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Le retour de l’euro-scepticisme à la française

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Le zinc de l'Europe

A ceux qui se demandaient encore si Nicolas Sarkozy incarnait la rupture ou la continuité, le camp de la continuité vient de marquer un point. Fidèle à la grande tradition républicaine française, notre hyper-président, plaçant ses pas dans ceux de ses prédécesseurs, vient de se livrer une fois de plus au petit jeu du « c’est la faute à Bruxelles ».

Débarquant en grande pompe au port de Boulogne, flanqué de son ministre de l’Agriculture et de la Pêche Michel Barnier, qui devait se demander ce qu’il foutait là, il nous a servi un discours anti-quotas dans le plus pur style populiste anti-européen !

La recette est connue, et elle marche à chaque fois. C’est imparable. Prenez un groupe social souffrant de difficultés objectives et rajoutez en un peu dans le misérabilisme. Faites revenir le tout dans du bon gros nationalisme à papa en élevant ledit groupe au rang de patrimoine national. Mélangez le tout avec des vrais morceaux de discours anti-élite et anti-bureaucratie et vous obtenez un grand classique de la gastronomie française, le « discours qui détourne l’attention sur l’Europe quand les sondages sont pas bons » !

Bah oui, c’est étrange tout de même ! Au moment même où il passe pour la première fois en dessous de la majorité de satisfaits, il se trouve soudain un grand intérêt pour les pêcheurs… Oui, mais en fait, les pêcheurs, c’est du pain béni pour un président. Il n’est responsable de rien ! L’agriculture et la pêche sont les deux politiques les plus intégrées, les plus communautarisées. Tout se décide à Bruxelles. Et là, c’est le festin ! On peut taper tant qu’on veut, de toute façon, il n’y aura pas vraiment de conséquences… enfin, à part renforcer le sentiment anti-européen, mais ça c’est pas grave !

Interrogé sur France 2, le pauvre Michel Barnier ne savait plus où se mettre. Il a commencé par se lancer dans des explications compliquées, d’où émergeait l’idée que ce serait mieux si les quotas étaient décidés pour trois ans, au lieu de un seul, ça permettrait aux pêcheurs de mieux prévoir… Moi, ça me paraît assez sensé comme idée… mais ça n’avait rien à voir avec le discours de Sarkozy ! Ce discours, c’était n’importe quoi, c’était de la violence pure, de l’agression gratuite ! Rien d’articulé n’en sortait, à part que c’était de la faute de Bruxelles !

Mais le meilleur était à venir. Le journaliste, intelligent pour une fois, demande : « mais, au fait, vous aviez prévenu vos partenaires européen de cette sortie ? ». Et là, c’est le drame, Barnier est gêné, hésite, puis dit « heu, bah on avait quand même dit en décembre qu’on était pas d’accord avec le système ». Pitoyable… Michel Barnier, européen convaincu, rédacteur du traité constitutionnel, réduit à une telle farce par les frasques de son clown de patron… Comme toujours, en France, plus ça change plus c’est pareil !

Parfois je me mets à rêver. Et dans mes délires, Barroso, Walström et toute la clique décident un beau jour d’arrêter les communiqués de presse lénifiants et consensuels. Ils arrêtent d’avoir peur de leur ombre et se mettent à rentrer dans le lard des dirigeants nationaux quand ils jouent les euro-sceptiques intérimaires. Avec des vrais arguments qui démontrent à quel point tous ces discours sont incohérents, stupides et malhonnêtes ! Dans mes rêves, l’Union européenne arrête de tendre l’autre joue !

Vous allez me demander à quoi je tourne pour dire des conneries pareilles. Oui, je sais, c’est complètement irréaliste… mais ça aurait de la gueule, non ?