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État palestinien : "L'Europe a rendez-vous avec l'Histoire"

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Bruxelles

Par Laurence Lamotte Photo: Matthieu Tihon Les citoyens belges sont sensibles à la cause palestinienne, comme le prouve ici la salle comble lors d’une conférence en présence de la diplomate Leila Shahid, déléguée de la Palestine auprès de l’Union européenne qui se déroulait le 25 octobre à l’Espace Marx, à Bruxelles.

Le peuple palestinien subit depuis plus de 40 ans la construction de colonies illégales sur son territoire. Au mois de septembre dernier, les Palestiniens ont décidé d’exprimer au monde leur ras-le-bol envers cette situation et le manque de volonté d’Israël de parvenir à un accord. Le président Mahmoud Abbas a annoncé sa volonté d'intégrer la communauté internationale au nom de l'État, comme il estime en avoir le droit, au même titre que n'importe quel peuple. Depuis, le pays avance doucement vers la reconnaissance à l'ONU, suite à sa candidature, déposée le 23 septembre dernier. En effet, l'une de ses instances, l'Unesco, a voté en faveur de l'adhésion de la Palestine en son sein. Majed Bamya, responsable de la Délégation générale de Palestine auprès de l’Union européenne, donne son point de vue sur le rôle que les 27 pourraient jouer dans l’adhésion d’un État palestinien.

La Palestine a intégré l'Unesco ce 31 octobre suite au vote favorable de 107 pays, contre 14 voix défavorables et 52 abstentions. Parmi ces dernières se retrouvent 11 pays européens indécis. L'Allemagne, la Lituanie, les Pays-Bas, la République Tchèque et la Suède étaient contre. Les onze autres membres, dont la Belgique et la France, ont accordé leur vote à la Palestine. L'Union européenne montre donc, ici encore, son incapacité à parler d'une seule voix. Mais pour Majed Bamya, cela n'a pas d'importance. Il préfère que l'Europe soit divisée plutôt qu'elle se prononce à l’unisson, mais pour finalement choisir l'abstention. « Chaque État nous importe », ajoute-t-il.

Le soutien ne suffit plus

L'Union européenne a soutenu politiquement et financièrement la construction de l'État palestinien depuis la déclaration de Venise de 1980 (http://www.medea.be/fr/themes/ organisations-et-diplomaties-internationales/declaration-de-venise-1980) et a reconnu le droit à l’autodétermination de son peuple. Il parait donc logique à M. Bamya qu'elle soit cohérente avec ses valeurs et ses positions en soutenant l'indépendance jusqu'au bout. Il la félicite d’ailleurs de s’être toujours prononcée avec clarté sur les conditions du règlement du conflit. « Mais qu’a-t-elle fait de ces positions ? L’Union européenne est une partenaire d’Israël et pourrait donc utiliser cette force pour la contraindre à cesser de violer le droit international », suggère-t-il. Il affirme que l’appui de l’Europe est précieux mais insuffisant puisque, malgré les condamnations répétées envers Israël, les colonies se multiplient et les négociations promises ne sont qu'un leurre. « L’ONU était donc le lieu le plus approprié pour enfin trouver une solution. Il faut maintenant que chaque État prenne ses responsabilités. Soutenir l'impunité d'Israël n'amènera pas la paix », dénonce-t-il. Preuve en est : les sanctions prises par Israël suite à l'adhésion de la Palestine à l'Unesco telles que le gel des fonds ou l'accélération de la construction de colonies juives sur le territoire occupé. Le diplomate déplore cette situation : « Nous n'avons aucune chance de régler ce conflit tant que l'État d'Israël restera au-dessus des lois car la puissance occupante continuera alors à se comporter en État hors la loi ».

Le 11/11/11, début d’un nouvel armistice ?

Ce vendredi 11 novembre, un projet de rapport sur l'adhésion de la Palestine à l'ONU a été officiellement présenté lors d'une ultime réunion des ambassadeurs. Il faudra ensuite qu'au moins un des 15 pays du Conseil de sécurité demande le passage au vote, sans doute avant

la fin de l'année. Si au moins 9 membres sont favorables à l'entrée du pays, ils établiront une recommandation positive à l'Assemblée générale, composée de 193 membres. Les États-Unis ont rapidement annoncé qu'ils opposeraient leur véto si la Palestine parvenait à ce dénouement favorable. Mais pour Majed Bamya, il n'y a pas d'inquiétude à se faire : peu importe le temps que ça prendra, les Palestiniens iront jusqu'au bout de leur démarche. D'après le diplomate, ce sont les pays qui s'opposent à la reconnaissance de l'État palestinien qui se punissent eux-mêmes en s'excluant de la sorte: « le ridicule ne tue pas mais affaiblit la crédibilité de celui qui s'est isolé ». C'est pourquoi il estime également que l'Union européenne est à présent face à une grande opportunité de s'affirmer sur l'échiquier mondial.

Les citoyens pour la démocratie

« Le Printemps arabe montre à quel point le statu quo est intenable.». Comme beaucoup, Majed Bamya pense que les peuples se lèvent toujours pour combattre l’injustice dont ils sont victimes. De plus, le diplomate est persuadé que l’opinion publique est à présent favorable à la création d’un État palestinien : « Les citoyens du monde, y compris en Europe, soutiennent notre aspiration à la justice, à la liberté et à la dignité. Leurs gouvernements devraient faire de même. Les Palestiniens ne seront pas l'exception, ni une nouvelle fois les exclus de l'Histoire. Nous avons tous un rendez-vous à ne pas manquer avec l’Histoire, conclut Majed Bamya. Ceux qui n’y répondront pas devront en assumer les conséquences. » Le diplomate est persuadé que l’Europe devrait ici saisir sa chance de prendre les devants. Elle a une occasion unique de jouer un rôle clé dans la région, à l’inverse des États-Unis qui y perdent actuellement leur crédibilité. En effet, se prononcer ouvertement sur cet épineux dossier pourrait lui octroyer une considération particulière de la part du « nouveau Monde arabe » qui a émergé lors de cette année 2011.

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