Crise grecque : récit d'un jour de grève (parmi d'autres) à Athènes
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Sabine OstarcevicQuiconque s'est rendu en Grèce récemment a pu constater que les grèves sont aussi nombreuses que spontanées et souvent non-déclarées... Pour plus d'impact. En face, la justice a déclaré ces mouvements « d’illégaux». Pas de quoi les freiner, au contraire. Jeudi 15 juillet, contrôleurs aériens et employés d'hôpitaux ont cessé le travail.
La semaine précédente, tous les transports publics ont été immobilisés pendant 24 heures à Athènes, tandis que les annulations aléatoires dans les aéroports grecs se sont multipliées. Retour sur un torride jeudi 8 juillet. Un jeudi parmi d'autres ?
Strike, απεργία, grève… Jeudi 8 juillet, le nom donné au désespoir du peuple grec face aux mesures de rigueur économique avait peu d’importance. Pour la deuxième fois en 15 jours, en parallèle à une session parlementaire durant laquelle était votée une loi prévoyant la baisse du salaire minimum de 740€ bruts à 592€ brut, tous les transports publics ont été immobilisés pendant 24 heures. En outre, une grande partie des vols programmés ce jour-là ont été annulés à l’aéroport de Venizélos, à Athènes, en raison d’une grève des contrôleurs aériens.
Le nettoyage de la fonction publique
Le 1er juillet dernier, la TVA (ΦΠΑ) a augmenté pour la deuxième fois consécutive, passant de 21 % à 23 % sur les produits tels que l’alcool, le tabac, l’essence et les articles de « seconde nécessité ». En l’espace de quatre mois, les Grecs ont subi une augmentation de 4 % du prix de leurs achats. Et parce que la récession est aussi sociale, le salaire des fonctionnaires a été réduit de 9 à 15 % dans tous les secteurs. Les concours de la fonction publique ont été suspendus, à l’exception des pôles sanitaire et éducatif. Enfin, cerise sur le gâteau, les retraites ont été gelées. Et la rumeur court qu’à partir de septembre, le secteur privé sera touché directement par d’autres séries d’ajustement.
Dimitria Yianikopulu, responsable du magasin « Ifos Fashion » de Corinthe, est d'ores et déjà résignée. Elle explique que cette année, par rapport à l’exercice précédent, ses ventes ont chuté de 20 %, chiffre qui pourrait atteindre 30 % en raison de la hausse de la TVA et de la coupe franche dans les salaires des fonctionnaires. Son désarroi est total. Comme l'est celui de Panagiotis, un pilote de l’armée spécialisé dans l’extinction des incendies qui préfère ne pas divulguer son nom de famille. Il se dit très inquiet car le budget destiné au contrôle des feux en Grèce a été réduit de cinq à deux millions d’euros pour cet été. « Ce qui est très dangereux », précise-t-il, dans un pays particulièrement assujetti aux embrassements forestiers entre les mois de mai et d’octobre.
« Les fonctionnaires ne font rien, il faut leur donner une leçon, c’est pour cette raison que je travaille désormais dans le secteur privé »
Face au mécontentement quasi-général, Nicoletta, employée dans l’agence de voyages Skliris Travel à Corinthe, assure, qu’en dépit d’une diminution des affaires de 20 % en un an, elle est tout à fait d’accord avec le « nettoyage » de la fonction publique initié par le gouvernement. Nicoletta a travaillé l’an dernier à l’Organisation nationale du tourisme (EOT en grec) et « confesse » que les 1 200 euros qu’elle touchait pour son travail était un « salaire très gonflé ». Elle approuve donc la réduction de ce montant à 900 euros. « Les fonctionnaires ne font rien, il faut leur donner une leçon, c’est pour cette raison que je travaille désormais dans le secteur privé » ajoute-t-elle.
Dilemme syndical : avec ou sans le peuple ?
L’un des principaux syndicats du pays, le PAME (ΠΑΜΕ), a manifesté quasiment une fois par semaine ces derniers mois. Le 6 juillet dernier, sur la place Syntagma à Athènes, profitant de la disponibilité d’acteurs et de groupes de musique célèbres tels que Majezitsas Lavzentis, la formation a de nouveau défendu son engagement auprès du peuple hellène malgré la « mauvaise presse » dont il a fait l’objet. Giorgos Korkulis, membre de ce groupe, estime qu’il est nécessaire de « faire quelque chose », car la situation est « insupportable ». « Je crois qu’intervenir auPirée (le port d’Athènes) ou bloquer de temps en temps une rue n’est pas aussi grave que de ruiner le pays. Que ferons-nous si nous perdons tout pouvoir d’achat ? » La justice du pays a qualifié « d’illégaux» les différents mouvements de protestations qui se sont produits en Grèce. Ce qui divise l’opinion publique entre partisans des syndicats et leurs opposants.
Les grèves sont elles « illégales » ?
Un autre Panagiotis, chauffeur de taxi athénien, qui fréquente la route menant à l’aéroport, est radicalement opposé à ces « journées absurdes et vides », car il pense qu’elles ne servent qu’à gêner les touristes, en pleine période estivale, alors qu’ils contribuent à 20 % du PIB du pays. Pourtant, les compagnies aériennes, les compagnies maritimes et même le gouvernement promettent le remboursement intégral du coût du billet, ou une nouvelle date pour voyager. Au choix du passager.
Photos: Une: ΠΡΙΝ / Flickr); Aéroport et manifestation ©Clara Fajardo
Translated from El segundo incremento de IVA en Grecia paraliza el país