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Danica Curcic : L'actrice que rien ne peut arrêter

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BerlinCulture

Actrice danoise d'origine serbe, Danica Curcic s'est toujours servie de ses deux cultures pour multiplier les rôles qu'elle endosse aussi bien au cinéma qu'au théâtre. Entretien avec une fille qui veut tout, tout de suite.  

ca­fé­ba­bel : « Da­nica Cur­cic, Da­ne­mark ». Ton nom serbe re­pré­sente le Da­ne­mark à la Ber­linale. Cela in­fluence-t-il la façon dont tu es per­çue au Da­ne­mark ? Ta double iden­tité serbo-da­noise a-t-elle été im­por­tante dans ta car­rière ?

Da­nica Cur­cic : Je suis née à Bel­grade et j'ai grandi dans une mai­son serbe à Co­pen­hague. J'avais un an quand on a dé­mé­nagé. Mon père avait ob­tenu un poste à l'am­bas­sade you­go­slave de Co­pen­hague. Cela ne vou­lait pas dire qu'on al­lait tou­jours y res­ter, mais la si­tua­tion s'est dé­té­rio­rée à la mai­son, la guerre a éclaté et mes pa­rents ont dé­cidé de res­ter au Da­ne­mark. Je pense qu'avoir grandi avec deux cultures, deux tem­pé­ra­ments dif­fé­rents, deux fa­çons de vivre très dif­fé­rentes, c'est un grand avan­tage. Ce qui est drôle c'est que Da­nica veut dire Da­ne­mark en latin. C'est un ha­sard. Ma grand-mère s'ap­pe­lait aussi Da­nica. C'est un pré­nom serbe an­cien.

Cela dit, mon pré­nom n'a pas in­fluencé la façon dont on m'a trai­tée, mon look oui. Je n'ai pas l'air d'être slave ni par­ti­cu­liè­re­ment da­noise. C'est plu­tôt bien, car ça me per­met de jouer à la fois des rôles de da­noise ou de slave. Main­te­nant, le Da­ne­mark est un petit pays et les ac­teurs étran­gers de Tur­quie, d'Eu­rope de l' Est ou des Bal­kans ont quel­que­fois des pro­blèmes pour les cas­tings. On m'a éga­le­ment dit que j'étais un peu trop brune pour un rôle de pe­tite amie da­noise.

Pré­sen­ta­tion de l'ac­tice pour les « Shoo­ting Stars » de la Ber­li­nale.

ca­fé­ba­bel : As-tu tou­jours voulu être ac­trice et quel a été le rôle de ta fa­mille dans ce choix ?

Da­nica Cur­cic : Mes pa­rents m'ont tou­jours en­cou­ra­gée. Mon édu­ca­tion était très im­por­tante pour eux. Les Da­nois ont par­fois une men­ta­lité dif­fé­rente. Ils prennent une année sab­ba­tique pour voya­ger. Pour mes pa­rents, cela a tou­jours été es­sen­tiel que que je réus­sisse à l'école et aux exa­mens. Au­cune dis­cus­sion n'était pos­sible à ce sujet. Aussi, j'ai com­mencé à étu­dier le ci­néma et les mé­dias à l'uni­ver­sité, à 17 ans. Plus tard, il est de­venu évident que je de­vais ar­rê­ter les études pour de­ve­nir ac­trice. Je pen­sais : « Ça y est, c'est mon des­tin. Je dois le faire, je vais le faire et ce sera in­croyable. » J'étais tel­le­ment dé­ter­mi­née quand j'ai pris cette dé­ci­sion ! Rien ne pou­vait m'ar­rê­ter.

ca­fé­ba­bel : Parle-nous un peu plus de tes pro­jets ac­tuels.

Da­nica Cur­cic : En ce mo­ment c'est le théâtre. Je joue avec trois autres ac­trices une adap­ta­tion de Sha­kes­peare au Théâtre Royal Da­nois. C'est à l'op­posé des normes théâ­trales de Sha­kes­peare en son temps, où les hommes jouaient aussi les rôles fé­mi­nins. Je joue les rôles d'Ham­let, du Roi Lear et d'Othello. Notre di­rec­teur et dra­ma­turge du Théâtre Royal Da­nois a créé un col­lage fas­ci­nant. Lady Anne de Ri­chard III et Ophé­lie d' Ham­let se re­trouvent dans une scène. C'est assez fort car l'on joue avec des émo­tions brutes comme le désir, la ja­lou­sie ou la haine. Et je suis en­core très cu­rieuse de voir dans quelle di­re­tion nous al­lons allés. On vient juste de com­men­cer. C'est une oc­ca­sion unique pour une ac­trice d'in­ter­pré­ter le rôle peut-être le plus clas­sique d'Ham­let.

ca­fé­ba­bel : Il y a-t-il des rôles que tu aimes jouer en par­ti­cu­lier ?

Da­nica Cur­cic : J'ai joué ce per­son­nage ex­trême dans Fa­sandræberne de Mik­kel Nørgaard - une femme per­tur­bée, une fu­gi­tive en ca­vale de­puis dix ans, après la mort de son en­fant. Ce genre de rôle per­met d'al­ler au plus pro­fond de soi, là où on ne se­rait pas allé nor­ma­le­ment. Il faut rendre le per­son­nage hu­main, le dé­fendre, c'est le défi.

ca­fé­ba­bel : Penses-tu que la folie est quelque chose d'anor­mal ou bien que la nor­ma­lité est juste une forme ac­cep­tée de folie ?

Da­nica Cur­cic : Tout dé­pend du point de vue. En tant qu'ac­trice, l'on peut aller de l'un à l'autre. On peut jouer presque tout. Le plus im­por­tant, c'est de trou­ver la vé­rité. Une femme folle pos­sède aussi sa vé­rité. Le mot « folle » a une conno­ta­tion né­ga­tive, mais ça reste une ré­ac­tion à un évé­ne­ment. Vu comme ça, la folie est nor­male.

ca­fé­ba­bel : As-tu de fu­turs pro­jets en Ser­bie ? Penses-tu que des pro­jets in­té­res­sants vont venir du ci­néma serbe ?

Da­nica Cur­cic : Jus­qu'à main­te­nant, je n'ai rien de prévu en Ser­bie, mais le mi­lieu du ci­néma y est très pro­met­teur. J'ai vu le film Clip (2012) et je l'ai trouvé très puis­sant et di­rect. C'est le por­trait de deux gé­né­ra­tions dif­fé­rentes - une nos­tal­gique, l'autre es­sayant de sur­vivre dans un pays dé­truit. Je suis aussi im­pa­tiente de voir Kru­govi (Circles, 2013) avec Ni­kola Ra­ko­ce­vic qui est aussi un Eu­ro­pean Shoo­ting Star cette année. J'ai en­tendu dire que c'était gé­nial. Sinon, Un­der­ground de Kus­tu­rica est à mon avis l'un des plus grands films serbe de l'his­toire. J'ado­re­rai tra­vailler avec lui. Je ne l'ai pas en­core contacté, mais je pense que je le ferai.

CA­FE­BA­BEL PAR­TI­CIPE A LA 64ème BER­LI­NALE

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Translated from ‘Madness is normal’: An Interview with Danica Curcic