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Raül Romeva : « Etre Vert et de droite, c’est un contresens »

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Politique

Les Verts d’Europe ont beaucoup à gagner lors des prochaines élections européennes. Le jeune député catalan Raül Romeva est l'un de leurs chefs de file. Candidat à sa propre succession, il pronostique des résultats en hausse pour les écologistes du continent. Interview.

« Il y a deux ans, j'avais une frustration : celle de voir que les journalistes ne venaient pas ici. Mais ces dernières années, ils sont venus nombreux parce que des lois importantes ont été discutées au Parlement, des lois qui concernent les gens. » Romeva est un eurodéputé accessible et communicatif. Il s'exprime sans détours quand il s'agit de tirer les oreilles des journalistes. « Peut-être que les reporters commencent à se réveiller parce qu'il y a des élections. Ils se rendent compte qu'à Bruxelles et Strasbourg, des choses importantes se passent. » « La dynamique du consensus a été rompue, reprend-t-il. Au Parlement, parfois nous gagnons, d'autres fois nous perdons. Nous ne pouvons pas toujours satisfaire tout le monde. Cela reviendrait à dégager les élus de leur responsabilité dans l’espace public et le débat politique. Et cette évolution ne pose pas de problèmes car nous nous inscrivons dans le clivage gauche-droite ou libéraux-étatistes ». 

Comment différencier le discours des Verts de celui des socialistes et des libéraux, maintenant que vous marchez sur leurs plates-bandes ?

Quand ils sont en campagne, les socialistes deviennent toujours un peu plus écologistes et un peu plus de gauche. Quand ils gouvernent, ils deviennent, comme ils disent, « responsables ». Pour les Verts, l'Europe est la solution, pas le problème. Nous sommes des fédéralistes européens : non pas contre les institutions nationales, mais bien en faveur du transfert de compétences nationales, sans atermoiements, là où l’Etat n’est pas à même de résoudre les problèmes.

Comment comptez-vous démontrer que les députés européens ne sont pas dans une tour d'ivoire, mais bien proches des préoccupations des citoyens ?

Le mythe sur les eurodéputés qui se la couleraient douce est bien ancré. Nous devons communiquer davantage sur nos activités et les horaires de service pendant lesquelles chaque député se tient à disposition des citoyens. Les gens pensent que le Parlement européen est éloigné. Pourtant j'ai un blog que j'actualise tous les jours. Il est plus facile d’être au courant de ce que fait un eurodéputé, comparé à un conseiller municipal ou un parlementaire national. Enfin, il faut expliquer clairement que nous ne venons pas ici pour discuter du sexe des anges. Nous parlons des moyens de garantir l’accès des citoyens à l'énergie, d'où elle vient, et des conditions de sécurité et de propreté dans lesquelles la lumière nous parvient. Et cela pour que les générations futures ne paient pas notre facture.

Existe-t-il des risques en matière d’accès à l’énergie ?

C'est un fait !

Pouvez-vous nous donner un exemple ?

Prenons l’exemple des énergies nucléaires. Ce qu’on nous dit, c’est que dans dix ans, nous disposerons de mécanismes de recyclage des résidus nucléaires. Jusqu'à présent, nous ne disposons de rien de tel. Deuxièmement, il y a des risques découlant de l'insécurité des centrales. Tchernobyl n’est pas si loin, même si on ne peut pas comparer les centrales nucléaires françaises et roumaines sur le plan de la sécurité. Enfin, la dimension internationale : l’accès des Européens à l’uranium implique la mise en danger de communautés locales étrangères.

Avez-vous convaincu la Commission européenne sur le thème des énergies renouvelables ?

Sur les renouvelables, oui.

Les énergies renouvelables garantissent-elles l’indépendance énergétique des Européens ?

En partie, oui.

Sur quoi cette indépendance se base-t-elle ?

Avant tout, elle se base sur la consommation de l’énergie que nous produisons. Il faut miser sur le solaire et l’éolien car ces énergies sont sous-exploitées. C’est ainsi que nous garantirons l’indépendance, la propreté et la sécurité. La deuxième clé de l’indépendance est l’efficacité énergétique : une réduction de la consommation de 20 % est le minimum que nous puissions exiger.

Est-ce possible ?

C’est nécessaire…

Mais est-ce possible ?

C’est possible si l’on s’en donne les moyens.

Si c’était le cas, perdrions-nous en compétitivité ?

Si nous Européens ne le faisons pas, les autres ne le feront pas. Nous devons jouer un rôle moteur. En cela, le changement de gouvernement aux Etats-Unis est fondamental. L’espoir est grand. Nous acceptons toujours les compromis une fois qu’il est trop tard, que la preuve est là. Si l’on considère qu’il faut persuader les grandes puissances, commençons donc par les Etats-Unis. Il est faux de croire que, si nous soutenons l’industrie verte, nous allons faire fuir les entreprises et les investissements. La Chine a déjà commencé à construire le modèle de véhicule électrique le moins cher du monde, aux dépens des investissements européens, et faute d’incitations en Europe. Au lieu d’encourager les investisseurs à venir ici, nous les expulsons.

Pensez-vous que Durão Barroso mérite un second mandat à la tête de la Commission ? 

Pour moi, Barroso n’était pas un bon candidat dès le premier mandat. Nous, les Verts, avons voté contre sa nomination, et avons été bien seuls à opter pour cette position. Il n’a rien fait de plus que de se soumettre aux souhaits des grandes puissances européennes. Je suis un défenseur du rôle exécutif réel de la Commission, mais pas seulement au service des pays les plus puissants. De plus, le passé politique et l’idéologie de Barroso le rendent peu fiable du point de vue social, environnemental et des droits et libertés civiles.

Qui d’autre verriez-vous bien à la tête de la Commission ?

La Commission doit être conditionnée aux politiques sociales du Parlement. Pour moi, le bon candidat est celui qui comprend cela. Monica Frassoni serait une bonne candidate. Elle a de l’expérience, une vocation fédéraliste et une vision de ce qu’est le débat européen.

Quel est votre sentiment par rapport aux résultats des Verts?

En Espagne, les Verts vont se maintenir, et en Europe, ils vont consolider leur position, en particulier en France, en Suède, en Finlande, en Allemagne et dans les pays de l’Est. Je fais partie de ceux qui défendent le travail en coalition. Je ne crois pas que le discours exclusivement vert soit une garantie. Je crois plutôt qu’il faut y ajouter des discours de gauche et issus des mouvements sociaux.

La droite ne peut-elle pas être verte ?

Etre vert et de droite, c’est un contresens. Pour moi, une véritable politique écologiste doit inclure une politique sociale de conviction.

Translated from Raül Romeva: "Es un contrasentido ser verde y declararse de derechas"