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Nick Witney : « Il n’y a aucun conflit entre l’Otan et l’Union européenne »

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Default profile picture Sabine Ostarcevic

Politique

La défense sera sans aucun doute une question clé des élections européennes de 2009. L’UE, son rôle militaire et diplomatique dans le monde, selon Nick Witney, expert en relations internationales.

Les Irlandais ont refusé de ratifier le traité de Lisbonne. Ce « non » désormais célèbre trouve notamment sa source dans la crainte que ces insulaires éprouvent à l’égard du militarisme et de la perte de leur neutralité. En même temps, de nombreuses voix signalent que l’Europe ne sera pas prise en considération sur l’échiquier géopolitique tant qu’elle ne s’appuie pas sur une force militaire crédible. L’analyste britannique Nick Witney, un proche de Javier Solana et de George Soros, expert en relations internationales et défense du think tank paneuropéen European Council on Foreign Relations, évoque cette question. Un point crucial qui surgira probablement dans la campagne électorale à venir, en 2009.

Que pensez-vous des appels au renforcement de l’intégration militaire de l’Union européenne ?

L’efficacité de l’Europe en tant qu’acteur global est basée en grande partie sur l’utilisation de sa capacité d’influence diplomatique et économique. Mais dans les zones d’instabilité et de conflits, comme les Balkans, le Congo ou le Tchad, il faut être prêt à soutenir la diplomatie par des moyens militaires. Bien que les Etats membres se soient mis d’accord sur cette stratégie, en pratique, ils ont très peu fait pour qu’elle se matérialise, ce qui est problématique. Bien qu’ils dépensent, en tout, la somme colossale de 200 000 millions d’euros par an, une grande partie est gaspillée, puisque les efforts sont dupliqués au lieu d’être coordonnés.

Pensez-vous qu’une politique extérieure et de sécurité commune, tant souhaitée, deviendra une réalité dans un futur proche, ou s’agit-il d’un scénario de politique fiction ?

Cela n’est certainement pas pour demain ! Progressivement, les Européens se rendent compte que s’ils agissent individuellement et ne s’accordent pas sur des positions communes, ils seront ignorés.

Les Russes ont donné une leçon à l’Europe sur la façon dont un pays tiers peut réduire les 27 pays membres de l’Union européenne à l’insignifiance, lorsqu’ils ne présentent pas un front commun. En revanche, dans d’autres domaines comme le changement climatique, l’Europe a réalisé à quel point elle était influente lorsqu’elle parle d’une seule voix.

En outre, à mesure que la mondialisation va redistribuer le pouvoir sur la planète, les Européens vont découvrir que le reste du monde considère toujours davantage le continent comme une entité unique, sans se préoccuper de l’insistance des Européens quant à leurs différences internes. Comme le soulignait De Gaulle en son temps : « L’Europe ne sera pas unie par un quelconque homme politique, elle le sera par les Chinois. » Le Royaume-Uni et d’autres membres considèrent cette intégration avec méfiance. Ils craignent pour le lien transatlantique et la survie de l’Otan.

Selon vous, quelle devrait être la répartition des rôles entre l’Otan et l’Union européenne dans la défense européenne ?

Il n’y a aucun conflit entre l’Otan et l’Union européenne. Les deux cherchent à ce que les Européens améliorent leur efficacité défensive. Les Etats-Unis souhaitent que l’Union européenne soit un associé fort, disposé à partager une part importante de la coûteuse charge d’assurer la garantie de la sécurité globale. Soyons sincère : les Etats-Unis se soucient peu de la bannière sous laquelle se construira la défense européenne, ce qui leur importe, c’est qu’elle se fasse. Le Royaume-Uni, pendant ce temps, est en train de digérer ce changement de position des Etats-Unis, et semble être plus royaliste que le roi. Mais je suis sûr qu’il changera rapidement d’attitude.

Les « structures de coopération permanente » peuvent-elles être une manière d’avancer vers plus de sécurité en Europe ?

Le traité de Lisbonne propose la création de groupes pionniers dans le domaine de la défense. Le système vise à permettre aux Etats les plus intéressés d’approfondir leur coopération, sans être bridés, comme c’est le cas encore aujourd’hui, par ceux qui souhaitent avancer plus lentement. L’avenir de ce traité est incertain, mais l’accent mis sur la sécurité pourra et devra être renforcé dans le cadre des structures déjà existantes, sans attendre la ratification. Le « non » irlandais met en évidence le besoin de procédures de ce type, plus flexibles. Si nous devons attendre que 27 convives s’assoient en même temps autour de la table, le dîner ne commencera sans doute jamais. L’objectif est de parvenir à une attitude en matière de politique extérieure réellement unifiée et cohérente.

Sera-t-il nécessaire que les Etats membres cèdent une partie importante de leurs prérogatives de politique extérieure en faveur d’un quelconque type de superstructure européenne ?

Je crois que la plupart des gens admettent qu’aujourd’hui, tous les Etats membres considèrent la politique extérieure, et peut-être plus encore la politique de défense, comme des questions de souveraineté nationale. De ce fait, ils sont disposés à coopérer, mais pas à ce que Bruxelles leur dicte ce qu’ils ont à faire. Cette position a été respectée dans le traité de Lisbonne.

Translated from Nick Witney: “Si esperamos que 27 comensales se sienten a la mesa, la cena no empieza nunca”