De Villiers dans la piscine européenne
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Philippe de Villiers n'aime pas l'Europe. C'est connu. Il la voit comme une prison pour la France, qui serait en plus le souffre douleur, subissant les assauts répétés des technocrates bruxellois, qui se seraient promis de la mettre à mort. Pourtant, il est toujours aussi prompt à se présenter aux élections européennes, promettant de tout changer.
Dans une récente interview sur RTL, il s'en prend violemment aux institutions bruxelloises. Au sujet de la pêche, il annonce la couleur. Selon lui les commissaires européens, ne font pas la "différence entre un poisson rouge d'aquarium et un cabillaud". Alors que lui si. De Villiers, homme de la terre. Bien bien. Ce qui est ensuite amusant, c'est qu'alors qu'il vilipende les quotas bruxellois, il crache sur la Norvège qui elle n'en a pas. Logique, elle n'est pas dans l'UE. Si l'on poursuit son raisonnement, il faudrait alors que la Norvège rentre dans l'UE. Sainte horreur, affliger cette prison au peuple norvégien !
Ou alors, il faudrait faire sauter les quotas. Oui, mais là, c'est le poisson qui va gueuler. Selon lui, la solution, c'est d'établir les quotas grâce à la négociation entre les pêcheurs et les experts. Surtout quand on sait que selon les experts, les quotas sont déjà trop élevés...Pour quelqu'un qui se dit réaliste, je ne savais pas qu'il croyait qu'on pouvait marier un lapin avec un chou...Bref, comme à son habitude, de Villiers a encore tout mélangé pour mieux cracher sur l'UE avec ses arguments habituels: éloignement de Bruxellois, monde d'experts coupé de la réalité, se donnant le rôle du chevalier blanc (made in Puy du Fou).
Dans la suite de l'interview, Jean-Michel Apathie revient sur son absentéisme à Strasbourg et Bruxelles. C'est alors qu'il esquive la question en beauté:
Ph de Villiers: Moi j'ai assisté à toutes les sessions JM Apathie: Ah bon ! Ph de Villiers :... Sauf 3. J'ai assisté à 50 sessions sur 53 ; et quand je ne suis pas au Parlement européen, moi je ne suis pas en train de cachetonner ou en train de préparer la construction d'une piscine parce que vous vous rendez compte ...
C'est tellement beau, que j'ai presque envie d'applaudir. Alors qu'on le questionne sur son inactivité bruxelloise (pour en être sur, voir ici et ici et encore ici mais malgré tout, il va encore crier au complot de la presse), il esquive en balançant ses petits camarades du Parlement européen, qui se feraient construire une super piscine à nos frais (9 millions d'euros).
Infos ou Intox ?
En foullant, voici ce qui semble être la vérité. Les institutions européennes disposent d'un centre sportif, accessible pour tous les fonctionnaires de l'UE. Construit il y a 15ans, il est un des rares bâtiments à ne pas avoir été retapé depuis. Vu l'augmentation du nombre de députés et du personnel du fait de l'élargissement, il a été prévu en 2006, de le remettre à niveau. Profitant de l'occasion, on rajoute aussi un bassin aux infrastructures déjà existante. Voici ce qui est écrit dans le rapport disponible sur le net, et que vous trouverez en pièce jointe de cet article :
Ca c'était le projet de 2006.
Alors, ils sont où ses "toboggans", ses "deux bassins" (vu sur quel ton il l'annonce, l'auditeur pourrait penser à des dimensions olympiques) et ses "échelles pivotantes" ? Il semblerait que Monsieur de Villiers ait gonflé le tableau pour récolter quelques voix de mécontents.Quelle élégance dans le combat électoral.
Concernant le prix, la partie construction revient selon un document de 2009, à 5,6 millions d'euros (aussi disponible à la fin de l'article). Le reste c'est le coût de l'étude et des rénovations. Est-ce un tort de rénover une infrastructure vieillissante?
Concernant plus spécifiquement les 5,6 millions, il n'y a pas que la piscine mais l'ensemble des nouvelles créations. Et selon le blog Europe du Figaro, "la moitié du montant des bénéfices que serait amené à faire ce dernier serait reversé aux institutions européennes". Encore une fois, notre défenseur de la cause nationale a exagérer et n'a raconté qu'une partie de l'histoire. La question qui peut aussi être poser à Philippe de Villiers est là suivante: pourquoi en parler maintenant? Pourquoi pas en 2006 quand le projet a été lancé ?
De Villiers se sent donc d'attaque à lutter contre le gâchis de l'argent du contribuable. C'est très honorable de penser à nos deniers. Mais avant de balancer ses petits camarades, il serait bon aussi de lui rappeler ses faits d'armes, dans son fief, la Vendée.
Juste un dossier: le TGV Atlantique. En l'an de grâce 2000, alors que son département de Vendée était encore à l'écart du réseau à haute vitesse car encore non électrifié, le Seigneur de ces terres a eu la brillante idée de faire pousser le fleuron de l'ingénierie française par une locomotive diesel...résultat un TGV qui pointait à 140km/h...Juste pour pouvoir dire: regardez, nous avons le TGV !
Au passage, toutes les dépenses étaient pris en charge par le département, vu que la SNCF ne voulait pas mettre la main à poche. Motif ? Elle était en train d'électrifier le réseau, il fallait juste être un peu patient. Finalement, le contribuable vendéen a payé pendant 4ans, plusieurs millions de francs de l'époque, avant que cela ne cesse (car trop coûteux), pour de nouveau attendre quatre ans avant que le vrai TGV électrique arrive (décembre 2008).
Souvent, il évoque aussi les fastes de Bruxelles, avec les impôts qui nous accablent. Voici un article très intéressant sur sa façon de gérer son département, quelques hausses d'impôts en prime (attention pour le lecteur: blog tenu par le maire socialiste de La Roche sur Yon, donc opposant à de Villiers. Avoir un peu de recul quand même. Ici même sujet, mais article de presse). Alors, comme ça on augmente les impôts en période de crise? Et la défense du citoyen comme c'est si bien dit chez RTL (quand je ne suis pas au Parlement européen, je m'occupe des victimes, figurez-vous, comme je l'ai fait hier, comme je le fais tous les jours parce qu'aujourd'hui, il y a Bruxelles qui fait n'importe quoi et il y a tous les jours des victimes) c'est passé où ?
Au final quand on écoute Monsieur de Villiers, on a l'impression qu'il a les idées bien claires. Il sait où il va, il sait ce qu'il pense. Pourtant, en consultant le site EPVote, qui recense tous les votes de nos parlementaires européens lors des sessions, on constate qu'il a un taux d'abstention de 40%...Soit il était parti prendre un café, soit il ne comprenait pas de quoi il retournait et/ou n'avait pas d'idées sur la question.