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Ukraine: de la révolution à la désillusion

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Default profile picture ana soriano

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Le limogeage du gouvernement de Ioulia Timochenko par le président Victor Ioutchenko a ouvert la campagne électorale pour les parlementaires en Ukraine. Les querelles entre oligarques engendreront-elles la fin du rapprochement avec l'Ouest ?

Crise politique en Ukraine. La démission le 3 septembre dernier d’Oleksandr Zinchenko, chef du cabinet de Victor Iouchtchenko fait suite à la dissolution du gouvernement de Ioulia Timochenko, que beaucoup en Europe considèrent comme l’instigatrice de la révolution pacifique qui a gagné l’Ukraine en décembre 2004. Ont suivi les démissions du chef du conseil de sécurité et de défense, Petro Poroshenko et du vice-premier ministre Mykola Tomenko. C’est Yekhanourov, l’ancien ministre de l’économie sous le régime de Leonid Kouchma, qui a été nommé au ministère de l’Intérieur.

Ce conflit est la conséquence de la duplicité caractérisant le gouvernement ukrainien depuis son arrivée au pouvoir. Napoléon décrivait ainsi les révolutions comme des cercles vicieux débutant par un excès et s'y achèvant. La citation ne s’applique peut-être pas complètement au dernier épisode de la saga ukrainienne, initiée avec la victoire de Iouchtchenko en 2004. Néanmoins, nombreux sont ceux qui voient dans le leader charismatique de cette révolution de velours un véritable Saturne sur le point de dévorer ses propres enfants et de leur infliger les fléaux contre lesquels ils ont lutté.

La princesse du gaz et le roi du chocolat

Aux racines du conflit, la « Rada », soit la chambre parlementaire ukrainienne, marquée par l’influence de l’oligarchie locale, qui finance certains groupes politiques et a même ses propres partis. Une guerre des clans bien ancrée dans la vie politique nationale puisqu’elle existait déjà au temps du précédent gouvernement corrompu Kouchma. Cette rivalité explique le manque de cohésion d’un cabinet ministériel qui n’a pas tenu plus de sept mois avant de se disloquer.

Ioulia Timochenko et Petro Porochenko sont eux-mêmes issus de cette oligarchie. La première, érigée au rang d’héroïne politique, véritable « Marianne à tresses » par la presse occidentale, est connue dans son pays sous le surnom de « princesse du gaz ». Parrainée par l’ancien ministre Lazarenko, qui purge actuellement une peine de prison à San Francisco pour blanchiment d’argent, Ioulia Timochenko a dirigé de 1995 à 97 la « SEU » (le système énergétique ukrainien) et a monté son propre parti politique « Batkivshchyna » (« Patrie ») en 1999. Quand à Porochenko, surnommé « le roi du chocolat » pour son activité dans l’industrie de la confiserie, il a collaboré au financement de la révolution et a favorisé sa diffusion à travers sa propre chaîne de télévision. Iouchtchenko lui-même était le responsable à Kiev de la Banque mondiale dans les années 1990. Ces informations, à peine évoquées par les médias européens au cours du changement de gouvernement, ont au contraire été largement souligné par la presse orientale et notamment russe. Les échecs gouvernementaux successifs pour reprendre le contrôle des entreprises privatisées par Kouchma ont également déclenché la crise actuelle. Une situation d´impuissance facile à comprendre vu la complexité des réseaux forgeant la sphère politique et économique de cette ancienne république soviétique.

Les répercussions externes de la crise

Selon les observateurs, ces soubresauts politiques marquent le coup d’envoi de la course aux élections législatives de mars 2006. Ioula Timochenko a déjà annoncé qu’elle concourrait dans une autre équipe que celle de Iouchtchenko, alors que selon des rumeurs croissantes, certains députés du parti de Iouchtchenko se présenteraient sur la liste de l’ancienne Premier ministre. Les médias orientaux doutent d’ailleurs de la capacité de l’actuel président à tenir les rennes du gouvernement et l’accusent, avec son ancienne ministre, d’être lui-même à l’origine de la crise : lui, de sauver la face devant les accusations de corruption qui entourent son projet et elle, de s’engager sur le chemin de la présidence.

L’échéance électorale sera l’occasion d’apprécier la maturité politique du pays. Le déroulement des législatives sera décisif pour l’avenir de l’Ukraine, tant sur le plan de la politique intérieure que concernant sa candidature à l’UE et à l’OTAN. Lors des dernières élections, l’UE n’a jamais caché sa sympathie pour le projet de Iouchtchenko, face à son adversaire proche de Poutine, Ianoukovitch. Pour l’UE et le reste de l’Occident, le processus de réforme politique en Ukraine devait servir d’exemple à la Russie, alors que le Kremlin se résigne à perdre son influence sur un territoire qui appartenait à son « empire » depuis le 18ème siècle. Désormais, l’intégration potentielle de l’Ukraine dans l’Union passe par la consolidation de sa stabilité politique et économique. Bush lui-même a annoncé que l’intégration à l’OTAN de l’Ukraine et des Balkans, qui placera les frontières de l’Alliance aux portes de la Russie, devrait attendre au moins 2008.

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Translated from Ucrania: la Revolución Naranja se destiñe