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Face A : le sourire d’Aphex Twin

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BruxellesCulture

Le 23 septembre sera à marquer d’une pierre blanche. Aphex Twin, le gourou et maître à pensée de l’electronica revient avec un nouvel album Syro, après 13 ans d'absence. L’occasion de revenir sur les éléments qui ont construit la légende : sa musique naturellement, mais aussi son univers baroque, et personnalité, barrée. Portrait double-face.

Il y a des images qui ne trompent pas. Proche de l’icône. Ces cheveux longs, épais au roux flamboyant, ce regard légèrement frappé de strabisme divergent, puis surtout ce sourire de farfadet ô combien inquiétant tout droit sorti d’un conte des frères Grimm. Aucun doute, nous nous trouvons bien face au maître de l’életronica, qui régna sans partage dans les années 90 sur les terres de l’IDM, de l’Ambient et du Drill’n’Bass . En 5 noms comme en mille, Richard D. James, alias Aphex Twin.

Après 13 ans de silence, l’enfant terrible aux nappes synthétiques vérolées et aux beats hystériques est de retour avec un nouvel album intitulé Syro - mot fabriqué de toutes pièces par son fils de 5 ans, qui ne veut strictement rien dire. Les gars de The Designers Republic, le collectif de graphistes qui collabore depuis toujours avec Warp (le label d'Aphex Twinn, nda), à l’origine de la pochette du nouvel album, ont fait du bon boulot. Cette pochette rend à la fois hommage à l’homme mais aussi à  son album culte ...I care because you do qui fera entrer Aphex Twin de plein pieds dans sa légende.

Un visuel sur la brèche

La légende d’Aphex Twin repose sur une identité musicale hors-norme certes, mais il est évident que Richard a su tirer (ou bien d’autres ont su pour lui) de son physique énigmatique, voire inquiétant, et créer une communication aussi agressive que controversée. Le mérite revient à la main et à l’oeil sombre du réalisateur Chris Cunningham, connu pour avoir commis le clip sublime et transgressif de Björk, All is full of love. Pour l'anecdote, l'artiste islandaise a une fois souhaité collaborer avec Aphex Twin, mais celui-ci goûtant que peu son ton très  « chef d’entreprise », l’a aussitôt rembarré.

Aphex Twin, c’est aussi des clips borderline. Come To Daddy a été classé parmi les 15 clips les plus controversées de l’histoire musicale par le site musicjobs. La scène où Richard D. James est entouré d’enfants tout en caressant leurs têtes peut en effet faire sourciller. Ces thèmes de l’enfance et de la sexualité sont très présents dans l’oeuvre du DJ britannique. On les retrouve dans le clip Donkey Rhubarb, où des espèces de Telletubbies affublés du visage d’Aphex s’entourent de gosses qui, une fois seuls, s'adonnent à des gestes obscènes, miment des coups de reins, avant de passer tout bonnement à l’acte.

Aphex Twin - Come To Daddy

En vieillissant, le musicien cherche néanmoins à adoucir son image. Ainsi, Windowlicker tourne en dérision ce personnage pervers et malsain construit au début de sa carrière. Autre leitmotiv aphextwinien, le visage de Richard D. James pullule régulièrement dans ses clips. La plupart des protagonistes qui apparaissent dans les clips vidéos de l’artiste, s’ils ne portent pas déjà ses traits, se « transforment » pour ressembler à Aphex twin, comme contaminés par le groove malade du compositeur. Le Gallois avait d’ailleurs poussé l’expérience à son paroxysme lors d’une performance au London Electronic Festival, en 2010, en projetant son propre visage sur ceux de son public grâce à un procédé de face mapping.

Aphex Twin au London Electronic Festival. 

L'indicible gallois

À 43 ans, l’enfant des Cornouailles a eu l’occasion de nourrir tous les fantasmes et nombre de rumeurs. Tout d’abord, on ne sait jamais où le trouver. Durant sa longue et dense carrière, il a endossé une myriade de noms et pseudonymes (The Tuss, Polygon Window, Bradly Strider…). Une multitude d’identités qui sont à l’image de sa puissance créative et de sa personnalité, qu’il qualifie lui même de profondément « erratique ». Richard D. James est aussi soupçonné des plus folles excentricités qui restent invérifiables, mais persistantes : il aurait élu un temps domicile dans le coffre-fort d’une banque londonienne qu’il aurait loué au prix fort. Il partagerait son nom avec son frère aîné mort-né (d’où le « twin » contenu dans son pseudo), ou encore il piloterait un tank pour se détendre le dimanche après-midi.

Pourtant, de l’aveu même de l’artiste, il serait en fait plutôt timide. Pour lui, les meilleurs concerts sont ceux où il joue anonyme. « Tu reçois une réaction plus honnête de la part de ton public », a-t-il expliqué lors d’un entretien accordé à Pitchfork. Une pudeur qui pourrait s’expliquer par ses origines très modestes : son père était mineur et sa mère infirmière dans un petit village désoeuvré du Pays de Galles.

Retrouvez, très prochainement, la face B du portrait d'Aphex Twin sur le magazine.