frederica Mogherini, deux particularités sautent aux yeux : sa préférence pour le pantalon large qui vient souvent remplacer le tailleur traditionnel et son utilisation réduite de maquillage – en réponse peut-être à la période pop des shows girls du berlusconisme. Ou pour insinuer qu'elle ne triche pas.
Translated from Federica Mogherini in 5 punti: tra curiosità, aneddoti e gossip