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L'Ukraine dans l'UE : Poutine ne lâche pas de l'est

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Politique

Prévu le 28 novembre, le sommet de Vilnius devait décider d’un accord d’association entre l’UE et l’Ukraine. Un événement pour la politique de voisinage européenne. Sauf que la Russie ne l’a pas entendu pas de cette oreille. Entre pressions et chantages, le Kremlin a ressorti des techniques d’un autre temps pour garder son petit frère dans son escarcelle.

Le rapprochement entre l’Europe et l’Ukraine avait tout d’un panier de crabes. Occasion unique de consolider des valeurs telles que la démocratie, l’Etat de droit ou encore les droits de l’homme, les Etats membres étaient néanmoins partagés quant à l’attitude à adopter vis-à-vis de Viktor Ianoukovitch, volubile président ukrainien. Néanmoins, petit à petit, le pragmatisme a gagné en vigueur à Bruxelles, d’autant que l’Ukraine avait entrouvert la porte à un compromis sur le cas Ioulia Timochenko, avec sa possible hospitalisation en Allemagne.

Intimidations russes

Outre l’impact social positif qu’un accord pourrait avoir sur la société ukrainienne, l’intérêt géostratégique est évident. Approfondir les relations avec un pays comme celui-ci renforcerait considérablement les positions européennes dans une région où l’hégémonie russe est totale. Ainsi, si l’idée d’un accord avec l’Ukraine a fait son chemin dans les esprits des chefs d’Etat et de gouvernement européens, un autre obstacle, de taille, s’est dressé à l’approche du sommet de Vilnius. De fait, l’enthousiasme de Vladimir Poutine vis-à-vis d’un rapprochement de l’Ukraine avec l’Ouest était très relatif. Au contraire, le Kremlin souhaite que Kiev s’engage pleinement dans son union douanière, à laquelle ont déjà adhéré la Biélorussie, considérée comme la dernière dictature d’Europe, et le Kazakhstan.

Pour faire valoir ses positions, le président russe n’a reculé devant rien. Sa principale arme est naturellement celle du gaz. Les Ukrainiens sont en effet entièrement dépendants de l’énergie russe, qu’ils payent d’ailleurs arbitrairement au prix fort. Fermer le robinet est donc une hantise majeure pour l’Ukraine. En outre, Vladimir Poutine a usé de son influence directement sur son homologue Viktor Ianoukovitch, le menaçant à demi-mot de soutenir l’un de ses adversaires lors de la prochaine élection présidentielle, prévue pour début 2015.

 L’Europe également menacée

Encore plus concrètement, Moscou a également donné un avant-goût des représailles commerciales que pourrait connaître le pays en cas d’accord avec l’Europe. Pendant quelques semaines, les frontières russes se sont fermées pour le chocolatier Roshen, sous couvert de raisons sanitaires fantoches. Généralisé à l’ensemble des produits ukrainiens, ce genre de mesures restrictives pourrait avoir un impact dévastateur dans la mesure où 25 % des exportations ukrainiennes sont destinées à la Russie. Une méthode qui a aussi été utilisée à l’encontre de la Lituanie, membre de l’Union européenne, organisatrice du sommet, et premier soutien à un accord avec l’Ukraine.

Les contrôles douaniers s’imposant aux transporteurs de lait lituanien se sont en effet durcis au-delà du tolérable à l’approche de la date du 28 novembre. Pis, l’enclave de Kaliningrad, située à l’ouest de la Lituanie, a fait le plein de gaz. En vue d’une coupure du gazoduc qui alimente également Vilnius ? Dalia Grybauskaité, présidente lituanienne, a jugé cette hypothèse plausible. Si de véritables sanctions économiques et énergétiques auraient été finalement difficiles à mettre en place à l’encontre de la Lituanie, soutenue par Bruxelles, cette hypothèse était tout à fait réelle pour l’Ukraine.

Soucieux de ménager son encombrant voisin et néanmoins partenaire commercial incontournable, l’Ukraine a fini par capituler à une semaine du sommet. Victor Ianoukovitch a en effet fait le choix de la prudence face à Vladimir Poutine et a suspendu l’accord d’association avec l’Union européenne. Cette victoire géopolitique pour le président russe, qui s’est révélé une nouvelle fois plus habile que ses homologues européens, pourrait néanmoins être de courte durée. Les Ukrainiens favorables à l’accord ont été plusieurs dizaines de milliers à manifester leur mécontentement, laissant la porte ouverte à une signature à une date plus favorable et rendant improbable l’entrée officielle de l’Ukraine dans l’union douanière russe.