Biélorussie l’inconnue
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Ursula MonnierIl y a deux ans quand je voyageai pour la première fois mais malheureusement jusqu’à présent la dernière en Biélorussie tout me paraissait effrayant. Un professeur décrivit le pays comme « le Jurassic Park du socialisme ». Mais finalement, des amitiés naissant, je pus jeter un coup d’œil derrière une frontière toujours omniprésente.
La Biélorussie ou Belarus, mieux connue dans les contrées d’Europe centrale sous les noms de Russie blanche ou Ruthénie blanche, se trouve à l’Est de l’Europe entre l’Ukraine, la Pologne, la Lituanie, la Lettonie et la Fédération de Russie. La capitale Minsk, son centre culturel, économique et politique, est située au cœur de la république. Hormis la plus grande place d’Europe, la Place de l’Indépendance (de 7 ha), on y trouve aussi une des plus grandes bibliothèques d’Europe, la Bibliothèque Nationale, de 72 m de hauteur et tout à fait intéressante d’un point de vue architectural. La ville est riche en musées et institutions culturelles et possède une architecture unique. Après avoir été détruite en grande partie à la fin de la deuxième guerre mondiale, la ville fut après guerre entièrement imaginée sur le papier : des rues sans fin, larges et droites, des places soigneusement conçues, des monuments de style soviétique, des bâtiments de prestige et des immeubles d’habitation. Tous les clichés concernant l’Union Soviétique et qui ne sont plus d’actualité dans la Russie d’aujourd’hui semblent avoir survécu en Belarus.
Faire des études en Biélorussie
En 2012 l’Union Européenne exclut la Biélorussie à plusieurs reprises du Processus de Bologne suite à l’isolation du pays, en partie voulue politiquement. La raison invoquée : La Biélorussie manquerait de possibilités de participation estudiantine et surtout de liberté scientifique. Felix Ackermann écrivit dès 2012 dans une édition des Études Biélorusses : « La Biélorussie représente ainsi le seul pays européen d’une certaine taille qui ne participe pas au processus de Bologne. » Alors que l’Université d’État de Biélorussie peut tout à fait se comparer à d’autres institutions européennes dans le domaine linguistique par exemple, même si les enseignants sont scandaleusement sous-payés.
Sacha étudie l’informatique à l’Université d’État de Biélorussie, la BGU, Belarusskji Gosudarstvennyj Unversitet. « Je voudrais travailler comme programmeur, de préférence quelque part en Europe », dit-il. Beaucoup de jeunes de son âge partagent ce souhait, les salaires en Belarus étant extrêmement bas par rapport aux coûts de la vie. Il n’est guère possible de faire des études sans bourse d’état, et celui qui en profite doit ensuite travailler pendant deux ans dans une entreprise imposée par l’état. « Le niveau de vie est meilleur en Europe et il y a davantage de possibilités de s’épanouir » selon Sacha. Beaucoup de jeunes gens quitteraient donc la Biélorussie. « Tous les jeunes gens intelligents veulent étudier et travailler en Europe ! »
À l’antipode de la BGU, l’EHU, l’Université Européenne des Humanités, créée en 1992, met en œuvre depuis sa création de nouvelles formes de participation et de recherche indépendante dans les études de langues et de sciences humaines proposées. L’EHU fut d’abord une tentative de rapprochement du système de Bologne, interrompu en 2005, accompagné de mesures de rétorsion contre cette université. Depuis 2006 le siège de l’EHU se trouve à Vilnius et elle est officiellement accréditée comme école supérieure lituanienne. Mais pour de jeunes bélarusses elle représente toujours la seule possibilité de faire des études compatibles avec le processus de Bologne en langue bélarusse, russe ou anglaise.
La guerre et la destruction
L’histoire de la république bélarusse est longue et douloureuse. Après son âge d’or économique et culturel sous le royaume de Pologne-Lituanie jusqu’à la fin du 18e siècle, la région bélarusse tomba entièrement sous la domination de l’Empire russe suite aux deux premiers partages de la Pologne. Après la première guerre mondiale elle fut séparée et convoitée par la Pologne et la jeune Union Soviétique. La République Soviétique Socialiste Bélarusse fut créée à partir de la partie soviétique à la quelle l’armée rouge incorpora le côté polonais à la fin de la deuxième guerre mondiale.
La deuxième guerre mondiale provoqua des dégâts incroyables en Biélorussie. La résistance contre l’occupant nazi fut massive, pendant des semaines l’artillerie lourde combattit les partisan(e)s cachés dans la multitude des forêts et marais du pays. L’exemple le plus connu est celui de Khatine (à ne pas confondre avec Katyń !) où les SS lors d’une persécution d’une troupe de partisan(e)s regroupèrent tous les habitants dans une grange, l’enflammèrent et tirèrent sur tous ceux qui tentaient de s’enfuir du bâtiment en flammes. D’après la légende un seul homme, se trouvant en forêt, survécut. A son retour il découvrit le village anéanti par les flammes et les cadavres des habitants dans les restes de la grange. Il y retrouva aussi son fils qui par miracle était encore vivant et finit par mourir dans les bras de son père. Aujourd’hui s’il y a à Khatine un mémorial pour les plus de 5000 villages biélorusses détruits par la Wehrmacht c’est aussi pour relativiser les atrocités commises par l’armée rouge.
