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Vrai débat européen dans les médias

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Les débats sur l'adoption de la Constitution européenne ont souvent mis l'Union au coeur des discours médiatiques. Malgré tous les défauts qu’on leur attribue, ces discussions ont rapproché l’Europe de ses citoyens.

Une démocratie passe nécessairement par l’information, la plus abondante possible, des citoyens. En cela les médias sont garants du système. Considérer l’Union européenne comme un espace démocratique revient à placer une part des responsabilités entre les mains des journalistes européens qui assumeraient ce rôle avec plus d’enthousiasme si cela n’était pas si compliqué. Comment intéresser le public, lui donner des points de repère, lorsque l’UE représente un amas opaque d’institutions et de centres de décision entrelacés ? Et comment faire comprendre une Constitution européenne de 448 articles quand les journalistes n’appréhendent pas toujours eux-mêmes les enjeux ?

Autre tournure

Les médias abordent les problématiques européennes, les institutions et leurs membres de manière parfois simpliste : soit en utilisant le jargon technique eurocrate, soit en déployant une palette de termes génériques, tels « Bruxelles », « Strasbourg », « les vingt-cinq »… Mais il n’est pas facile d’éviter les discours stéréotypés. L’information sur l’Union se réduit souvent aux positions des leaders nationaux ou elle est envisagée comme un ensemble de lois et directives, face à laquelle les citoyens ne se reconnaissent pas en tant qu’interlocuteurs.

Cependant, depuis que l’Union s’est engagée dans le processus d’adoption de la Constitution, les débats ont pris une tournure différente. Et même si chaque Etat membre a réagi à sa manière, on ne peut nier que le contenu des discussions s’est modifié, voire enrichi.

A l’approche du référendum, les colonnes des journaux français ont perdu leur caractère consensuel et ont été remplies par des arguments socio-économiques mais aussi idéologiques, comme en témoigne la polémique soulevée par les liens entre le texte de la Constitution européenne et la directive Bolkenstein qui vise la libéralisation des services. Le traitement de l’information s’est fait plus en profondeur et les médias ont peu à peu été contraints d’expliquer les enjeux du texte en détails, reprenant la formulation de certains articles du Traité, parfois sujette à interprétation .

Evidemment les enjeux politiques nationaux et les stratégies personnelles des représentants français ont également pimenté le débat. En cela, on ne peut pas considérer que les médias en France aident à l’émergence d’un « modèle de débat démocratique ». Mais on se prend à espérer que la passion gagnera l'opinion publique dans les pays qui passeront par la voie référendaire prochainement. Ce n’a malheureusement pas été le cas de l’Espagne, où les journalistes, comme les électeurs, n’ont sans doute pas eu le temps de comprendre l’importance du vote.

Euroscepticisme ou euro-ignorance?

Pourtant les analystes n’ont pas interprété le taux d’abstention élevé lors du vote du référendum en Espagne (le 12 février) comme de l’ « euroscepticisme ». Les électeurs se sont plutôt dits peu ou pas informés de ce qu’impliquait la Constitution, la désinformation constituant la première cause du taux d’abstention. Le gouvernement espagnol, en faveur du Traité, a choisi de monter une campagne plutôt sensationaliste, réduisant le vote à un « oui » ou un « non » à l’Europe en général et laissant de côté les effets concrets du texte. D’après une enquête menée par le Centre de Recherches Sociologiques (CIS), le manque d’information a compté pour 25% des « non » et pour 44% des abstentions. La même étude a révélé que seulement 7,4% des Espagnols pensaient que l’adhésion du pays à l’Union n’avait pas été bénéfique, prouvant le fort sentiment euro-enthousiaste de la population espagnole. Ce référendum en particulier paraît ne pas avoir été mené correctement. La complexité du texte de la Constitution, associée au manque d’explications, a posé des problèmes à beaucoup d’électeurs. L'Espagne était le premier pays à organiser le vote du Traité par voie référendaire, ce qui a sans doute amené le gouvernement de José-Luis Rodríguez Zapatero à considérer la campagne avec trop d'empressement.

Tout le monde d’accord

Le Bundestag (Parlement allemand) a adopté la Constitution le 12 mai dernier avec 569 voix contre 23 et 2 abstentions. Une partie du CSU, union chrétienne sociale bavaroise, a été le seul parti à se prononcer contre le Traité. L’absence d’opposition a évincé la plupart des débats sur le contenu du texte. Certains ironisent en disant que les Allemands en auraient plus sur la position de Schröder s’ils étaient venus l’écouter soutenir Chirac fin avril, qu’en lisant la presse nationale. Les discussions ont surtout abordé la question du référendum. La proposition d’organiser un référendum avait été lancée par la coalition majoritaire entre les sociaux-démocrates et les verts mais a été rejetée quand les chrétiens-démocrates du CDU se sont prononcés contre son introduction.

Les pays appelés à adopter la Constitution seront évidemment influencés par les décisions des autres Etats membres. Il est donc temps de se préparer et de s’informer, grâce à des explications claires et honnêtes, sur les véritables enjeux de la Constitution. Et force est de constater que, jusqu’à présent, la France qui a choisi la voie du référendum, est parvenue à engager la discussion. Sensibilisés aux affaires européennes et mieux informés sur le contenu du Traité, les Français n’ont plus qu’à lutter contre la prise en otage de la Constitution par les politiques intérieures.