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Lsd, Chopin et badminton : le temps du pique-nique

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Style de vie

La semaine dernière marquait la Semaine mondiale du pique-nique. « Pique-nique » renvoie à des choses dif­fé­rentes selon les per­sonnes – se goin­frer  d’un pa­nier plein de dé­lices, boire jus­qu’à l’ou­bli, tri­per à l’acide – qui convergent cela dit vers  un but com­mun : le plai­sir, pur et simple. ca­fé­ba­bel s’est en­tre­tenu avec les pique-ni­queurs les plus en­thou­siastes d'Eu­rope.

UNE COU­PURE AVEC LA RÉA­LITÉ

« S’as­seoir et man­ger c’est tou­jours agréable – en­core plus avec quelques com­plé­ments, ce qui ar­rive sou­vent lors d’un pique-nique. Mais le suc­cès d’un pique-nique re­pose sur les di­ver­tis­se­ments. Et quand je parle de di­ver­tis­se­ment, je veux dire jeux de bal­lons. Et il peut n’y avoir qu’un bal­lon : c’est le bal­lon doux de vol­ley­ball. Nous for­mons un cercle avec cet objet ma­gique et uti­li­sons nos  mains, nos pieds, notre poi­trine, nos épaules ou nôtre tête. Le jeu est conçu pour que chaque membre com­mence avec cinq vies, et  un gage me­na­çant pèse tou­jours sur nos épaules. Tout d’un coup les pres­sions ex­té­rieures et les pro­blèmes s’éva­porent sous le so­leil, alors que nous nous im­mer­geons dans les plai­sirs simples de ce jeu convain­cant et dra­ma­tique. Une belle cou­pure avec la réa­lité, c’est la clé d’une vé­ri­table ex­cur­sion. »

Dun­can Grif­fiths.

CHO­PIN ET SIN­SE­MI­LIA

« Ima­gine-toi al­longé dans l’herbe douce, fraî­che­ment cou­pée, écou­tant la Noc­turne en mi-bémol ma­jeur de Cho­pin, qui ar­rive à tes oreilles comme ve­nant de la sur­face mi­roi­tante de l’étang. En son centre, se trouve une île où un pia­niste joue les mor­ceaux les plus ex­quis des meilleurs com­po­si­teurs de Po­logne. Les gens se ras­semblent au­tour de l’eau et s’im­mergent dans la cha­leur des ondes so­nores. Sou­dai­ne­ment les doigts du pia­niste se mettent à jouer sur un rythme fré­né­tique. La mu­sique jusque-là pai­sible de­vient hé­roïque et tu ouvres grand les yeux comme si tu avais une ré­vé­la­tion. Tu pé­nètres dans cette nou­velle am­biance et tu étires pa­res­seu­se­ment ta main pour at­tra­per un joint entre les doigts de l’ami al­longé près de toi. Le so­leil de l’après-midi ca­resse ten­dre­ment ton vi­sage et tu as l’im­pres­sion que Var­so­vie est le plus bel en­droit au monde. »

Un plai­sir acide

« Pen­dant les pique-niques, j’ai sou­vent ob­servé ja­lou­se­ment les jeunes en­fants joyeux qui se ba­la­daient, ba­ti­fo­lant dans les champs, et dont le re­gard s’émer­veillait à la simple vue d’une plume flot­tant dans l’air. « Pour­quoi je ne peux plus être comme cela ? », je me de­mande avec nos­tal­gie. « Pour­quoi je n’ar­rive plus à at­teindre cet émer­veille­ment comme un en­fant ? » « Pour­quoi je ne peux aimer chaque pe­tite bi­zar­re­rie de la na­ture ? » Eh bien, je peux, et la ré­ponse se trouve dans le LSD. Aussi, après un repas de deux pe­tits timbres, je m’al­longe sur le dos, l’herbe est douce sur ma peau. Un parc pro­saïque de­vient un royaume de cu­rio­si­tés. Cet éton­ne­ment d’en­fant est re­venu. Le sol a dis­paru. Je re­garde le ciel en-des­sous de moi, je flotte dans un océan vis­queux de plai­sir. Un ri­deau clair de feuilles brille der­rière ma tête. En­suite je me mets à ge­noux, en ram­pant, les yeux fer­més, me fiant à mon nez, dé­vo­rant chaque sen­teur prin­ta­nière comme une bête sau­vage. Une odeur puis­sante par­ti­cu­lière me fait sau­ter sur mes pieds comme une ma­rion­nette. Je mange une fraise et re­garde un bal­lon de foot, com­ment peut-il être si par­fai­te­ment rond ? Quelle mer­veilleuse créa­tion. Un groupe de gros tou­ristes ja­po­nais, en sueur, passe en re­muant les fesses comme s’ils dan­saient. Je gémis de plai­sir. Même cela m’en­chante. Quelle di­vi­nité a in­venté le pique-nique ? »