Pendant les trois années de l’occupation allemande entre 1941 et 1944, environ un quart de la population mourut. Environ 10 millions de personnes vivaient en Biélorussie avant la guerre, ce chiffre ne fut atteint à nouveau que dans les années 1980.
Présence et avenir
La Biélorussie devint un état indépendant en 1991 au moment de l’effondrement de l’Union Soviétique. A la différence de tous les autres états membres de la Communauté des états indépendants, la Biélorussie ne recourut pas au drapeau de l’ère pré-soviétique, mais adopta en 1995 à nouveau le drapeau de l’époque soviétique. Stanislav Chouchkievitch, scientifique et inventeur apprécié, fut élu chef d’état avant même la dislocation de l’URSS en 1991.
Trois ans plus tard il fut accusé de corruption par Alexandre Loukachenko. Stanislav Chouchkievitch perdit le vote de confiance décisif et fut remplacé par Alexandre Loukachenko. Plus tard ces accusations s’avérèrent infondées.
De nos jours la Biélorussie fait partie des états les plus isolés au monde. Des observateurs internationaux reprochent au président Alexandre Loukachenko l’arbitraire et la corruption. La liberté de réunion par exemple n’y existe pas.
La langue bélarusse fut complètement supplantée par le russe dans la vie quotidienne de ces dernières années, à l’exception peut-être des stations du métro, lesquelles ont toujours gardé leurs noms bélarusses. Quand on demande son chemin, les gens utilisent la terminologie russe ce qui peut conduire en erreur les personnes non familières de l’endroit. A la campagne s’il ya davantage de possibilités d’entendre le bélarusse, les gens parlent plutôt la trasianka, un mélange de bélarusse et de russe, dont les locuteurs ne maitrisent bien souvent ni l’une ni l’autre des deux langues.
Alexandre Loukachenko lui-même fut longtemps soupçonné de ne pas parler le bélarusse, son discours d’investiture fut longtemps le seul discours qu’il ait jamais proclamé dans cette langue. Finalement, en 2014, dans le contexte de la crise ukrainienne, il en prononça un deuxième lors de la journée de l’indépendance de la Biélorussie suscitant ainsi polémique et rumeurs à savoir si, eu égard à la politique agressive des Russes en Ukraine, il ne craignit pour l’indépendance de la République.
« Illumine le pays »
Non, le règne d’Alexandre Loukachenko n’est pas accepté sans résistance en Biélorussie, surtout depuis l’aggravation continuelle de la situation économique. Plus de quatre ans ont déjà passé depuis les dernières grandes manifestations perçues en Europe de l’Ouest de façon pertinente.
En 2010, après des élections présidentielles critiquées par des observateurs internationaux, les gens descendirent dans la rue et manifestèrent en faveur d’élections libres. « Quand les premiers résultats du scrutin furent publiés il était évident pour tous que les hommes au pouvoir se détournèrent à nouveau de leur peuple. Puis la police a commencé à nous tabasser et à arrêter certains d’entre nous de façon arbitraire », explique une femme témoin des évènements de 2010.
En 2012, deux ans plus tard, sortit le film polonais « Viva Bélarus ! » de Krzysztof Lukaszewicz et Franak Viachorka ayant entre autres pour sujet les évènements de la Plošča en 2010. Plošča veut dire place et il est ici question de la place de l’indépendance sur laquelle se déroulèrent les manifestations.
Ce film, récompensé plusieurs fois, entraina l’interdiction du territoire bélarusse pour ses réalisateurs, tant la critique de la répression de l’état, du système Loukachenko et de ses conséquences y est incontestable, aussi bien dans le scénario que dans la bande son.
Une chanson du film fut écrite par Lavon Volski, un membre du groupe bélarusse Liapis Troubetskoï qui a un grand succès dans toute la région slave et même au-delà. Les paroles de la chanson disent entre autres (traduit par l’auteure et donc retraduit) :
L’état veut dire guerre pour un général. Pour un jeune l’état est un fléau. Pour un radical l’état est une prison, mais pour la majorité il n’y a pas d’état.
[…]
Redonne vie à ta patrie, elle dort d’un sommeil de mort. Redonne vie à ta patrie, elle est recouverte de neige grise. Incendie les ponts et illumine le pays. Incendie les ponts et illumine le pays.
Translated from Belarus, die Unbekannte