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Le Walter's Coffee : Breaking Bad à Istanbul

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Le Walter’s Coffee, un café totalement inspiré de la série américaine Breaking Bad, vit une hype sans précédent à Istanbul. Du torréfacteur à la combinaison jaune des serveurs, Deniz Kosan – le fondateur de l’endroit – a tout pensé dans les moindres détails. Nous l’avons rencontré pour en savoir un peu plus sur l’intrigue.

Chalcédoine n’est bien évidemment plus la cité grecque d'autrefois. Plantée à l’entrée orientale du Bosphore, l’ancienne polis est devenue un quartier résidentiel et plutôt aisé de la banlieue d’Istanbul. Désormais appelé Kadikoy, elle est entrée dans la modernité grâce à ses beaux restaurants, ses maisons cossues et le zeste de gentrification qu’il faut pour faire débarquer sushi bars et autres cake house. Aujourd’hui, le nouveau quartier stambouliote possède même une première internationale : un café qui s'est totalement inspiré de la série Breaking Bad.

Le Heisenberg turc

Il faut chercher avant de trouver le Walter’s Coffee. Coincée dans une petite rue, la devanture pourtant teintée de jaune n’est pas forcément facile à repérer. À l’intérieur en revanche, il est très simple pour les fans de la série américaine de se plonger en plein dans l’univers de Walter White et Jesse Pinkman. Ou plus précisément, dans leur laboratoire. À droite, le bar a été construit comme « une paillasse » de labo sur laquelle reposent quelques mugs jaune et une machine espresso. Éclairés par la lumière d’énormes appliques, les clients savourent leurs cafés servis dans des becs benzènes en admirant des types en combinaison jaune s’activer pour faire tourner le torréfacteur.

Bref, tout y est. Il ne manquerait plus que des camions de poulet frit viennent récupérer la marchandise pour que l’on soit à 100% dans l’univers de la production créée par Vince Gilligan. À la place, nous sommes en face du « Heisenberg » turc (surnom du héros de la série, nda). Plus connu sous le nom de Deniz Kosan, c’est ce jeune homme né à Munich et âgé de 28 ans qui se trouve derrière la trouvaille. D’ordinaire en combi jaune, Deniz reçoit à la coule en t-shirt et toute barbe dehors. Il explique que le concept est né d’une blague dans laquelle son cousin le comparait à Walter « Heisenberg » White. À l’époque, notre héros est propriétaire d’un petit café de 10 m2 à Istanbul. « Au départ, on n’y a pas pensé sérieusement, continue-t-il avec un accent américain. Mais, à un certain point, l’idée m’obsédait, donc j’ai vendu mon business et décidé d’investir dans le projet aux États-Unis. » Deniz part pour New-York, trouve un endroit et même un investisseur a priori intéressé. Problème, nous sommes fin 2014 et les télés américaines ne retransmettent plus Breaking Bad. Apeuré par la potentielle baisse de popularité autour du show, l’investisseur se retire. Et Deniz revient en Turquie, bredouille.

« J'étais addict »

La déception ne durera pas longtemps. En novembre 2014, la plus grande ville de Turquie organise la première édition du Istanbul Coffee Festival. Un évènement qui accueille tous « les professionnels du café ». Deniz s’y pointe avec son idée et deux mois après, trouve un endroit à louer et trois partenaires à fond derrière lui. « On s’est installé dans un ancien billard. On en a fait le bar à café le plus grand et le plus cool de la ville », affirme-t-il sans clin d’œil. Aujourd’hui, Deniz qui est à la fois « fondateur et CEO » emploie 15 personnes. Quant à lui, il « fait un peu tout », de la communication sur les réseaux sociaux au service, en passant par la torréfaction du café. Lorsqu’on lui demande combien a coûté ce joli business, le jeune entrepreneur ne souhaite pas divulguer le montant. En revanche, il assure qu’il a investi tout son argent. « J’ai zéro, sur mon compte en banque », dit-il avant de répondre à un message d’un client qui cherche le bar sur Instagram.

Cela dit, une question reste en suspens. Pourquoi est-ce le visage de Walter White qui est imprimé sur les pancakes de Deniz Kosan et pas celui de Mc Nutty de The Wire, ou de Frank Underwood de House of Cards ? Tout simplement parce que « Breaking Bad est la meilleure série de tous les temps », selon notre homme. Qui s’emballe : « Les décors, le jeu d’acteur, l’humour noir et les incroyables revirements scénaristiques, c’est juste génial ! ». Marrant, aussi. Parce qu’à la base, Deniz n’est pas du tout un amateur de série. En vrai, il découvre Breaking Bad bien après tout le monde, lors d’un voyage aux États-Unis. « En 2013, je faisais un road-trip aux States, raconte-t-il. J’allais à Los Angeles et la série vivait une hype incroyable puisque l’on en était à la fin de la dernière saison. Arrivé à L.A, une amie me dit qu'un théâtre organise la retransmission du grand final, en public. Je devais la voir vite. Je suis arrivé à bout des 5 saisons en deux jours. Puis je les ai regardées encore une fois. Jusqu’à ce que j’achète plus tard la collection intégrale en Blu-Ray. J’étais addict. »

 Le pitch ? Commercialiser une drogue légale

Si le concept s’est construit sur une blague, l’idée, quant à elle, est bel et bien contenue dans un des épisodes. Lors de la saison 3, l’un des partenaires de Walter White, Gale, prépare du café en utilisant du matériel scientifique. « J’ai pensé que c’était une bonne idée. Je me suis dit, "attends le café, c’est addictif pour certaines personnes et en plus, c’est légal. Here you go !" ». Une année plus tard, Deniz ouvrait le Walter’s Coffee qui est en train d’affoler la planète des hipsters et des fans de séries. Buzzfeed et Mashable ont déjà contacté le proprio qui doit faire face à des hordes de touristes, accourant déjà pour boire le café dans un bécher. La suite ? « L’expansion ! », s’écrie Deniz. « Avec tout le succès que l’on a, j’ai même pensé à créer une chaîne à travers le monde. Un Walter’s Coffee ouvrira à New-York bientôt et un autre, probablement à Dubaï. » Un café inspirée de la meilleure série jamais réalisée sur la méthamphétamine aux Émirats Arabes Unis. Et si on ne tenait déjà pas là, le meilleur cliffhanger de l’année ?

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Walter's Coffee Roastery : Caferaga Mah. Badem Altı Sk. No:21/B Istanbul

Story by

Matthieu Amaré

Je viens du sud de la France. J'aime les traditions. Mon père a été traumatisé par Séville 82 contre les Allemands au foot. J'ai du mal avec les Anglais au rugby. J'adore le jambon-beurre. Je n'ai jamais fait Erasmus. Autant vous dire que c'était mal barré. Et pourtant, je suis rédacteur en chef du meilleur magazine sur l'Europe du monde.