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l'egypte part au caire de tour

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Tour de babelPolitique

Plongée dans les prémices d’un énième soulèvement populaire qui a vu le président élu Mohamed Morsi se faire chasser du pouvoir par l’armée, une journaliste égyptienne nous explique pourquoi la source de ces rebellions est impossible à Tahrir.

Le deux juillet a été un jour intense. Du bruit assourdissant des coups de feu parvenant du quartier de l’Embaba dans le nord du Caire, juste de l’autre côté du Nil pour moi, en passant par la panique pure et simple qui s’était emparée des rues, jusqu’au flot ininterrompu de feux d’artifices qui explosaient dans une déflagration stridente place Tahrir, mes oreilles et mes nerfs ont été mis à rude épreuve pendant des heures. Nous vivions à ce moment là un instant décisif, sur le fil, où feux d’artifices victorieux et coups de feu mortels se répondaient à quelques minutes d’intervalle.

Pourquoi les egyptiens protestent-ils?

En Janvier 2011, activistes et citoyens ont enflammé la place Tahrir pendant 18 jours, dans le centre ville du Caire, durant une série de manifestations, avant qu’un vent de révolte ne souffle sur tout le pays. Au final, le président Hosni Mubarak, qui s’apprêtait à embarquer pour sa treizième année en tant que président de l’Egypte, a été contraint de se retirer. La passation de pouvoir aux mains du conseil suprême des forces armées a précipité le pays dans une période tumultueuse de 16 mois, entaché par des violations des droits de l’homme, allant des tests de virginités pour les manifestantes, en passant par des jugements devant le tribunal militaire pour des civils, jusqu’au flux incessant de combats sanglants au sein de la capitale et au-delà.

A l’issue des premières élections parlementaires organisées suite à la révolution de novembre-décembre 2011, les parties islamistes ont obtenu la majorité au sein du Parlement. Les élections présidentielles de 2012 ont porté Mohamed Morsi, la tête d’affiche du mouvement des Frères musulmans au pouvoir. Les récriminations à l’encontre des décisions du nouveau président se sont accumulées depuis son arrivée à la tête de l’Etat en juin 2012.  D’une économie battant de l’aile à une constitution élaborée par une assemblée constitutionnelle islamiste, en passant par de fréquentes coupures de courant, l’action de Morsi a été une déception pour bon nombre des personnes qui avaient espéré que la révolution apporterait un réel changement démocratique.  En l’espace de quelques mois, un mouvement nommé « Tamarod » - Rebelle –a rassemblé de nombreuses signatures et mobilisé le public pour la manifestation d’envergure du 30 juin. Animés par la volonté de se désolidariser du président élu, des millions de manifestants ont déferlé en Egypte, scandant en chœur ce slogan à l’intention de Morsi : « Pars ». 

Barbies et power rangers

Mais les voix qui m’ont le plus émue en ce 2 Juillet, étaient celles de deux petites filles. La première, huit ans et des cheveux en bataille, attendait sa mère chez le coiffeur. Quand une passante amicale lui demanda  si elle irait à la plage ce week-end, elle répondit « Non, j’irai place Tahrir ». La deuxième, pas plus âgée, en traversant le pont Kasr El Nil sur le chemin de retour de la place Tahrir disait à ses parents : « Nous reviendrons à Tahrir demain ». Je la regardais s’éloigner en agitant son drapeau égyptien dans la brise de cette nuit d’été. 

Vous souvenez-vous de ce que vous faisiez à huit ans ? Jouer à la Barbie et regarder les Power Rangers ? Vous souvenez-vous de ce que vous faisiez à 18 ans ? Jouer à la Barbie et faire semblant d’être un Power Ranger ? Regardez nos enfants maintenant. Regardez cette nouvelle génération. Personne ne sait ce qui arrivera demain. Mais nous savons ce qui arrivera après-demain : nos enfants changeront ce pays. Tendez l’oreille, ouvrez les yeux, le changement est dans l’air. Les jeunes citoyens de Turquie, Libye, du Liban, du Brésil et de la Syrie, à titre d’exemple, sont en train de défier leurs gouvernements eux-aussi.  Pouvoir au peuple, partout dans le monde. 

Translated from In Cairo in July, young protesters rush by