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Emeutes, un an après... et quelques forces de police en plus

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Lorelei

Presse à la grecque

Les 6 et 7 décembre 2009, la Grèce commémorait la mort du jeune Alexis Grigoropoulos, tombé sous les balles d'un policier à Athènes un an plus tôt. On savait que les manifestations ne se dérouleraient pas dans un calme olympien, les débordements de l'an passé étaient encore dans toutes les mémoires.

Mais le nouveau gouvernement, après avoir appelé la société et le gouvernement à « une condamnation cohérente et commune de toute forme de violence et à la protection de la sécurité du citoyen », préparait aussi une fine équipe de 10.000 policiers prêts à intervenir à Athènes, sans parler de contingents sur le pied de guerre dans les provinces plus calmes (voir l'article). Beaucoup de journaux grecs ont commenté ce nombre important de forces de police ainsi que leur action musclée pendant les trois jours de manifestations.

L'année dernière en effet, la police ayant été directement mise en cause dans le déclenchement des émeutes du fait de la responsabilité d'un de ses membres, elle avait été rapidement débordée par des mouvements de colère à son encontre même. Cette année, les choses semblaient différentes: dans To Vima, Antonis Karakousis écrivait le 3 décembre: « Le climat et nos capacités de résistance (à la violence des casseurs) est différente cette année. Cette année, le gouvernement a changé, le précédent gouvernement Karamanlis a croulé sous le poids des accusations, et le peuple a voté pour le changement. Personne ne peut imaginer que le pays supportera un nouveau cycle de violences cette année, vus les problèmes qu'il affronte maintenant ». Est-ce pour cela que le nouveau gouvernement, socialiste, Papandréou a voulu à tout prix empêcher le débordement?

En fait, grandes semblaient les craintes de débordements plus « organisés » encore que l'an passé. Le journal Ta Nea publiait le 4 décembre un article alarmiste sur les manifestants « importés », en l'occurrence des membres actifs du mouvement anticapitaliste venus de toute l'Europe prêter main forte à leurs camarades grecs: « L'arrivée d'éléments durs du mouvement anticapitaliste d'Italie, Belgique, Serbie, Espagne est le nouveau casse-tête de la police grecque ».

Le 6 décembre, le journal Eleftherotypia dressait un premier bilan de ce qu'il considère comme une dérive policière: « 200 condamnations, plus de 1000 arrestations, 60 gardes à vue, utilisation abusive des caméras par les forces de police, prélèvement obligatoire d'ADN même en cas de petit délit... » Le pire, selon Christos Zerbas, auteur de l'article, c'est que les mesures très controversées adoptées par le précédent gouvernement en matière de sécurité, en particulier la fameuse loi anti-cagoule, qui permet aux forces de police de procéder à un contrôle musclé de toute personne cachant son visage par un couvre-chef un peu... couvrant (comme le font en général les casseurs, tout comme les simples citoyens grippés, par exemple) non seulement n'ont pas été abrogées par le nouveau gouvernement qui l'avait promis, mais ont même été appliquées de façon zélée. Le journal plaide pour le changement rapide de ces lois de sécurité, qui devrait intervenir dans le premier trimestre 2010.

Au final, les autorités se sont félicitées de la gestion des manifestations. Kathimerini rapportait le 8 décembre quelques propos du ministre de la sécurité du citoyen. Morceaux choisis: « Nous avons préféré agir préventivement, plutôt que de réprimer. (…) Certes, voir un policier exercer la violence sur un citoyen constitue une image répugnante (et cela s'est vu), mais aussi répugnante est l'image de hooligans qui agressent des policiers dont le salaire est de moins de 1000 euros par mois. (…) Athènes est la ville la plus sûre d'Europe ». Cette dernière affirmation est sûrement vraie, il n'empêche que l'extrême-gauche commence à parler d'Etat policier.

Une chronique parue dans To Vima résumait les choses ainsi: « Il est vrai que l'ampleur des destructions de l'année dernière ne peut être comparée à la petite guerre urbaine de cette année. Entre autres parce qu'il y avait moins de manifestants cette année et parce que la stratégie de la police, qui a procédé à des arrestations préventives, a été efficace. (…) Mais nous sommes devant un dilemme qui doit nous poser question à tous: le besoin de protéger la ville et les biens des citoyens entre en contradiction avec le respect des droits de tout citoyen à manifester. »

Dans ce contexte polémique, le gouvernement a tout de même apporté une preuve qu'il était humaniste, voire écologiste (voir l'article): après avoir pris connaissance d'enquêtes attestant de la nocivité des armes chimiques de type bombes lacrymogènes, les autorités de sûreté grecques s'apprêteraient à les remplacer par des canons à eau, une eau colorée de surcroît qui permet, « comme au paint-ball », d'arrêter quelques mètres plus loin le suspect arrosé... et de maîtriser une manifestation qui dégénère. Le ministre de la sécurité du citoyen a justifié ses nouvelles armes par leur dangerosité pour l'organisme (allergogènes, cancérogènes, …) et leur impact négatif sur l'environnement. Une eau colorée déversée dans les rues surchauffées d'Athènes serait donc plus écologique ?

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