Adrien : humain, trop humain
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Notre webmaster s’en va après avoir sniffé plein des lignes de codes. La tête pleine de bits, j’upload près trois ans de vie publique commune. Entre des gifs, du son, Roland Garros et beaucoup de cigarettes.
Le mec qui répare l’Internet, c’est un peu comme ton parrain : on sait pas trop ce qu’il fout mais il est censé être là dans les moments importants. À cafébabel, plus que dans tous les autres sites d’informations, c’est même devenu un justicier : un gars capable de sortir du bois pour t’expliquer que là en fait, ton clique-droit il est pas bon et que tu viens de télécharger une page web au lieu d’une image. Tout ça en six langues.
On dit souvent que le Net est fondé sur une composition binaire. C’est vrai pour ceux qui le font, pas pour ceux qui l’utilisent. D’autant plus quand les personnes qui essaient de faire le bien viennent d’univers aussi variés qu’un blog sur les lol-cats. Quand vous éduquez les gens à l’Internet au sein d’un magazine européen, vous pouvez facilement tomber sur une Polonaise qui vous demande comment on fait pour imprimer Wikipédia, un Italien qui s’auto-interroge sur la possibilité de raccourcir un lien raccourci, une Allemande qui cherche un hashtag sur son pavé numérique ou un Anglais qui vous demande d’aller trouver un fichier source dans un desktop qui ne veut plus rien dire.
Roland Garros, des disquettes et plein d'éoliennes
Le truc, à cafébabel, c’est qu’on aime également varier les plaisirs. Certains d’entre vous s’en seront sûrement aperçus, on ne cherche pas qu’un mec qui répare l’Internet. On prospecte des profils capables de faire une infographie lisible sur la pêche aux gros, d’arranger la connexion skype pour une interview en direct avec la Biélorussie, de faire renaître un Atari SC1224 pour le prochain stagiaire, de brancher une souris à une prise murale, de télécommander la machine à café, de classer des disquettes sur les discours de Jacques Delors et – le pire de tous – de s’occuper de la politique photo du mag.
J’ai l’intime conviction que si notre cher pompier du numérique s’en va aujourd’hui, c’est aussi parce qu’il fuit les goûts et les couleurs de l’Europe. Comprendre : la tentation (souvent très anglo-saxonne) de caler des éoliennes, des couchers de soleil, des animaux et des gens tout gris en costards-cravates en Une. En près de 3 ans, comme certainement beaucoup de graphistes en France, notre homme est allé vomir plusieurs fois avant de valider une photo. Il m’a souvent beaucoup confié que, du coup, le boulot à cafébabel, c’était surtout un travail de longue haleine.
En 4 paragraphes un peu longs, vous aurez compris que l’importance du mec qui répare l’Internet sonne aussi fort que la classe de son nom de poste : « webmaster ». Ou l’image d’un super-héros un peu incompris qui vengerait - IRF - une bande d’ignares à coups de méga-bits.
Mais en vrai, Adrien le Coärer est un homme comme les autres. Soit un mec qui dit « merde » quand il n'arrive pas à télécharger, qui met son casque quand on lui demande pourquoi ça rame, qui va fumer une clope quand la deadline pour son illu est dans 5 minutes. Un mec qui s’envoie tous les trailers des sorties de la semaine sur grand écran, qui connaît par cœur l’évolution du tableau de Roland Garros en mai et le classement général du Tour de France en été. Adrien le Coärer, même avec un nom de bot, est finalement humain, trop humain. Et c’est sans doute ça qui va beaucoup nous manquer.