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Marine Le Pen, Geert Wilders : l'extême-droite avance masquée

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Politique

Si les formations d’extrême-droite crient « à la dictature de l’Europe », elles semblent bien vouloir s’inscrire dans une dimension nationaliste européenne. Pourtant, la popularité des unes et des autres différent d’un extrême à l’autre.

La dédiabolisation du Front national, qu’elle relève d’une idéologie qui s’est réellement modérée ou d’un simple glissement de la part des médias, est-elle un phénomène qui s’étend sur les partis d’extrême-droite européens ?

Lire l'interview de Julien Rochedy, président des Jeunes avec Marine

Fin janvier, Marine Le Pen s’affichait aux bras des cadres du FPO lors du bal des corporations estudiantines de Vienne dont certaines fraternités, comme l’Olympia, sont considérés comme proche du néonazisme. Les formations d’extrême-droite semblent bien vouloir s’inscrire dans une dimension nationaliste européenne comme prouvée par la création de l'Alliance européenne des mouvements nationaux, présidée par Bruno Gollnisch. Toutefois, pour gagner en influence, les partis d’extrême-droite tentent tant bien que mal de ne pas se dépeindre en tant que tel.

Des nouvelles figures qui se veulent populistes

Dans un billet du « blog d’information » Bivouac-ID, l’auteur commente les résultats des élections législatives aux Pays-Bas qui ont eu lieu en juin 2010, où le Parti de la liberté avait obtenu la troisième position. « Rappelons aux pisse-copies de la pensée automatique que le PVV de Geert Wilders défend des valeurs telles que la démocratie, la séparation de l’église et l’état, l’égalité des femmes et des hommes, l’égalité des homosexuels et des hétérosexuels et la lutte contre l’antisémitisme. Si défendre ces valeurs, c’est être “d’extrême-droite”, c’est que nous sommes alors en pleine inversion langagière. » Si le parti défend des valeurs évidemment républicaines qui sont à la fois de droite et de gauche, quand bien même il les utilise fortement comme bases de son opposition à l’Islam, il faut savoir que le PVV se montre particulièrement virulent sur d’autres points clés non cités par l’auteur. Le site internet lancé par Geert Wilders fin février est la preuve indiscutable d’un radicalisme profond. Il propose à ses citoyens de remplir un formulaire pour porter plainte contre les travailleurs venus d’Europe centrale et occidentale, qui apportent supposément avec eux les crimes, le vandalisme, la prostitution et l’ébriété publique.

L’actuelle présidente du Parti populaire danois (PPD - Dansk Folkeparti) est une bénédiction pour le parti. Ces dix dernières années, Pia Merete Kjærsgaard lui a permis de passer du rang de petit mouvement à celui de membre à part entière de la politique danoise. Aux élections législatives de 2011, le PPD a obtenu 12,30 % des voix, ce qui fait de lui le troisième parti le plus influent du pays. Ce succès est en partie dû à Pia Kjaersgaard qui a su populariser le parti. Son parcours professionnel est un atout dans cette entreprise : elle a travaillé comme assistante de direction dans une société d'assurance et de publicité puis comme assistante à domicile pour personnes âgées, se démarquant des autres politiciens sortant des grandes écoles.

Le point commun entre Pia Kjaersgaard et Marine Le Pen est le statut de figure charismatique. Elle crient à la dictature des médias et de la pensée unique (apportée par la démocratie moderne, si l’on en croit les militants FN du reportage controversé des Infiltrés d’avril 2010). Pour souligner son statut de victime, la présidente du FN ne manque pas d’expressions. On peut citer son discours du 12 février à Strasbourg, un exemple parmi tant d’autres, où afin de sécuriser son propos sur le lien évident entre l’insécurité croissante et l’immigration, elle use de termes tels que « je vais choquer les belles âmes et les bobos », ou encore « je ne sais pas si je serais traînée devant le tribunal de la pensée ». S’efforçant de rameuter les mondes ouvriers, Marine Le Pen a bien compris de quelle manière il fallait attaquer le candidat sortant : « Nicolas découvre le référendum, car oui le peuple c'est dangereux. » Et ainsi le parti se fond dans la masse de l’acceptable tout en restant original.

La fusion avec les institutions politiques

Lundi 6 mars, à un journaliste qui pointait son rapprochement avec des hommes politiques autrichiens aux parcours douteurs lors du bal des Corporations, Marine Le Pen répond qu’ « en Autriche comme en France on subit des gens comme vous, des types d’extrême-gauche qui depuis des années considèrent que tous ceux qui ne sont pas d’accord avec eux sont des fascistes et des nazis. » Comme argument majeur, elle avance le fait que le FPÖ « est au même niveau que le parti socialiste ». Autrement dit, c’est un parti tout à fait respectable et pour preuve, il a sa place dans les institutions officielles. S’embrouillant les pinceaux, la présidente du FN a aussi affirmé que Martin Graf, membre du FPÖ, était co-président de l’Assemblée nationale autrichienne et membre régulier du Conseil européen. Après vérification, Martin Graf est reçu au Conseil de l’Europe, dont l’importance diffère de celle du Conseil européen. Cependant, le message reste le même : l’intégration d’un parti dans des institutions considérables et la popularité de celui-ci seraient gages de leur bonne foi.

Lire le dossier de cafebabel.com consacré à l'extrême-droite

Cependant, si l'arrivée de Marine Le Pen signait la fin de l’extrême-droite historique en France, on pourrait citer des partis européens qui ne s’adonne pas à un jeu de « façade » comme le Parti national démocrate d’Allemagne ou la Ligue du Nord en Italie. Au delà de ces deux exemples, ce sont bien deux familles d’extrême-droite qui s’imposent en Europe. Des marginaux nostalgiques d’un côté, des partis aux discours modernes de l’autre. Mais pour lesquels de ces derniers la normalisation est un masque, une stratégie de rénovation pour accéder au pouvoir ?

Photos : Une (cc) PhotographyKing/flickr ; Texte, Marine Le Pen (cc) Bobby Lightspeed/flickr ; Vidéos : Geert Wilders et son site internet (cc) euronewsfr/YouTube Michel Field et Marine Le Pen (cc) moterazzi/YouTube