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Autriche : plus dure sera la chute

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Amélie Marin

Politique

[OPINION] « Trop de blabla idéologique ». C'est l'opinion de Wolfgang Glass, politologue viennois, au regard de l'élection présidentielle du 4 décembre dont est péniblement sorti vainqueur l'ancien chef des Verts Alexander Van der Bellen avec 51,7% des voix face au candidat d'extrême droite Norbert Hofer (FPÖ).

En janvier de cette année, personne n'aurait cru à une élection présidentielle entre un candidat d'extrême droite (Norbert Hofer, FPÖ) et un candidat vert (Alexander Van der Bellen), et que tous deux auraient des chances de l'emporter. Les responsables des médias traditionnels et les chercheurs doivent se rendre à l'évidence et admettre qu'une majorité de personnes se réfugie dans une certaine réalité médiatique sur laquelle ils n'ont plus aucune influence. Les faiseurs d'opinion du bistro d'autrefois se trouvent aujourd'hui sur Internet. Ce qu'ils pensent se retrouve renforcé et mis en évidence à coups de spambots (un robot conçu pour envoyer du spam, ndlr). L'être humain disparaît de plus en plus et laisse sa place à des machines capables de produire de faux messages en quantités industrielles. Le meilleur exemple en est l'élection présidentielle américaine avec cet atelier de faux messages basé en Macédoine. De simples connaissances en programmation suffisent pour créer un spambot.

Internet représente-t-il alors un danger pour la démocratie ?

Si l'on ne s'occupe pas de la compétence médiatique du peuple, certainement. Les médias sociaux pourraient aussi bien être une chance pour la démocratie si l'on s'en occupait sérieusement et si l'on considèrait enfin ces réseaux comme de véritables médias. Quand aujourd'hui, des socialistes de la gauche caviar disent qu'il est de bon ton de laisser la « classe ouvrière » cracher son venin et que dans le même temps ces derniers s'offusquent du moindre gros mot sur le Net en parlant de « haine », ça ne fait pas beaucoup avancer le schmilblick.

Cela ne sert à rien de brandir l'étendard de la morale contre des choses qui ne nous conviennent pas. Lancer des propos diffamatoires mérite évidemment un lynchage social. Mais si quelqu'un, pour des considérations philosophiques, souhaite éclaircir certaines choses, il doit pouvoir le faire sans craintes.

Le changement a du bon. Personne ne peut penser sérieusement que tout doit rester comme « au bon vieux temps ». Comme autrefois, quand le « bon sens commun » (qui était plutôt le reflet des préjugés de l'époque) existait encore. Il faut pouvoir discuter sans craintes des problèmes et des peurs qu'apportent les changements. Car il n'y a pas toujours que du positif et tout n'est pas toujours compréhensible aux yeux de Monsieur et Madame Tout-le-monde.

Plus grand sera le fossé

Un élément sociologique transcende chaque élection désormais : le vote de la province face à celui de l'« avant-garde urbaine » autoproclamée, qui bosse, loin des autres, dans ses bureaux climatisés. Mais le peuple n'est pas qu'un simple contribuable. De plus en plus de gens se sentent abandonnés. Si les faramineuses mises en scène de l'appareil de l'État (les réformes administratives) ne changent pas fondamentalement, les standards ne pourront plus être soutenus. On en arrivera à des conflits entre jeunes et vieux, entre parents et couples sans enfants, entre villes et villages, entre étrangers et indigènes.

L'accent porté par chacun des deux camps sur la personnalité des candidats à la présidentielle n'avaient rien à voir avec les problèmes d'avenir. On a également cherché à effrayer l'électeur en jetant en l'air des thèmes bien choisis. On a évoqué les nazis qui pourraient ressurgir, le fameux « establishment » qu'il faut affronter. On a connu des débats houleux qui déformaient en partie les propos des candidats.

Beaucoup de bruit pour rien

Il devait y avoir des interventions intelligentes de la Cour des Comptes et consorts, qui auraient pu servir de matière à penser. Une « assemblée de l'Autriche » a siégé pendant des années, avec des interventions intéressantes concernant l'organisation du futur plutôt que de toujours ressortir les mêmes schémas sur le clivage gauche/droite. Si nous continuons à « boulevardiser » les défis de la société actuelle plutôt que de les affronter, nous passerons alors du statut de peuple à celui de population. En tant que peuple, on partage encore un peu de valeurs, on se réunit autour d'un compromis, si important dans une démocratie. Dans une population, on vit les uns à côté des autres sans devoir avoir quoi que ce soit en commun - comme dans un hameau avec une accumulation aléatoire de personnes au lieu de maisons.

À l'occasion de l'élection du nouveau président autrichien, il y avait beaucoup trop d'ethos et de pathos dans l'air - beaucoup trop de « blabla idéologique » stérile. Les défis majeurs de notre avenir sont malheureusement de nouveau relégués au second plan.

Translated from Österreich: Die Kluft wird größer werden