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Connaissez-vous vraiment Martin Scorsese?

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La ParisienneCulture

Du 14 octobre au 14 février 2016, la Cinémathèque française consacre une exposition ainsi qu'une rétrospective de l'auteur de Taxi Driver et des Affranchis. Retour sur un cinéaste passionné qui pense et respire le cinéma.

Que l'on veuille ou non, l'automne  2015 sera inévitablement scorsésien. Alors qu'il finalise la post-production de son prochain film Silence, avec Liam Neeson et Andrew Garfield, ainsi qu'une nouvelle série pour HBO, Martin Scorsese sera à l'honneur à la Cinémathèque française qui lui consacre une exposition et une une rétrospective intégrale de ses films, ainsi qu'à l'Institut Lumière de Lyon qui lui décernera son prix Lumière pour couronner l'ensemble de son oeuvre.

Un emploi du temps ô combien chargé quand on sait qu'en parallèle, le cinéaste âgé au aujourd'hui de 72 ans travaille d'arrache-pied à la restauration et la conservation du cinéma de patrimoine au sein de ses deux organisations : la Film Foundation et la World Cinema Foundation. Pourtant, Martin Scorsese paraît infatigable. Lors de la conférence de presse qui s'est tenue à la Cinémathèque française le 12 octobre dernier, il est apparu plein de vigueur, généreusement éloquent, ravi de pouvoir conversver autant sur son travail de metteur en scène que sur les auteurs qui ont eu un impact décisif sur sa vie (Hitchcock, Hawks, Pasolini...).

De l'asthme et du dessin

Car Martin Scorsese est avant tout et depuis toujours un cinéphile boulimique, parcourant le cinéma à travers les époques et les frontières. Petit-fils d'immigrants siciliens, Scorsese nait le 17 novembre 1942 à Fluhing (Long Island). Asthmatique, il ne peut faire du sport avec ses camarades de quartier et est contrait de pratiquer des activités moins physiques à savoir fréquenter assidûment les salles obscures ou regarder la télévision de ses parents, dévorer aussi bien les classiques que les séries B, les westerns, les films bibliques, le néo-réalisme italien... S'il délaisse parfois les écrans, c'est pour se consacrer à un autre passe-temps, le dessin. Il esquisse ainsi des affiches de films fantasmés (comme un film biblique au casting cinq étoiles) et crée les story-boards de projets en devenir.

'Vinyle', la nouvelle série pilotée par Martin Scorsese 

C'est l'un des aspects les plus intéressants de l'exposition Scorsese : hormis les photos de tournages, de familles, les costumes exposés ou les extraits de films commentés, nous pouvons découvrir le travail préparatoire de certains séquences devenues célèbres telles que le combat entre Jake LaMotta et Sugar Ray Robinson dans Raging Bull: un découpage technique dynamique, brutal et précis, inspiré de la célèbre scène de la douche de Psychose. « J'ai l'habitude de penser en termes de séquences, d'anticiper en termes de séquences montées », dixit le cinéaste. Ces documents précieux permettent d'illustrer la méticuloisté de sa mise en scène, longuement réfléchie, où chaque plan y est conçu comme un tableau vivant richement composé et le film comme un ensemble harmonieusement organisé et fluide. 

Les dieux modernes

L'exposition se décompose en cinq thématiques, dont l'une permet de mieux saisir toute la complexité du héros scorsésien type en partant des origines italo-américaines du cinéaste : sa jeunesse passée dans le quartier populaire de Little Italy à New York est fortement marquée par la religion catholique. Il décide même d'entrer au séminaire préparatoire de la 86ème rue, mais son amour du rock entraîne son renvoi. Toutefois, la foi gardera une place prépondérante dans son oeuvre: Foi en l'homme, foi en l'humanité. Mais comment avoir foi lorsque l'on vit au sein même du chaos ? Comment être un homme bon si l'on est aussi violent que ses semblables ? C'est la quête désespérée de Charlie (Mean Streets), petit malfrat fasciné par Saint-François d'Assise, qui tente par tous les moyens de sauver son ami Johnny Boy, tête brulée qui finit par s'attirer le courroux de la mafia. C'est aussi le quotidien de Frank Pierce (À tombeau ouvert), ambulancier dépressif parcourant les bas-fonds de New-York pour sauver les âmes perdues afin de mieux racheter la sienne.

Est-il vraiment possible de trouver la rédemption dans ce monde corrompu ? Quelque soit les intentions de ses personnages, le monde selon Scorsese est régi par la volonté d'être toujours plus puissant que le commun des mortels, quitte à s'imposer par la violence. Les dieux modernes, ceux qui dictent dans quel sens le monde doit tourner, ce sont les gangsters de New York, la mafia de Las Vegas, ou les traders de Wall Street. Mais tout  récit d'ascension fulgurante et impitoyable, on finit fatalement par se brûler les ailes. Même pour les salauds, l'enfer est sur Terre.

Rares sont les cinéastes à conserver une telle vitalité de création comme Martin Scorsese. Un cinéaste qui a su s'approprier les codes du langage cinématographique pour créer une oeuvre unique, majeur, tout en rendant hommage dans chacun de ses films aux auteurs qui l'ont formé. Un cinéphile et passeur averti pour qui l'histoire du cinéma est constamment en train de s'écrire et dont il faut à tout prix préserver la mémoire. En somme, un grand homme de cinéma qu'il faut absolument (re)découvrir.

Exposition Martin Scorsese, à la Cinémathèque française de Paris du 14 ocotbre 2015 au 14 février 2016

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Cet article a été rédigé par la rédaction de La Parisienne. Toute appellation d'origine contrôlée.