DES GOUR­MAN­DISES SUR L’HERBE

« Si on s'en tient au cli­ché, pour les Fran­çais la base du pique-nique c’est la nour­ri­ture – raf­fi­née, somp­tueuse, qui met l’eau à la bouche, comme du foie gras sur une ba­guette. Et pour moi, c’est tout à fait exact. Bon, peut-être pas pour le foie gras, mais pour moi, un pique-nique c’est la sen­sa­tion d’être à un dîner. L’in­gré­dient clé, c’est le pain. Com­plet ou de blé, ou le plus ori­gi­nal pos­sible. Un pique-nique avec du pain blanc, c'est comme in­vi­ter le mau­vais temps. Quoi d’autre ? Une sa­lade de riz, des œufs durs, des to­mates-ce­rises … Nous ne sommes pas loin de la per­fec­tion. Le plus se­rait d’al­ler juste avant au ­mar­ché et d’ache­ter un petit pot de ca­viar d’au­ber­gines, et des olives au ba­si­lic. Et, bien sûr, une bou­teille de rosé bien fraîche, dans le frigo du ca­viste. »

Lu­cille Fon­teny.

DEUX BA­TEAUX qui se croisent DANS LA NUIT

« Quel­qu’un m’a dit que les Do­ri­tos étaient can­cé­ri­gènes. Alors que je tente de me convaincre qu’ils ne sont pas plus mau­vais pour la santé que les autres chips, je me sens en­core un peu cou­pable quand je me laisse aller à ce plai­sir. Peut-être est-ce la rai­son pour la­quelle ils sont si bons. J’étais en train d’en sa­vou­rer au bord du lac de Re­tiro, qui est un de mes en­droits fa­vo­ris au monde. J’avais une bière chaude ache­tée à un ven­deur mi­nable, un bis­cuit que même Me­thod Man n’au­rait pas pu bri­ser, et une vi­site sur­prise. Il y a un an, j’ai donné à un SDF ha­bi­tant le parc, 20 cents pour sa bière, et cette ha­bi­tude com­mune de fré­quen­ter le même lac nous a conduits à une sorte d’ami­tié, comme deux ba­teaux qui se croisent dans la nuit. Au­jour­d’hui, il avait dé­cidé que ces ba­teaux dans la nuit avaient be­soin de trou­ver des ché­ries. Après quelque hé­si­ta­tion, j’ai fran­chi le pas, et plu­tôt que de man­ger des Do­ri­tos j’ai cher­ché une meuf, et je ne fais plus de pique-nique seul. » Aaron Lewin.

FÉ­LI­CITÉ DU BAD­MIN­TON

« Ré­cem­ment, j’ai re­trouvé mon in­té­rêt en­fan­tin dans le Lon­don Fields (un parc dans l'est de Londres, ndlr) : jouer au bad­min­ton. Mon ami avait amené des nou­velles ra­quettes à un pique-nique et il m’avait de­mandé de jouer avec lui. Mais com­ment jouer en robe longue avec des ta­lons ? Il était scep­tique : « Pour­quoi pas ? Tu es Chi­noise, tu dois sa­voir jouer ». J’ai re­levé le défi. J’ai en­levé mes hauts ta­lons et le jeu a com­mencé. J’ai­mais re­gar­der la balle voler dans les airs et le fris­son d’es­sayer de la ren­voyer. À ma grande sur­prise, j’ai battu mon ami, qui por­tait des bas­kets. » Hang­wei Li.

Translated from LSD, Chopin and Volleyball: Picnic Time