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Rire en démocratie : les vrais faux candidats aux élections nationales

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Hélène Gouhier

Société

Quand l’Autriche se bidonne avec Brüno, l’Allemagne pleure de rire avec Horst Schlämmer : ce personnage humoristique, journaliste localier porté sur la bibine, a décidé de se présenter aux élections du Bundestag. Bienvenue au Groland d’Outre-Rhin.

La première entrée en scène du journaliste de province, grassouillet et sérieusement alcoolique, remonte à quatre ans. Sa célébrité, le rédacteur en chef adjoint du quotidien Grevenbroicher ne l’a pourtant acquise qu’une fois impliqué dans la campagne électorale allemande. Alors que la plupart des Allemands se demandent encore où se situe précisément la ville de Grevenbroich, Horst Schlämmer, lui, a fondé son propre parti et lancé une campagne électorale médiatique. Ce fier détenteur d’un sac à main pour homme peut maintenant être admiré à l’écran : son film Isch kandidiere (« Che chuis candidat »), qui raconte l’ascension du petit provincial au siège ultime de Chancelier fédéral allemand, est sorti au cinéma le 20 août en Allemagne. 

Je serai votre chancelier

(SpreePix /flickr)Derrière le faux politicien qui fait la joie de ses partisans grâce à des slogans tels que « Sonnenbank für alle ! » (« Le banc solaire pour tous ! ») ou « Yes Weekend ! » se cache le comique le plus populaire de toute l’Allemagne : Hape Kerkeling. Il s’est fait remarquer petit à petit, ces dernières années, en imaginant des personnalités fictives. Mais aucun de ces personnages précédents ne l'a entraîné aussi loin que Schlämmer, qui, un jour, ne s’est plus satisfait de sa misérable existence de journaliste localier. Il a depuis fait son entrée dans la vraie vie politique : « Mon nom est Horst Schlämmer. Et je serai votre prochain Chancelier fédéral », a-t-il lancé à la nation. Le spectateur frissonne, et Kerkeling, lui, ricane dans sa barbe.

Mais qui est en réalité Horst Schlämmer ? Un vrai journaliste de Westphalie ? Un personnage de Hape Kerkeling ? Ou peut-être même les deux ? Le créateur lui-même évoque le concept de l'hyper-réalité. Cette notion désigne, sous sa forme la plus simple, un état dans lequel la conscience humaine perd sa capacité à différencier la réalité d’une illusion parfaite. Schlämmer, lui-même, doute… mais pas de son existence réelle. Il l’explique dans une interview accordée à l’hebdomadaire Der Spiegel : « Je ne suis pas un personnage fictif, je suis bien réel. Je suis aussi parfois virtuel, mais généralement davantage réel. » A la question « à quoi reconnaît-on cela ? », il répond du tac au tac : « Vous pouvez me toucher, et je le sens ».

Grolandais, grolandaises...

(SpreePix /flickr)Hape Kerkeling n'est pas le premier comique qui a fait sensation dans la « Politarena ». Le comédien français Christophe Salengro incarne depuis 1984 le personnage du président du Groland dans une émission de télévision de la chaîne française Canal+. Comme dans tous les Etats vraiment existants, le Groland dispose de son propre hymne et de son drapeau ; des passeports grolandais peuvent même être délivrés à la demande. Chaque citoyen peut d’ailleurs se porter candidat à l’élection présidentielle du Groland. Petit hic : seul le président en fonction possède le droit de vote…

Le polonais Ędward Ącki, au nom imprononçable, s’est tout comme Schlämmer reconverti et se mêle désormais aux affaires politiques quotidiennes. Le personnage politique fictif, qui a été créé par le journaliste et animateur de radio Szymon Majewski, souhaite avant tout « dépoussiérer » la politique polonaise. Le nom de son parti, ĘĄ - Szczerzy DO bólu (« Y aller franchement jusqu’à ce que cela fasse mal ») montre déjà qu’Ącki ne compte pas sa peine. Lors de son apparition publique prônant l’anti-corruption, durant laquelle le linge sale de l'Etat a été lavé symboliquement devant le Palais de la culture polonais, un grand nombre de fans est venu l’écouter. Il n’a maintenant plus qu’un petit pas à franchir pour être sélectionné pour les prochaines élections présidentielles en Pologne, c’est pourquoi Lech Kaczyński devrait bien s’armer en 2010 pour pouvoir tenir tête à ce guignol et son chapeau basque rouge.

La crainte circule dans les parlements

Faut-il craindre une invasion de personnages fictifs dans les parlements nationaux ? Le personnage au look ringard et repoussant de Kerkeling, Horst , tend certes un miroir à notre société qui s'intéresse toujours plus à ses « people » et toujours moins à ses politiciens, mais cela ne signifie pas pour autant la fin de la politique sérieuse. Schlämmer a annoncé médiatiquement sa candidature, mais les formalités qui sont nécessaires pour fonder un parti et s’inscrire aux élections, restent importantes. 

Et le président de la République du Groland en a aussi fait les frais : celui qui voulait se présenter aux élections présidentielles de 2007 (contre Sarkozy) a finalement abandonné l’entourloupe, faute des signatures nécessaires. Et Schlämmer, s’il avait eu le courage de se coltiner une telle paperasse, aurait probablement eu les mêmes problèmes… Pourtant, avec le slogan « Libéral, conservateur et de gauche – il y en a pour tout le monde », il pouvait espérer ratisser large !

Translated from Schlämmer for Kanzler: Wat die nich können, dat kann ich auch!