Des barricades contre la réforme de l’éducation italienne
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Gilles PansuLe Sénat a approuvé la loi « Gelmini » le 29 octobre dernier et dans tous le pays, depuis deux semaines, les manifestations s’enchaînent. A tel point que Berlusconi a suspendu l’application du texte. Récit d’un CPE à l’italienne.
De mémoire d’Italien, on n’avait pas vu cela depuis 2001, et le G8 de Gênes à la suite duquel les citoyens étaient en masse sortis dans les rues. Depuis deux semaines, les protestations se poursuivent : instituteurs et personnel des écoles primaires, parents, professeurs et chercheurs universitaires se mobilisent, entre nuits blanches et cours en plein air. Pourtant « l'école change, estime Maria Stella Gelmini, la Ministre italienne de l'éducation qui a donné son nom à un texte de loi décrié, avec cette réforme, nous revenons à l'école de la discipline, du mérite et de l'éducation », poursuit-elle. Dans les cortèges, peu de gens partagent son opinion.
A l'école primaire par exemple : le retour au « maître unique » (qui enseigne les matières humanistes et scientifiques) et la disparition des cours l'après-midi, vont provoquer une réduction drastique du nombre des enseignants (environ 80 000 postes en moins) ; à cela il faut ajouter les réductions de personnel, maîtres auxiliaires et suppléants, embauchés en contrat à durée déterminée.
Dans le secondaire et à la fac
Côté lycées, les élèves et leurs professeurs sont en train de se mobiliser contre ce qu'ils dénoncent comme une manœuvre de propagande destinée à détourner l'attention de la véritable signification de la réforme « Gelmini » : des réductions budgétaires importantes qui vont entraîner l'école publique vers le modèle de l'école privée. Pour l’opposition, le « retour à la note de conduite » intégrée dans la moyenne générale, sont des mesures de façade pour masquer la polémique sur les réductions budgétaires.
Et l'université alors ? Dans le cadre d'une série de lois approuvées en vitesse à la fin de l'été, se cachent bien des surprises qui ne sont pas passées inaperçues dans le monde universitaire : une réduction drastique du budget de l'Etat consacré aux universités publiques pour les trois prochaines années (plus d'un milliard d'euros) et le blocage de 20 % des nouveaux postes d'enseignants. Concrètement, pour cinq professeurs partant à la retraite, un seul sera embauché. La loi prévoit également la possibilité pour les universités publiques de se transformer en fondations privées, en changeant leur statut juridique. Les manifestants craignent la mort de l’université publique, privatisée et sous la pression des lois du marché.
Des lycées assiégés et des cours dehors
Silvio Berlusconi a réagi à ces récents événements, en se disant « désolé de voir tant de jeunes trompés par la gauche. » Trompés, peut-être. Innovants, sûrement ! Les initiatives populaires ont été organisées pour être visible par le grand public et de nouvelles formes d'occupation pacifique sont apparues. Pour protester contre les réductions de personnel, des dizaines de milliers d'instituteurs de l'école primaire ont occupé pacifiquement les salles de classe jusque tard le soir pour expliquer aux élèves et aux parents quelles conséquences aura la réforme de l'éducation. Les lycées et les universités de Rome, Milan et Turin ont attiré l'attention de la presse en organisant des nuits blanches dans les écoles et des cours dans la rue. Tout cela sous la supervision de professeurs, des parents et du personnel scolaire. Mais tout ne s’est pas passé sans violence, car des affrontements entre les étudiants et la police, avec quelques blessés à Rome et à Milan, ont notamment eu lieu.
Translated from La scuola italiana protesta