Etre prof ici ou là en Europe
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De la formation des enseignants aux salaires des débutants, dans toutes les salles des professeurs, on discute des conditions de travail… Tour d’Europe des revendications.
En Italie, des futurs profs déjà découragés
Devenir enseignant en Italie, est un véritable casse-tête, sur lequel plane de surcroît la menace du chômage. Le concours public qui permet de rentrer dans l’education nationale italienne est en sursis depuis des années, ce qui provoque une certaine confusion. Dans la perspective d’une réforme de ce système, une école de spécialisation supérieure (Ssis), qui doit former en deux ans les futurs profs, a été créée. Pourtant, le Concours public n’a encore jamais été annulé… Résultat : le système de point qui régie la carrière des enseignants, met aujourd’hui en concurrence les profs issus du concours, et les autres issus de l’école. Bref, ce véritable parcours du combattant ne tient qu’à la valse des réformes des gouvernements successifs. A l’heure actuelle, on ne sait pas du concours ou de l’école, quelle institution sera choisie en définitive… Ce statu quo, auquel personne ne comprend plus rien, plonge dans l’expectative une foule d’étudiants stoïques.
Avec 18 heures de présence à l’école par semaine, les enseignants italiens reçoivent en salaire qui est de 20 000 euros/an en début de carrière.
En Pologne, syndrome du surmenage
En Pologne, il ne fait aucun doute que devenir enseignant est une vocation, et ce pour plusieurs raisons : le salaire dans les écoles publics n’est pas très élevé (cette rémunération est la deuxième plus basse d’Europe, en fonction du PIB du pays, selon Eurydice). Il dépend des diplômes et de l’expérience acquise de l’enseignant, bien sûr de son ancienneté, et enfin de ce qu’on appelle le « développement professionnel » du professeur.
« Le syndrome du surmenage est considéré comme l’un des problèmes les plus graves qui touchent les professeurs polonais »
Mais ceci est en théorie ! « Enseigner est juste l’une de mes activités : il y a beaucoup de papiers à faire, pour des classes de 30 élèves. Nous devons également suivre de nombreuses réunions, lors des quelles nous nous « auto-formons ». Tous les deux ans, je dois reprendre une formation universitaire. Un travail qui s’ajoute à tout ce que je dois rendre dans le cadre de mon « développement professionnel », raconte Agata Plucińska, qui est professeur « d’études sociales » et de géographie, dans un collège. C’est sans compter une grande attente des parents vis-à-vis du rôle des enseignants : « Les gens croient souvent que les profs sont là pour élever l’enfant, et si quelque chose cloche, vous pouvez être sûre que ils en sont responsables… », poursuit-elle. Le syndrome du surmenage est d’ailleurs considéré comme l’un des problèmes les plus graves qui touchent les professeurs polonais, avec entre autres, le stress, les névroses…
Avec 18 heures de présence à l’école par semaine, les jeunes enseignants polonais touchent 5 041 euros en début de carrière.
Allemagne : pas à se plaindre
Si on en croit les plaintes des professionnels eux-mêmes, être professeur en Allemagne est le pire métier possible. Pourtant, si l’on compare avec les collègues européens, ils semblent pourtant gâtés : quatorze semaines de vacances par an, un statut de fonctionnaire à vie (avec des différences pourtant entre Est et Ouest) et à midi, les affaires sont pliées. Car en Allemagne, élèves et profs ne vont pas en cours l’après-midi.
« Fainéants », « têtes de fonctionnaire » : la réputation des profs en Allemagne est désastreuse. Pourtant les études pour le devenir sont plus longues qu’ailleurs. Il faut d’abord décrocher l’examen d’état, « le Staatsexamen », puis suivre une formation professionnelle de deux ans au « Referendariat », le tout encadré par un séminaire d’étude (« Studienseminar ») du Land, pendant laquelle le futur prof doit rendre des travaux pratiques et « réussir » ses premiers cours devant un petit jury installé au fond de la salle de classe. La profession a connu une revalorisation pendant ces dernières années. En 2008, l’Allemagne manquait de 20 000 professeurs selon la Fédération des philologues. Les régions commencent de plus en plus à débaucher les jeunes diplômés.
Un jeune professeur allemand commence sa vie professionnelle avec un salaire de 30 842 euros/an et passe 17 heures dans les murs de l’école (pour 40 heures de temps global).
Espagne : une grande présence à l’école
Pour devenir prof en Espagne, il faut avoir une maîtrise, décrochée en 4 ou 6 années d’études, ou une équivalence validée à l’étranger, puis suivre une formation pédagogique proposée par les universités. Pour travailler dans le public, il faut ensuite passer un concours, et ainsi devenir fonctionnaire de l’Etat. Les Espagnols ont un temps de présence à l’école assez élevé comparé à leurs voisins européens. Sur 35 heures de travail, 25 à 30 (selon la communauté autonome) sont passées au collège, en salle de classe ou pour d’autres tâches de gestion ou d’équipe (une fois à la maison, il y a aussi les cours à préparer en amont, la formation continue et les activités pédagogiques …)
Selon les communautés autonomes, le salaire varie énormément. La moyenne des rémunérations en Espagne talonne cependant celle de l’Allemagne, en se plaçant juste derrière dans le classement de l’OCDE, avec un salaire de 27 671 euros par an pour un jeune enseignant.
France : une réforme qui fait frémir
En France, la « rénovation du dispositif de formation des enseignants » est en cours et devrait être mis en place pour la rentrée 2010. Elle anime énormément les débats dans la salle des profs. Au lieu d’un concours après 3 ans d’université, les étudiants devront décrocher un Master « enseignement » (deux ans de plus à la fac). Les détracteurs dénoncent déjà la fin d’une excellence et de la spécialisation approfondie dans une matière. Cependant, rien n’a encore été vraiment officialisé.
Le point noir dans l’hexagone, se trouve surtout au niveau de la rémunération. La revalorisation du salaire des professeurs français est également en discussion. Ces salaires sont plus bas que ceux des voisins européens de l’Ouest.
Au 13e rang dans le classement mondial de l’OCDE, les jeunes enseignants français touchent 20 153 euros par an, en début de carrière. Ils travaillent en cours 16 heures/semaine, et 35 heures en temps global.
Source : OCDE, Eurydice
Merci à Katharina Kloss, Francesca Barca, Jesús Ramírez Morales, Fernando Navarro Sordo, Pedro Picon.