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Pourquoi la BCE ne baisse pas ses taux.

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La Parisienne

On ne peut pas dire que ce soit véritablement une surprise. On l’attendait depuis quelques temps, mais là, ça y’est, la Banque Centrale Européenne (BCE) l’a dit, les risques d’inflation dans la zone euro deviennent réels. Alors elle s’inquiète, s’angoisse et fait la chasse aux politiques inflationnistes. En commençant par les mesures les plus impopulaires.

Elle a ainsi récemment refusé la validation d’un accord européen sur les salaires qui visait à indexer ces derniers sur la hausse des prix parce que cela risquait de provoquer un cercle vicieux inflationniste. Surtout, elle a refusé de baisser ses taux après le début de crise boursière du 21 janvier, provoquant une baisse supplémentaire des bourses européennes

 

Une fois de plus, les critiques incessantes sur la politique menée à Francfort et sur les inconvénients de l’euro vont reprendre. Après près de deux décennies de relative stabilité monétaire, les européens semblent avoir oublié à quel point l’inflation peut faire de dégâts. Fini l’enthousiasme de la nuit du 1er janvier 2002, pendant laquelle on se ruait sur les distributeurs automatiques pour retirer les nouveaux billets ! Aujourd’hui on ne parle plus que hausse des prix, problèmes de compétitivité internationale et taux d’intérêt trop élevés ! Tout ça à cause du conservatisme de la BCE, qui s’obstine à ne regarder que l’inflation et pas la croissance.

Tout ça est parfaitement vrai. Mais la question maintenant, c’est pourquoi ? Le Federal Reserve Board, la banque centrale américaine, est également indépendante et a longtemps été dirigée par un vieux républicain conservateur, Alan Greenspan. Pourtant, elle a été plus réactive à l’évolution de l’économie américaine et elle a baissé ses taux pour stopper la baisse boursière liée aux fameuses « subprimes ». Alors, pourquoi la BCE n’en fait-elle pas autant ? Certains évoqueront les dispositions du traité. Pas très convaincant.

Le problème essentiel vient du fait que politique monétaire et budgétaire sont indissociables. Pour décider de ses taux d’intérêt, une banque centrale doit avoir une visibilité correcte sur la politique budgétaire du gouvernement. Va-t-il créer du déficit ? Ses politiques sont elles inflationnistes ? Au contraire, est-il en train de rembourser sa dette ? Aux Etats-Unis, avec un budget fédéral important, c’est possible. En Europe, c’est pour l’instant impossible.

Avec 15 budgets différents pour la zone euro et quasiment pas de budget commun, la visibilité est nulle pour la BCE. Pourtant, on avait créé le Pacte de Stabilité et de Croissance, pour contrôler les budgets des Etats ! Oui, mais beaucoup d’entre eux, la France et l’Allemagne en tête, ont eu tôt fait de se mettre en infraction avec les critères communs. Résultat, aujourd’hui, la BCE ne peut pas compter sur les Etats pour gérer sainement l’économie européenne. Son seul choix, alors, c’est de regarder les indicateurs dont elle dispose, c'est-à-dire l’inflation. Et donc elle reste conservatrice et ne favorise pas la croissance. D’où l’euro fort, les taux élevés et tout le reste…

Le problème en Europe, c’est qu’on fait un peu les choses à moitié. Les grands Etats, qui sont les premiers à demander une Europe politique, font blocage contre la seule réforme qui soit véritablement nécessaire : la création d’un gouvernement économique européen. Les structures existent, dans le cadre de l’Eurogroupe, la réunion des ministres des finances des pays ayant adopté l’euro. Il ne reste plus qu’à se donner tous ensemble des règles juridiquement contraignantes et on pourra peut être commencer à piloter l’économie du continent.

Evidemment, les hommes politiques ne pourront  plus faire des promesses extravagantes pendant leurs campagnes… Donc, ça ne marchera jamais… Dommage…