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Impressions mi-figue mi-raisin pour les 4 de Visegrad

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Default profile picture Sandrine Mallet

Alors que les entrées de la Roumanie et de la Bulgarie se profilent à l’horizon 2007, les quatre pays du groupe de Visegrad -la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie- redoutent de voir se réduire leur part de la manne européenne

Ce sont les anciens membres de l’Union européenne qui ont d’abord rechigné à partager le gâteau européen avec les nouveaux entrants. Et aujourd’hui, bien que la majorité des personnes sondées dans la « nouvelle Europe » se déclarent heureuses de leur adhésion à l'ancien club des 15, beaucoup expriment leur déception qu’elle n’ait pas eu les conséquences espérées. Une attitude qui explique que la perspective d’ingérer d'autres Etats suscite des inquiétudes.

Des vues divergentes

A en croire l’enquête Eurobaromètre de septembre 2005, le soutien à l’adhésion des Tchèques, Slovaques et Polonais a augmenté depuis l’entrée de ces pays en mai 2004. Le seul du clan des « 4 de Visegrad » à faire exception est la Hongrie, où le degré de support a atteint son niveau le plus bas (42 %). Selon Gábor András, membre de l’institut de recherche sociales hongrois TARKI, cette baisse « pourrait s’expliquer par le fait que l’adhésion n’a pas rempli les grandes espérances des Hongrois ». A l’opposé, Michal Wenzel, du centre d'opinion polonais CBOS observe une tendance inverse en Pologne : « Les Polonais ont été soulagés de constater que l’adhésion n’avait entraîné aucuns changements spectaculaires. La majorité d’entre eux n’a pas encore tiré profit de l’intégration mais les scénarios les plus pessimistes ne se sont pas non plus réalisés. »

Ce sondage Eurobaromètre a également montré que l’avenir des agriculteurs, l’externalisation, le développement du crime organisé et du trafic de drogue mais aussi la perte d’une influence politique en raison de leur petite taille figuraient au nombre des craintes des pays du groupe de Visegrad. Peurs partagées, leur intensité diffère néanmoins d’un pays à l’autre, la République tchèque se montrant par exemple particulièrement soucieuse des aspects financiers.

Le poids de l’Histoire

Cette différence d’attitude est également perceptible dans l’enthousiasme provoqué par une éventuelle extension de l’Union européenne. La Pragoise Zuzana Kršjaková souligne que « les raisons de la peur d’un nouvel élargissement sont au fond les mêmes que celles avancées par les anciens Etats membres en 2004 : main d’œuvre bon marché en provenance de l’est et attribution des fonds de cohésion et des fonds structurels aux derniers arrivés ». Même si les Tchèques, à l’instar des Polonais et des Slovaques, sont globalement favorables à l’entrée de nouveaux pays.

La Hongrie figure parmi les plus sceptiques des 10 nouveaux adhérents mais elle fait contre mauvaise fortune bon coeur, prenant systématiquement parti en faveur du droit de ses voisins à rejoindre l’Union. István Szent-Iványi, eurodéputé hongrois, estime ainsi que « la société magyare dans son ensemble n’a pas ‘peur’ de l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie. Pour des raisons historiques, les Hongrois émettent néanmoins quelques réserves envers la Roumanie ». Les racines de ces réticences contemporaines remontent à 1920, lorsque, à l’issue de la première Guerre mondiale, la Transylvanie fut annexée à la Roumanie. Aujourd’hui, cette zone d’une superficie de près de 100 000 km2 environ, compte près de 1,4 million de Hongrois qui espèrent, sous la bannière de l’Europe, revenir symboliquement dans le giron de la mère patrie. Ainsi, Erika Törzsök, de l'organisme hongrois sur la Recherche Comparée des Minorités de l’Europe (BECMIR), déclare que l’adhésion de Bucarest serait « une chance historique pour la nation hongroise de vivre sous un régime économique et politique identique ».

Il est intéressant de constater que malgré cet antagonisme d'antan et l'inquiétude que les prétendants à l'accession, encore plus pauvres qu’eux, ne réduisent leur part des fonds européens, les nouveaux adhérents se montrent toujours plus positifs à l'égardd d'un nouvel élargissement que la « vieille Europe ». Pourquoi ? Les 10 entrés en mai 2004, à la différence des anciens, versent au budget commun une contribution largement inférieure aux sommes qu’ils perçoivent. En outre, ayant vécu plusieurs décennies à l’ombre du Rideau de fer, leurs habitants font preuve d’une plus grande compréhension envers les pays ayant le même passé historique.

Ah ! Si j’étais riche…

Mais même s’ils partagent un lien historique, les pays de Visegrad font de leur mieux pour s’assurer que l’arrivée de Bucarest et Sofia ne se fera pas à leur détriment. Les négociations concernant le budget européen 2007-2013 ont déjà débuté et les petits nouveaux devront batailler ferme avec les Etats fondateurs pour obtenir une part acceptable du gâteau européen. En conséquence, la consolidation rapide du budget est une priorité pour la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie qui craignent de recevoir moins d’aides, une fois passé le cap 2007.

Le groupe de Visegrad redoute également que l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie ne signifie pour eux une baisse de compétitivité. Selon Eurostat, le taux de croissance économique de la Roumanie et de la Bulgarie est près de 2 % supérieur à celui de la région de Visegrad. De plus, les coûts de main d’œuvre et la fiscalité y sont encore plus faibles que chez les jeunes membres de l’Union. Pour atténuer ces craintes, il est bon de jeter un œil au dernier rapport de la CNUCED (Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement). Il montre que l’arrivée des capitaux étrangers dans les 10 nouveaux Etats membres a augmenté de 69 % depuis leur adhésion à l’Union européenne. Bien que les deux pays candidats à l’adhésion soient les principaux bénéficiaires des investissements étrangers directs en Europe du sud-est, ils ont moins la cote auprès des investisseurs que les nations du groupe de Visegrad.

Quelque soit l’issue des négociations budgétaires, il est clair que la Roumanie et la Bulgarie, à l'instar des autres nouveaux membres, recevront des coffres européens bien moins d’argent que les pays ayant intégré l’Union dans les années 80 et 90 (Grèce, Portugal, Espagne puis Autriche, Finlande et Suède). Comme le souligne M. Szent-Iványi, il est temps « pour les Etats membres de cesser de se chicaner pour quelques euros et de se rappeler leur but commun : accroître la compétitivité de la Communauté ».

Translated from Mixed feelings among Visegrad four