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Primaires socialistes : les Français de Bruxelles préfèrent Martine Aubry

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Bruxelles

Par Stéphane Carrara

L’évènement socialiste du week-end dernier était sans nul doute les « primaires citoyennes » françaises pour l’investiture à la candidature présidentielle. Près de 2,5 millions d’électeurs se sont déplacés pour désigner François Hollande (39 %) et Martine Aubry (31 %).

Les deux favoris des sondages sont donc confirmés et seront départagés lors d’un second tour, le 16 octobre prochain, car il n’en faudra qu’un – ou une - pour affronter Nicolas Sarkozy en 2012. A Bruxelles, Martine Aubry arrive largement en tête avec près de 45 % des suffrages exprimés par le millier d’expatriés qui a participé au vote.

Coup de projecteur sur les primaires et tentative d’explication de la vague aubryste en Belgique.

Les primaires citoyennes : un succès participatif ?

Si le principe des primaires est assez unanimement salué de part et d’autre de l’échiquier politique français, les commentaires sur le scrutin de ce 9 octobre reflètent mieux la rivalité qui anime le jeu partisan. Ainsi, 2,5 millions de voix exprimées, c’est plus que l’objectif annoncé d’un million et donc un véritable succès pour les socialistes. Mais à droite, le parti du président Sarkozy bougonne et n’y voit que l’expression d’une faible mobilisation du peuple de gauche. Certes, 2,5 millions ce n’est qu’un peu plus de 5 % de l’ensemble du corps électoral français (44 millions d’électeurs), mais c’est aussi près de 15 % du nombre des votants aux dernières élections européennes de 2009. C’est enfin 15 fois plus qu’aux primaires de 2006 auxquelles 170 000 socialistes avaient participé.

Ce qui a changé depuis 2006, c’est que ces primaires sont pour la première fois « citoyennes ». Inutile donc d’avoir la carte du parti. A Bruxelles, tous les résidants français, inscrits sur les listes consulaires au 31 décembre 2010 peuvent participer en s’acquittant d’un euro pour les frais d’organisation et après avoir signé un « engagement de reconnaissance dans les valeurs de la Gauche ».

Sur les 60 000 Français de Belgique inscrits, 1238 votes ont été enregistrés : 942 à Bruxelles et 45 à Liège auxquels il faut ajouter 251 votes par correspondance. Une mobilisation un peu moins massive qu’en France donc. Mais « avec une moyenne de 235 votants par bureau de vote (NB. Il y en a 4 à Bruxelles), on est très près de la moyenne nationale (260) » rappelle Nicole Fondeneige, secrétaire de section des socialistes français à Bruxelles. « Certains sont même venus de la frontière française » précise-t-elle encore, se réjouissant « des comportements très civiques, et disciplinés, des contacts très chaleureux » qui ont caractérisé cette journée de scrutin.

Martine, François, Arnaud et les autres, dans les urnes bruxelloises

Ce qui marque les esprits lorsqu’on analyse les résultats du bureau de vote bruxellois, c’est la première place de Martine Aubry, qui, avec 44,8 % des suffrages, devance nettement François Hollande (26,1 %). La troisième place « surprise » d’Arnaud Montebourg (14,9 %) est confirmée. Autre surprise de taille : l’échec de Ségolène Royal, candidate désignée à la présidentielle de 2007 qui ne récolte cette fois que 5,9 %, des votes, elle qui avait pourtant remporté, dès le premier tour, les primaires de 2006 (devant Dominique Strauss-Kahn et Laurent Fabius). Les Français de Bruxelles lui préfèrent même Manuel Valls (7,8 %), la reléguant à la 5ème place - « avant-dernière » diront les plus cruels - devant le candidat du parti radical de gauche, Jean-Michel Baylet, qui ferme la marche avec 4 votes seulement sur les 942 exprimés et pris en compte dans le liste détaillée de la section Bruxelloise du PS

Martine Aubry, championne de l’Europe

Quelle Martine Aubry les expatriés français ont-ils plébiscitée ?

La première secrétaire du parti socialiste français, dont le député européen Harlem Désir assure aujourd’hui l’intérim, est aussi maire de Lille (capitale européenne de la culture en 2004). La proximité géographique peut-elle être un élément d’explication de son succès ? Pas si sûr, car le phénomène est tendanciel et s’observe aussi bien à Bruxelles qu’à La Haye, Berlin ou Milan explique Philip Cordery, candidat PS sur la circonscription Benelux pour les législatives 2012.

Faut-il chercher du côté des soutiens de la candidate ? A l’intérieur du PS, Martine Aubry peut en effet compter sur quelques « éléphants » : Laurent Fabius, influent membre du bureau national du PS, Bertrand Delanoë maire de Paris entre autres. A Bruxelles, c’est l’eurodéputée Pervenche Bérès, présidente de la Commission des affaires sociales et de l’emploi, qui défend sa candidature. Le profil sociologique des votants doit aussi être pris en compte quand on sait que Martine Aubry obtient de meilleurs résultats chez les urbains que chez les ruraux. Et les expatriés vivent généralement plutôt dans les grandes villes où ils étudient ou travaillent.

En fait, ce qui apparaît décisif pour Philip Cordery, c’est la « meilleure image européenne » de Martine Aubry. Selon le site Internet Vigie 2012 qui passe au crible les déclarations sur l’Europe, des candidats à la présidentielle française de 2012, Martine Aubry serait bien en effet la « championne de l’Europe ». François Hollande n’est lui que quatrième de ce classement qui révèle que la candidate parle non seulement plus d’Europe mais sait aussi toucher la corde sensible en parlant parfois d’une autre Europe : « je m’insurge contre l’UE qui supprime 75 à 80% du programme européen d’aide alimentaire » s’indigne-t-elle en septembre dernier. Et cela en conservant l’image d’une européenne convaincue, capable en outre de résoudre la quadrature du cercle sur laquelle beaucoup se cassent les dents. Car Martine Aubry est aussi la fille de Jacques Delors, emblématique Président de la Commission européenne de 1985 à 1995 à qui les sondages prêtaient alors un potentiel de présidentiable qu’il refusa d’utiliser.

Dès lors, si l’on valide l’hypothèse selon laquelle les expatriés qui ont pris part aux primaires sont, de près ou de loin, attachés aux questions européennes, on peut sans doute considérer que la stature européenne de la candidate Aubry explique son succès parmi les français de l’étranger et de Bruxelles à plus forte raison.

Le second tour des « primaires citoyennes » aura lieu ce dimanche 16 Octobre, le bureau de vote reste le même à Bruxelles et il est possible d’y participer même si vous n’étiez pas au premier tour. Martine Aubry gagnera-t-elle les primaires socialistes ? Deviendra-t-telle la première femme présidente de la France en 2012 ? Si non, on en fera peut-être un jour la première présidente de la Commission européenne… car là aussi, on attend toujours…